Bonifacio et ses environs en hiver…
La cité des falaises nous a présenté un visage différent, à mille lieues des cartes postales estivales, le temps d’une navigation qui nous a menés jusqu’à Sant’Amanza.
Il fallait oser arriver fin février au sud de la Corse-du-Sud, en espérant que les eaux seraient aussi turquoise qu’en été... Venir sur l’Île de Beauté ces temps-ci demande déjà un peu d’organisation, au départ du continent. Il faut présenter avant l’embarquement dans l’avion ou le ferry un test PCR négatif réalisé dans les 72 heures précédant le départ. Le laboratoire n’a pas intérêt à traîner !
À notre arrivée au port de Bonifacio, nous avons été accueillis par une brume épaisse. Même la citadelle ne voulait pas nous voir, drapée dans le brouillard ! Météo Consult nous avait pourtant confirmé la veille que ce serait la plus belle journée de la semaine. « C’est une brume de chaleur, ça va se lever », nous assure Jérémy Dijou de Nautic Aventures, notre guide pour l’occasion.
La citadelle perdue dans le brouillard
Nous appareillons depuis le quai nord, à côté de la capitainerie. Le célèbre port est niché dans une étroite et profonde gorge entre les falaises calcaires ; une sorte de fjord méditerranéen, si l’on peut oser cette comparaison, d’environ un kilomètre et demi de long pour une centaine de mètres de large. Alors que nous progressons dans la brume, le bruit lancinant d’un marteaupilon résonne entre les falaises. Le port est en travaux durant cette trêve hivernale avant la reprise très attendue de la saison touristique. Assez rapidement les opportunités de poser l’étrave sur le sable se présentent. À trois cents mètres du port, au nord, une gorge secondaire mène jusqu’à la calanque de la Catena. Cette crique, qu’il n’est pas facile d’atteindre à pied, est un lieu de repli privilégié même en haute saison. Les eaux translucides et peu profondes sont cernées par un maquis vert et luxuriant. Nous poursuivons notre route, laissons le phare de la Madonetta sur tribord et mettons le cap sur la destination la plus évidente : l’anse de
Fazzio. Ce site, à la fois spectaculaire et proche de Bonifacio, est à moins d’un mille au nord. Ce mouillage prisé ressemble à une calanque très sauvage dont l’entrée est gardée par un îlot calcaire. Au sud, l’îlot délimite un goulet étroit donnant accès à une plage pittoresque. L’eau cristalline contraste avec le vert intense du maquis. Cette anse donne la sensation d’être très abrité, dans un coin de paradis.
Nous repartons au sud vers la grotte la plus proche : Sdragonato. Les grottes sont un incontournable de la navigation à Bonifacio, elles fascinent petits et grands et sont plus accessibles en dehors de la saison estivale. Attention, une marque flottante en interdit parfois l’accès. Sdragonato offre une entrée relativement grande mais, en cas de ressac, elle peut devenir problématique. Une caractéristique est le puits de lumière évoquant la forme de l’Île de Beauté et donnant des éclats turquoise à l’eau, en contraste avec les parois sombres de la vaste caverne. Nous continuons dans cette veine touristique en nous rendant au Chapeau de Napoléon, une anfractuosité dans la falaise avec une forme évoquant le bicorne de Bonaparte. Plus au sud, nous passons devant u Timun, le Gouvernail de la Corse, nom donné à ce rocher dont la forme évoque un safran, puis devant l’escalier du roi d’Aragon taillé dans la falaise.
Le point le plus méridional de toute la Corse
Ses 187 marches s’élèvent à 65 mètres au-dessus de la mer. L’escalier a subi une récente rénovation et zèbre désormais la paroi d’une marque blanche plus visible qu’auparavant. Nous marquons une halte
Les criques sont absolument sommes loin désertes, nous estivale. de la frénésie
devant u Diu Grossu, le Grain de sable, ce morceau de falaise monolithique qui s’est retrouvé isolé au fil de l’érosion, et dont l’image est sur presque toutes les cartes postales de Bonifacio.
Notre route se poursuit vers le cap de Pertusato, le point le plus méridional de la Corse. Dominé par le phare du même nom, il exhibe d’impressionnants plateaux de calcaire polis et blanchis par les éléments au fil des siècles.
En passant Pertusato, nous retrouvons enfin le soleil
Sur toute cette portion, il est possible de se régaler à pratiquer le rase-cailloux et explorer les recoins d’un littoral très accidenté. En contournant la pointe sud de l’île, on arrive au cap de Spérone, surplombé par le célèbre terrain de golf réputé comme l’un des plus beaux d’Europe. Nous contournons le cap et arrivons à la plage du Petit Spérone, qui nous tend les bras. Au passage du cap, nous sommes finalement accueillis par le soleil. Le faible tirant d’eau de notre semi-rigide Sea Water nous permet d’aller poser l’étrave sur le sable pour aller voir les étonnants escaliers de pierre permettant l’accès à la plage par le nord et par le sud. Nous passons ensuite entre l’île Piana et la spectaculaire plage de Piantarella, un lieu très prisé par les kitesurfeurs et funboardeurs. Le banc de sable est assez redoutable, avec moins d’un demimètre de fond par endroits, mais en semi-rigide et en ouvrant l’oeil il n’y a pas de problème. Plus d’un yacht imprudent s’est échoué ici... Nous laissons les îles Lavezzi sur tribord et longeons la péninsule qui délimite le golfe de Sant’Amanza. En y entrant, il est difficile d’appréhender sa profondeur : pas loin de 5 kilomètres !
Au nord, la splendide plage de Balistra avec son étang est desservie par un sentier à peine carrossable : mieux vaut mille fois prendre le bateau !
Nous arrivons finalement au fond du golfe, à la plage de Maora. C’est là que M. Dijou père nous attend avec la remorque et le tracteur pour sortir notre Sea Water de l’eau. Les deux kilomètres de départementale, assis dans le bateau derrière le tracteur, pour rejoindre le chantier Nautic Aventures, furent certainement le moment le plus cocasse de cette balade ! ■