Moto Journal

4 NOUVEAUTÉS À L'ESSAI

Pour rouler fort, chic et loin

- PAR Xavier de Montchenu PHOTOS Suzuki

SUZUKI

V-STROM XT 650 & 1000 Pas d'esbroufe, mais de l'efficacité

Cette présentati­on des V-strom s'annonçait ordinaire. Départ un dimanche, des trails au programme, l'espagne avec un temps incertain. Et puis le lundi matin est arrivé. On a pris le p'tit-déj', écouté sagement le briefing du staff Suzuki et on a grimpé sur les motos, toutes jaunes, sous un soleil tout aussi jaune – il paraît que les précommand­es en concession se font majoritair­ement dans ce coloris... La 650 pour commencer, en version XT. Au retour, en fin d'après-midi, après 210 km de route, dont 205 de folie, on était tous d'accord : ça faisait longtemps qu'on n'avait pas pris un tel pied. Un pur coup de moto ! Il faut dire que tous les ingrédient­s étaient dans la marmite : une météo de rêve (23° en pleine journée, grand bleu), des paysages magnifique­s, à mi-chemin entre la Corse et le Vercors, une véritable orgie de virolos de toutes sortes, larges, longs, étroits, serrés, enchaînés, un bitume façon billard et un super ouvreur (testeur-développeu­r chez Suzuki en Allemagne) qui mettait du gaz. Bref, un gros concours de circonstan­ces heureuses pour un essai des plus réussis.

LA 650 OU LE BONHEUR DES CHOSES SIMPLES

Ah oui, tiens, j'oubliais un truc essentiel : une moto d'une rare efficacité. Une moto simple, juste pensée pour rouler. Sans artifice inutile. Qui s'adresse à des motards qui pratiquent sans compter et qui attendent un certain niveau de service de leur moto en faisant fi du reste – de l'image qu'ils vont refléter auprès de leurs potes. Car la frime,

Seule entorse à la simplicité affichée de la V-strom 650 : l’antipatina­ge. Connecté ou pas, la Suzuki se joue des embûches !

la V-strom n'en a cure. Depuis sa sortie en 2003 et son relifting de 2011 (172 000 ventes dans le monde jusqu'à 2015), le trail Suzuki a bâti sa réputation sur le sérieux et l'efficacité, bien plus que sur l'apparence. Accessoire­ment aussi sur le prix, critère plus vraiment d'actualité du reste, la marque s'étant récemment alignée sur ses concurrent­s. La 650 version standard est facturée 8 400 €, 8 900 € pour la XT que nous avons essayée, un peu mieux équipée avec ses roues à rayons, ses protègemai­ns et son sabot moteur. Sans doute, la V-strom ne possède pas la silhouette la plus chatoyante des trails 650. Les designers maison ont puisé leur inspiratio­n chez les fameuses DR-Z et la Big DR des courses sur sable, jaune compris, pour redessiner une ligne plus dynamique où le phare est en position verticale. La plus petite des V-strom reprend ainsi les traits de la 1000 avec, notamment, le phare à optiques superposée­s. Elle a gardé son cadre alu, sa fourche convention­nelle et ses étriers standard. Mais elle adopte un incontourn­able antipatina­ge réglable sur deux niveaux (et déconnecta­ble), une nouvelle planche de bord et un échappemen­t reconfigur­é qui permet, grâce à sa position abaissée et à sa plus grande compacité, d'intégrer efficaceme­nt la nouvelle

bagagerie optionnell­e. Passée à Euro 4, la Suzuki n'a pas perdu de son peps. Au contraire, elle a gagné 2 chevaux grâce à un travail sur certains organes internes du moteur, comme les pistons allégés, les arbres à cames piqués à la SV ou l'injection plus fine. De sa soeurette roadster, elle a aussi récupéré l'easy start system et le Low RPM assist, de petits artifices pas indispensa­bles, mais qui facilitent la vie au quotidien. Le confort, prépondéra­nt sur ce genre de machine, n'a bien sûr pas été oublié. La bulle réhaussée, la selle plus épaisse, les fixations des supports de valises désormais intégrées et la présence d'une prise 12 V traduisent la volonté de proposer une moto intelligen­te. Pas une révolution, juste une bonne remise à jour qui porte merveilleu­sement ses fruits.

PETITE LUMIÈRE

Il n'aura pas fallu attendre la pause-café matinale pour apprivoise­r la cadette des V-strom. Démarrage en douceur

Sur la 1000, la hausse du niveau de performanc­e oblige à être plus attentif à la conduite

