Une privatisation qui ne passe pas
Dans notre dernier numéro, nous évoquions l’imminente privatisation des radars embarqués. D’autres confrères ne sont pas en reste, et une association d’automobilistes organise depuis quelques jours une « manifestation virtuelle » pour dire son opposition à la mesure, qui doit officiellement entrer en vigueur le 1er septembre prochain. La montée en puissance des “anti” est tout sauf fortuite, tant ce dossier – que nous qualifions de chaud pour 2017 – est surveillé comme le lait sur le feu depuis qu’en octobre 2015, le Premier ministre d’alors, Manuel Valls, en a posé le principe. Il faut dire qu’il a de quoi sérieusement inquiéter. Sous couvert de sécurité routière, il s’agit purement et simplement de rentabiliser au maximum un système fonctionnant aujourd’hui, du point de vue du gouvernement, au ralenti : un peu plus de soixante minutes quotidiennes contre... huit heures souhaitées. Face aux interrogations et craintes légitimes, mais aussi à l’opposition de certains syndicats policiers, les pouvoirs publics sont restés droits dans leurs bottes. Ministre de l’intérieur et délégué à la sécurité routière ont répété que les sociétés privées ne seront pas rémunérées au nombre d’infractions, mais au temps passé par le radar sur la route selon un trajet bien défini. Ce qui signifie peu ou prou la même chose : plus elles passeront de temps à rouler, plus elles seront rémunérées... mais aussi plus les flashs seront nombreux. Au-delà, c’est le principe même de la privatisation d’une fonction régalienne de l’etat, dans un domaine aussi sensible que la sécurité routière, qui pose problème. Sans même parler des risques de dérives à terme – qu’on a connues avec les fourrières privatisées, par exemple... Les Français, eux, ont déjà choisi leur camp. Alors que l’expérimentation officielle de la privatisation vient de débuter en Normandie, 78 % y sont défavorables, selon un récent sondage.