100 milles avec les nouveaux Yamaha 425 XTO .............
Nous avons pu essayer en exclusivité le 425 chevaux XTO, le temps d’une traversée Corse-continent à bord d’un Capelli Tempest 44. Récit…
Le voici donc, le fameux 425 chevaux Yamaha XTO que personne n’avait vu venir et dont l’annonce en mai dernier a stupéfié tout le monde. Nous l’avons découvert début septembre dans le port de Sant’Ambroggio entre Calvi et l’ÎleRousse... en triple exemplaire puisque trois de ces V8 trônaient sur le tableau arrière du massif Capelli Tempest 44 avec lequel nous allions faire la traversée vers Mandelieu. Il existe, bien sûr, d’énormes semi-rigides Sacs ou Magazzu dotés de fortes motorisations diesel, mais, devant ce Capelli équipé avec plus de 1 200 chevaux hors-bord, nous avions clairement la sensation de quelque chose d’inédit. Le top départ est donné le lendemain matin, avec un créneau météo favorable consistant en une légère brise et un peu de clapot. La nuit n’est pas très sereine ; on ne sait jamais ce qui peut se produire avec des moteurs d’une conception ultra-récente et venant à peine d’être mis sur le marché ! Mais notre Capelli a déjà fait l’objet de longues séances photos pour les catalogues et les V8 ont déjà tourné une soixantaine d’heures. À 7 h 20, nous appareillons. Une pression sur le bouton « start » et les Yamaha démarrent : c’est rond, feutré, ça promet ! Sous les ordres du joystick, notre 44 pieds recule puis pivote sur place. La nouvelle direction entièrement électrique est proéminente sous la tête motrice. Système complètement inédit en hors-bord, elle est aussi extrêmement discrète. Au sortir de Sant’Ambroggio, nous devons mettre cap au 302 pour toucher notre destination finale. Les moteurs n’ayant pas encore de pilote automatique intégré, nous sommes contraints de maintenir le cap nous-mêmes. Au milieu de l’immense planche de bord, le petit lecteur de carte Raymarine matérialise la route à suivre. Sans perdre de temps, Nicolas, patron des Chantiers navals de Calvi, pousse les commandes de gaz électriques jusqu’à 4 200 tours pour une vitesse de 37 à 38 noeuds. La montée en régime est souple, et les V8 déjaugent cette coque de 6 tonnes sans effort. À l’origine, le Tempest 44 était donné pour une puissance maximale de 3 x 350 chevaux ! Avant même l’essai, nous n’avions cependant aucun doute que cet ensemble allait flirter avec les 55 noeuds, voire plus. Sans trop forcer, nous estimons arriver avant 10 heures à Mandelieu. Derrière nous, le soleil est aligné sur notre route. La lumière matinale baigne la baie dans une belle couleur orangée.
La bonne blague du coupe-circuit...
Il y a un peu de clapot et de houle de travers, et la brise ride la surface de l’eau, mais notre pneu suit sa trajectoire, imperturbable, procurant une sensation de masse, d’énergie cinétique très importante, grisante aussi et qui donne l’envie d’aller toujours plus vite. Alors que Nicolas pousse les gaz jusqu’à 4 900 tours, la carène devient plus aérienne et vole de crête en crête ; nous voici à présent à 43 noeuds... et ce n’est pas fini. Au bout d’une heure, Nicolas me propose de prendre la barre. Il n’est pas facile de rester serein quand on s’apprête à piloter un engin valant plusieurs centaines de milliers d’euros ! Qui plus est, nous procédons de manière un peu sportive en ralentissant à peine l’allure pour cette « passation de pouvoir ». Immanquablement, au moment d’attacher le coupe-circuit, celui-ci saute car le cordon est un peu emmêlé. Les moteurs s’arrêtent aussitôt – une bonne nouvelle –, et la décélération n’est heureusement pas trop brutale. Les V8 redémarrent sans broncher et nous grimpons graduellement vers les 38 noeuds. Soudain, nous apercevons sur bâbord, à une centaine de mètres, une grosse masse bleue qui émerge de la surface. C’est sans doute un rorqual commun vu la forme de la nageoire dorsale... De quoi nous rappeler que nous sommes en plein coeur du sanctuaire marin Pelagos. Peu de temps après, un panache d’eau s’élève dans les airs et le cétacé regagne les profondeurs. Une collision à haute vitesse avec un tel animal serait probablement assez néfaste, surtout quand on sait qu’ils peuvent peser jusqu’à 70 tonnes ! Il faut à présent reprendre la route et s’imprégner du cap à suivre, en limitant les oscillations de part et d’autre de cette trajectoire parfaite. Nous sommes quasiment seuls sur le plan d’eau, à perte de vue. La direction se montre souple, précise, agréable et le pilotage est très facile. Sur la partie hauturière du parcours, nous subissons une légère houle courte par le travers qui oblige à être attentif et à doser les gaz en conséquence. Le Trim Assist est enclenché, ce qui facilite grandement la tâche. Il faut tout de même
rester concentré, car il n’est pas rare de tomber sur des objets plus ou moins gros flottant entre deux eaux. Une palette, un tronc d’arbre, une bâche en plastique ou un morceau de filet de pêche peuvent faire des dégâts. Et, comme ce Tempest 44 doit être une des stars du stand Capelli à Cannes, il ne s’agit pas de l’égratigner ! Après deux heures de navigation, nous percevons un changement de bruit des moteurs et la vitesse se met à tomber. Après un regard en arrière, nous comprenons que le moteur de tribord est complètement relevé... L’explication est simple ; ma main étant restée longtemps en appui sur le boîtier de commande afin de pouvoir décélérer à tout moment, mon petit doigt s’est appuyé accidentellement sur le bouton de relevage du moteur numéro 3.
Aucune alarme de surchauffe n’a retenti, et tout semble normal. Les trois V8 redémarrent docilement. Le continent arrive en vue. Nous apercevons un gros cargo rouge semblant faire route vers l’Espagne, puis un catamaran habitable à voile faisant de son mieux dans la pétole. Enfin, un superbe Riva 63 Vertigo nous croise sur bâbord ; ce sera le seul bateau à moteur de toute la traversée. Devant l’imposante vague de sillage du Riva, nous prenons la sage décision de lever le pied, au moins pour préserver l’équipage.
Une montée à 54 noeuds à l’approche du continent
Comme souvent, la mer s’aplanit à mesure que la terre approche. Nicolas, aux manettes, décide de pousser les gaz à fond, pour savoir ce que nos V8 ont dans le ventre. Je me cramponne à la barre, redoublant de vigilance. Cinquantedeux, cinquante-trois, cinquante-quatre noeuds, l’indicateur de vitesse s’affole et notre Tempest se met à voler au-dessus des eaux. C’est le bonheur chargé d’adrénaline ! Le port de La Napoule est à présent devant notre étrave. Il est 10 h 02 et nous avons consommé 555 litres. Sur le quai, Xavier Enjalbert, technicien Yamaha pour le sud, attend impatiemment notre compte rendu. « Non seulement vous êtes allés plus vite, mais vous avez consommé moins qu’avec trois F350 », lance-t-il. Nous amarrons le monstre de 13 mètres sous la grue du port, avec des étoiles dans les yeux suite à cette belle escapade. Mais aussi soulagés de n’avoir subi aucun dommage mécanique juste avant l’ouverture imminente du plus grand salon nautique à flot d’Europe... ■