Raster ou vecteur
La carte électronique est déclinée sous deux formats fondamentalement différents, le raster (ou matriciel) et le vectoriel. Le premier est obtenu grâce à la numérisation à haute définition des cartes papier à l’aide d’un scanner. Toutes les données, textes compris, sont rigoureusement identiques au document d’origine, géoréférencées et affichées sous forme de pixels, comme n’importe quelle photo numérique. La qualité de rendu est optimale à l’échelle du scan, soit 100 %, mais les variations du zoom, à l’agrandissement comme à la réduction, dégrade la visibilité. Autre point important, le document raster reste à l’échelle du document papier original. Pour donner l’illusion d’une certaine continuité, les éditeurs ont développé une technique d’affichage dite « seamless », qui permet d’enchaîner à l’écran de manière la plus fluide possible des cartes raster d’une même zone, mais de différentes échelles, du 1:150 000 à 1:5 000 par exemple, sans trop faire apparaître leur cadre. Peu coûteuses à fabriquer, hormis les royalties à verser aux instituts hydrographiques, les raster changent peu les habitudes des utilisateurs de carte papier mais, comme il ne s’agit que d’une image, la rotation cap en haut engendre une rotation complète des textes, ce qui ne facilite guère leur lecture. Un point plus important porte sur les mises à jour, qui dépendent de la bonne volonté des éditeurs à scanner de nouveaux documents, et ce pour toutes les zones de couverture… À la différence du raster, la technologie vectorielle consiste à décrire une carte non sous formes de points élémentaires, mais sous forme de vecteurs mathématiques et de textes. Organisés en couches indépendantes dans une vaste base de données, ils permettent, après traitement par le logiciel de navigation, de figurer à une échelle continue tous les éléments utiles d’une carte papier, bouées, traits de côte, isobathes, feux, dangers, etc., et d’en ajouter d’autres, marées, courants, informations sur les ports et capitaineries, photos aériennes et satellites, relief des fonds et des côtes, etc. La structure en base de données des cartes vectorielles exige des éditeurs une saisie complète des fonds cartographiques existants, ce qui mobilise des investissements d’envergure et explique pourquoi seuls deux acteurs majeurs, Navionics et C-map, se partagent aujourd’hui le marché. Le vectoriel autorise aussi le développement d’innombrables fonctionnalités complémentaires, affichage des détails à la demande et avec une qualité visuelle constante, rotation indépendante de la carte et des textes, couplage avec le GPS pour le système AIS, la proximité de dangers, la hauteur des fonds en fonction de la marée, mise à jour simplifiée par remplacement de fichier… La connectivité mobile à Internet a également permis de proposer des services inédits, comme les calques communautaires qui viennent enrichir gratuitement la base de données de l’éditeur. Les utilisateurs peuvent y partager leurs points d’intérêt ou les relevés bathymétriques à haute résolution de leur propre sondeur. L’engouement actuel pour les réseaux sociaux entretient cette tendance participative. Dernier avatar en date, l’autoguidage permet, à la manière d’un GPS d’automobile, de calculer automatiquement la route d’un point A à un point B, en tenant compte de paramètres géographiques (obstacles naturels, épaves, trait de côte, profondeur, etc.), environnementaux (marées, courants, etc.) et des caractéristiques du navire, tirant d’eau, vitesse, consommation, etc. Parfois délicat sur la route, l’autoroutage l’est plus encore sur l’eau, car il n’y a pas de route physique existante mais une multitude de virtuelles ! La pertinence du résultat est très loin d’être garantie, les algorithmes intelligents ne l’étant pas tout à fait. C’est aussi l’occasion de rappeler que la carte et le logiciel ne sont que des aides à la navigation et que la responsabilité finale appartient au chef de bord et à son expérience et non à ses instruments...
Des différences fondamentales…