Comment combattre l’humidité
Été comme hiver, un bateau est exposé à une humidité permanente, un facteur à ne pas négliger, car ses effets peuvent être importants, sur le matériel et sur l’équipage. Heureusement, des gestes préventifs et des traitements curatifs peuvent minimiser les dégradations d’un phénomène aussi naturel qu’inévitable.
Pour bien comprendre le processus et adopter les bonnes mesures préventives, un petit rappel de quelques notions de physique élémentaire n’est sans doute pas inutile ! Comme définie par la météorologie, l’humidité désigne la quantité de vapeur d’eau contenue dans l’air. Pour la mesurer, on utilise deux méthodes, absolue et relative. La première exprime en gramme par mètre cube d’air la quantité d’eau atmosphérique, invariante et non soumise aux variations de température. La seconde, de loin la plus utilisée, évalue en pourcentage le rapport entre la quantité de vapeur d’eau contenue dans l’air à un instant T et la quantité maximale possible ; 100 % d’humidité relative correspond ainsi à un air saturé en vapeur d’eau (pluie, brouillard...) et 0 % à un air parfaitement sec (un niveau jamais atteint dans la nature, même dans les déserts).
De l’importance d’une bonne aération…
Plus l’air est chaud, plus il est susceptible de contenir de la vapeur d’eau et, quand il refroidit, cette vapeur se condense et passe à l’état liquide, l’humidité relative variant avec
la température de l’air. Au cours d’une journée d’été, la montée en température fait baisser le taux d’humidité relative, la zone de confort se situant entre 40 et 60 %. À 30 °C, l’air ambiant peut contenir jusqu’à 30 g de vapeur d’eau par mètre cube et 3 grammes seulement à – 5 °C. Tous ces chiffres expliquent pourquoi aérer son bateau une chaude journée d’été avant de refermer ses coffres et de le couvrir d’une bâche peut, au premier refroidissement venu, conduire à la condensation sur les parois froides de la coque d’une grande quantité d’humidité, qui engendrera moisissures et corrosion. À l’inverse, aérer au plus froid de l’hiver laissera passer un air sec, qui le sera plus encore au fil du printemps. Invisible, la vapeur d’eau se diffuse partout à l’intérieur comme à l’extérieur du bateau et sa condensation sous forme liquide va altérer de manière plus ou moins prononcée tous les matériaux contenus à bord. Les constructeurs ont beau choisir les plus durables, la corrosion finit par gagner les surfaces métalliques, en particulier les connecteurs électriques et les
surfaces textiles, bois et papier sensibles au développement de moisissures, pourritures microbiennes et autres champignons.
Ces observations physiques permettent de comprendre pourquoi la seule méthode préventive consiste à laisser l’air circuler le plus librement possible afin d’égaliser la température et l’hygrométrie ambiante avec celle située à l’intérieur du bateau. On évite ainsi les phénomènes de condensation, transformant la vapeur en eau liquide, potentiellement destructrice. Pour ces raisons, on doit considérer l’aération dans son ensemble, en ne laissant subsister aucun recoin hermétiquement clos, une idée paradoxale pour un bateau dont la qualité première est l’étanchéité !
La ventilation est trop souvent négligée
Malgré l’importance du sujet, force est de constater que les travaux des architectes et bureaux d’études concernés ne sont pas toujours très poussés en matière d’aération à bord. Outre les unités habitables, dotées d’importants volumes d’aménagement, la plupart des transportables, semi-rigides, opens, bow-riders, etc., sont équipés de consoles ou de coffres fermés qui sont autant de pièges à humidité, mais pourtant indispensables au fonctionnement du navire. Le travail du concepteur est d’autant plus délicat qu’il est malheureusement très difficile, voire impossible, d’analyser le mouvement des flux d’air à l’intérieur de la coque et des aménagements, car ils dépendent fortement de la géométrie propre des volumes et de leur cloisonnage. À l’exception des compartiments moteur et des batteries, qui font l’objet de contraintes spécifiques, rien n’est prévu dans la réglementation pour assurer une aération
optimale, susceptible de limiter les effets d’un niveau d’humidité trop élevé. Les endroits sensibles sont les équipets, tiroirs et, le cas échéant, le compartiment froid, glacière ou réfrigérateur, qu’il vaudra mieux laisser grands ouverts durant toute la période d’hivernage. Rarement prévues par les constructeurs, des portes cannées ou à persienne laissent parfaitement circuler l’air ambiant dans les aménagements, même en position fermée. Avec des portes pleines, une grille ou des trous d’aération, situés dans la partie haute pour éviter une éventuelle inondation de l’eau des fonds, sont conseillés.
Gare aux effluves malodorants
Les coffres extérieurs, qui contiennent souvent des objets humides, défenses, amarres, ancre, ligne de mouillage, annexe, etc., sont souvent victimes de l’humidité qui va en outre encourager la dégradation de certains éléments biologiques marins, plancton ou algues, et développer des effluves malodorants.
Des aérateurs supplémentaires dans les capots de chaque compartiment sont généralement suffisants pour résoudre cette question, mais il faudra aussi adopter une attitude préventive en rinçant périodiquement les objets contaminés à l’eau douce, le sel contenu dans l’eau de mer attirant fortement l’humidité atmosphérique. ■