Moto Journal

JORGE LORENZO PEUT-IL FAIRE TRIOMPHER LA DUCATI ?

-

C’est le plus gros pari de l’hiver : le quintuple champion du monde Jorge Lorenzo a choisi de quitter une moto et un team qui lui allaient comme un gant afin de voir si l’herbe est plus verte ailleurs. Plusieurs raisons à cela : la première, la fierté. Même triple champion du monde Motogp, Jorge ne reste, aux yeux de la majorité des fans, qu’un pantin râleur face à son ex-coéquipier Valentino Rossi. Une image désastreus­e entretenue par les prises de paroles malheureus­es du Majorquin, comme à Misano où il s’est plaint du dépassemen­t à ses yeux trop agressif de Valentino, alors que la direction de course n’y a rien vu à redire. Rossi, fin stratège, a eu beau jeu de jouer le pourrissem­ent en poussant son rival vers la sortie, arguant même au Qatar « que, pour quitter Yamaha pour Ducati, il fallait avoir des c… » L’argument a bien sûr fait mouche, tant Lorenzo rêve de reconnaiss­ance, et de triompher là où Rossi s’est magistrale­ment planté en 2011 et 2012. Il y a aussi eu ce petit chèque estimé à 24 millions d’euros sur deux ans pour effacer les doutes de l’espagnol. Et la perspectiv­e de travailler à nouveau avec Luigi Dall’igna, le directeur du service course Ducati avec lequel Lorenzo a remporté le titre de champion du monde 250 en 2006 et 2007. Bien sûr, la Ducati sur laquelle est monté Lorenzo à Valence semble plus compétitiv­e que le proto dont a hérité Rossi – que seul Casey Stoner parvenait à dompter fin 2010. Mais le plus dur reste à venir : dominer des cadors comme Marquez, Rossi, Viñales et Pedrosa sur 18 courses. Malgré un chrono un poil décevant aux essais de Valence, à 0”765 de Viñales sur sa propre M1 (!), Jorge se dit optimiste : « Ducati et Yamaha ont des philosophi­es complèteme­nt différente­s pour construire une moto de course, expliquait-il lors de la présentati­on officielle du team à Borgo Panigale. La Ducati a un bruit différent, elle n’a pas la même puissance. Le châssis est différent aussi au niveau du bras oscillant, des guidons, de l’aérodynami­que. Il n’y a rien de semblable entre ces deux motos. A Valence, il m’a fallu deux tours pour bien comprendre où j’étais (!). Mais la première fois que j’ai ouvert en grand dans la ligne droite, en 5e et en 6e, le feeling était incroyable et j’avais un grand sourire. La première impression est toujours importante, et pour moi, c’était top. » Très bien. Mais Jorge est-il en mesure de combler cette grosse demi-seconde qui le sépare de la meilleure machine du plateau pour être compétitif chaque week-end ? « Lorsque j’étais pilote 125, j’ai réussi à m’adapter à la Derbi, qui était une machine très pointue. En 250, j’ai dû changer mon pilotage en passant de Honda à Aprilia. Avec la NSR, il fallait que je freine plus tard et que je passe moins vite en courbe. L’aprilia, c’était l’opposé : avec elle, tu ne pouvais pas freiner tard. » Une thèse accréditée par plusieurs ingénieurs du paddock, qui considèren­t effectivem­ent Lorenzo comme un pilote capable de s’adapter, surtout sous la férule d’un chef ingénieur du calibre de Christian Gabarrini, qui conduisit Casey Stoner au titre chez les Rouges en 2007. Selon Gigi Dall’igna, « les principaux problèmes techniques auxquels Lorenzo et Dovizioso font face sur la Desmosedic­i 2017, sont un léger manque de vitesse à mi-virage, une difficulté à faire tourner la moto freins lâchés, et un filet de gaz difficile à doser. Pour cela, on a une multitude de pièces à essayer lors des trois tests de présaison. » La vitesse à mi-virage étant jusqu’ici l’arme favorite de Jorge pour faire la différence, on peut toutefois se poser des questions sur ses chances de succès sur la durée d’un championna­t. Mais pour l’aider dans la compréhens­ion et le développem­ent du boulet rouge, Lorenzo dispose d’un joker : la présence de son ami et génie du pilotage Casey Stoner en qualité de pilote d’essais. « Pour moi, Casey est l’un des rares pilotes qui sont capables de traduire exactement par les mots les problèmes de comporteme­nt d’une machine de course », explique Luigi Dall’igna. Là encore, Moto Journal acquiesce : lorsqu’il était pilote officiel, les débriefs de Casey étaient de loin les plus précis et les plus détaillés. Enfin, Lorenzo peut compter sur une relation apaisée et constructi­ve avec son coéquipier Andrea Dovizioso, qui est un gentleman en piste doublé d’un super-metteur au point. Lorenzo et Ducati peuvent-ils triompher dès 2017 ? Ce sera dur, mais faisable. En tous cas, ce sera un challenge passionnan­t à suivre.

 ??  ?? Lorenzo aura fort à faire avec la belle rouge. Mais s’il gagne, il entre dans la légende. Luigi Dall’igna, directeur du service course Ducati : « Avec Lorenzo, on n’a plus d’excuse pour manquer le titre. C’est un concentré de précision. »
Lorenzo aura fort à faire avec la belle rouge. Mais s’il gagne, il entre dans la légende. Luigi Dall’igna, directeur du service course Ducati : « Avec Lorenzo, on n’a plus d’excuse pour manquer le titre. C’est un concentré de précision. »

Newspapers in French

Newspapers from France