La remontée de la Laïta
Faisant office de séparation naturelle entre le Finistère et le Morbihan, la Laïta est un ravissant fleuve côtier qui se jette dans l’Atlantique entre le Pouldu et Guidel. Nous l’avons remonté par très grande marée basse, grâce à un Scoot-X – étonnant bateau doté d’un très faible tirant d’eau – qui nous a permis de tutoyer les bancs de sable.
La fenêtre de tir était étroite… Entre la météo capricieuse du mois de février, les disponibilités des bateaux et les marées, il n’était pas évident de planifier notre reportage, encore moins de sélectionner le bon jour pour cette remontée de la Laïta. Ce projet de navigation nous trottait dans la tête depuis le précédent Nautic de Paris, où était exposé le Scoot-X (voir l’encadré consacré à son essai), dernier-né du constructeur lorientais Bagoù Boats. Jérôme Clément, l’un des deux associés du chantier, nous propose de tester cet étonnant bateau (car c’en est bien un !) sur la Laïta.
Calme et dotée de rives attrayantes, cette petite parenthèse bleue entre deux côtes très verdoyantes est en effet un terrain de jeu idéal pour bien prendre en main le Scoot-X.
Fort coefficient et marée basse
Même si la marée n’était pas vraiment favorable, nous avons profité d’une des rares journées ensoleillées de février, et ce en dépit d’un fort coefficient d’environ 80. De plus, la mer baissait au moment où nous mettions les bateaux à l’eau. Autant dire que le chemin risquait d’être pavé de nombreux bancs de sable. La capitainerie nous avait prévenus... Il semblait difficile de remonter au-delà de l’abbatiale de Saint-Maurice, située au niveau du premier tiers de la distance parcourue entre l’embouchure et Quimperlé, où la Laïta se forme à la confluence de l’Ellé et de l’Isole. Mais le défi méritait d’être relevé, l’objectif étant d’aller le plus loin possible…
C’était peut-être un peu audacieux car, en règle générale, à marée descendante, la Laïta se parcourt depuis Quimperlé vers l’embouchure et non dans le sens inverse. Jérôme Clément donne le ton dès
les premières minutes, sur le parking du port de Guidel : « Le maître mot de ce Scoot-X est la simplicité. » Celle-ci nous est confirmée sur la cale de mise à l’eau, où le bateau tient sur une petite remorque et s’avère des plus faciles à manipuler. L’embarquement surprend, tant le bateau est stable, bien loin des stand-up paddles avec lequel il n’a rien de commun. La prise en main est intuitive grâce à un guidon et à l’accélérateur situé sur la poignée droite. La position de pilotage est excellente, et il est même possible de se tenir debout, sans risque de chavirer. Nous tournons le dos au large, là où la Laïta rencontre l’Atlantique, car la présence d’une barre nous interdit ce jour-là l’accès aux puissantes vagues qui se lèvent au-delà de l’embouchure.
Naviguer en silence sur la rivière
En revanche, le Scoot-X se joue sans difficulté du courant fort dont les veines pulsent entre les bouées de mouillage. Comme avec toutes les motorisations électriques, l’accélération est franche et sans temps mort. Mais c’est la sensation de naviguer en silence qui demeure le plus agréable. Seul le chuintement de nos vagues de sillage est perceptible, une sonorité naturelle qui ne semble pas déranger les oiseaux marins. Ces derniers profitent des bancs de sable qui se forment dès l’embouchure pour se reposer. Longer les rives au plus près est possible, sans crainte de s’échouer. Et, lorsque nous sentons que le V de la carène bute dans le sable ou dans la vase, il suffit de rejoindre la partie avant du bateau, ce qui a pour effet de soulager l’arrière. Un coup d’accélérateur et le Scoot-X
retrouve des eaux plus profondes et reprend le fil de sa navigation.
La Laïta est un fleuve côtier relativement étroit et, à marée basse, les bancs de sable la rendent difficile d’accès aux grands tirants d’eau. Sans compter les parcs à huîtres et les bouées de mouillage où quelques bateaux sont encore embossés. Les derniers disparaissent, annonçant la présence d’eaux moins profondes. Les bancs de sable forment des méandres entre mer et campagne. Exception faite de quelques maisons qui s’élèvent sur les côtes, l’endroit est sauvage et plutôt désert.
Une turbidité importante sur la Laïta
Nos seuls compagnons de route sont des canards, des hérons, quelques cormorans et des nuées de limicoles occupés à fouiller la vase. L’abbatiale de Saint-Maurice s’approche, et le niveau de la batterie flirte encore avec les 90 %. Il faut dire que notre vitesse (de l’ordre de 3 ou 4 noeuds) est très économique.
Le pont qui porte le même nom que l’édifice religieux tout proche est en vue, mais il faut nous résoudre à stopper là notre parcours, juste au niveau de son tablier. Le banc de sable semble occuper toute la largeur et les fonds sont trop faibles pour nous autoriser à aller au-delà. De plus, la turbidité de la Laïta est assez importante, ce qui nous empêche de juger de la présence d’eaux plus profondes, d’autant que notre carte manque de détails. Au-delà du pont, nous distinguons le deuxième tiers de la Laïta qui borde une magnifique forêt, ou plutôt deux, situées côté Finistère : le bois de Saint-Maurice et la forêt domaniale de Carnoët, plus au nord. Les deux regorgent d’un patrimoine d’une richesse exceptionnelle, avec ses chapelles, ses tumulus et dolmens, ses étangs, sans oublier le pont du Diable qui