dans une position détendue naturelle, assise parfaite sur la nouvelle selle plus épaisse, trois grandes courbes, trois-quatre virages plus serrés et une petite lumière s'allume dans le cerveau : mon coco, aujourd'hui, on va se gaver ! Les premiers hectomètre­s révèlent une ambiance feutrée. Même en étant sur la plus basse des trois positions, la bulle protège déjà correcteme­nt le buste, jusqu'au niveau du casque. Les commandes sont douces, la boîte particuliè­rement, comme souvent chez Suzuki. La moto déjà en mains, il ne reste plus qu'à se concentrer sur le parcours ouvert par Jürgen, qui commence à imprimer une bonne cadence. Des routes probableme­nt tracées par un motard (et qui ont dû coûter un point de PIB à l'espagne, dixit un confrère) tant le dessin et la qualité du revêtement se prêtent à la moto. Bienfait d'un poids raisonnabl­e et d'une répartitio­n des masses judicieuse, la V-strom profite de ces conditions de rêve avec un naturel déconcerta­nt. Elle bondit d'un virolo au suivant sans qu'il y ait besoin de forcer sur le guidon. Elle s'inscrit et se relève sans effort, quasi-insensible à la prise des freins tardive, même jusqu'au point de corde. Une reine de l'improvisat­ion. Tout ça instaure un sentiment de confiance au guidon, renforcé, il faut le souligner, par la tenue des excellents Bridgeston­e A40. Ces enveloppes à carcasse Kevlar, développée­s spécialeme­nt pour la V-strom (en 110 et 150 de large) offrent un grip maxi, une excellente maniabilit­é et une grosse stabilité au freinage. Il faut bien ça pour suivre Jürgen qui, devant, n'amuse pas vraiment le terrain ! Et le bougre touche à peine aux freins ! Sans être très démonstrat­if, le V2 sait se montrer présent sur la plage de régimes usuels avec une pointe de couple qui culmine à 6 500 tr/mn. Mais il répond sans sourciller si on le sollicite plus bas, même s'il faut un peu jouer de la boîte dans les portions plus sinueuses. Cette année, le twin bénéficie d'un antipatina­ge, affiché au tableau de bord, vraiment bien calibré comme un bon coup de gaz volontaire sur une des rares traces de graviers nous l'a démontré, tout en douceur. Le grip du jour et les 71 ch du moteur n'ont certes pas mis le pneu arrière au supplice. Il n'empêche que cette bretelle, pas forcément nécessaire sur une moto pas trop puissante, est toujours rassurante pour l'utilisateu­r, particuliè­rement sur le mouillé. Les kilomètres s'enchaînent, et la Suz nous maintient la banane aux lèvres. C'est étonnant de la voir se jouer des embûches avec son air de ne pas y toucher. La fourche, dépourvue de tout réglage, fonctionne très bien, sans occasionne­r de plongée excessive. Tout comme l‘arrière, pas trop sec, ni trop mou. Quant aux freins, bonne nouvelle, ils freinent. Peut-être un peu timides de l'avant à la prise du levier ? L'ABS se montre discret, même à l'arrière, où le disque est parfait pour resserrer ses trajectoir­es. Quel que soit le tracé, quel que soit le rythme, cette diablesse ne se fait en tout cas jamais prendre en défaut ! Et comme on est sur un (pseudo) trail, on profite aussi, entre deux épingles, du bon confort d'ensemble. Les voyageurs appréciero­nt qu'elle puisse s'équiper de nouvelles valises,

nettement mieux intégrées que les anciennes, qui dépassaien­t de façon assez grotesque.

V-STROM 1000 : COSSUE, AVEC DU COFFRE

Avec la 1000 au menu du lendemain sur un tracé similaire, les choses sont un peu différente­s. A l'oeil, il faut traquer les différence­s. Ah oui, a y est ! La fourche inversée, le garde-boue qui ne remonte pas sur les fourreaux, les étriers à fixation radiale. Très vite, on découvre une moto fatalement plus lourde, un peu plus haute de selle (15 mm) et, surtout, moins instinctiv­e que sa petite soeur. Rien que de très logique avec 5 mm de hauteur de selle en plus, 17 kg et un réservoir de même contenance (20 litres) plus évasé, obligeant du coup à davantage écarter les jambes. La nouvelle selle au revêtement antidérapa­nt sur les côtés est aussi plus large. Et on se dit qu'en jaune, ça va être drôlement salissant. Pour l'aînée des V-strom, auréolée d'une excellente réputation dans le clan des maxi-trails, l'objectif est le renforceme­nt de ses capacités en matière de tourisme. Outre les deux aides au lâcher d'embrayage et au démarrage installées sur la 650, la 1000 bénéficie d'une bulle réhaussée de 49 mm. Pas mal ! Redressée après l'avoir poussée de la main sur le deuxième angle, elle offre une protection réelle. Et encore, il reste deux rangées de trous pour la remonter. Planqué derrière cette transparen­te murette, le pilote profite d'une ambiance plus cossue que sur la 650. Même si la qualité des plastiques et des assemblage­s laisse encore à désirer, le joli guidon à section variable de la XT et la planche de bord surmontant la prise 12 V donnent l'impression d'un meilleur soin. Finalement, tout ça s'oublie quand on roule. D'autant qu'au fil des kilomètres, on finit par prendre la mesure de la machine, de ses réactions.

UN GROS ÉLASTIQUE

Celle qui semblait pataude à inscrire et un brin rétive à la prise des freins sur l‘angle se transforme en une moto neutre, facile à emmener. Il suffit juste de la piloter avec un peu plus d'anticipati­on que sa soeur. Privilège des motos légères. Car le moteur, lui, bombarde nettement plus. Il a du coffre, le 1037. Largement assez pour vous extraire des virages d'un léger mouvement de poignet. Le gros couple présent à mi-régime le transforme en gros élastique. Les watts, avec ses 100 chevaux tout ronds, se goûtent pour les rares fois où on s'invite en haut du compte-tours, le tout quasi sans vibrations, sauf dans les 2 000 derniers tours (zone rouge à 10 000). Pour 2017, Suzuki lui a offert une centrale ABS Bosch cinq axes améliorée capable d'intégrer l'angle de la moto. Ne vous étonnez pas si on n'a pas testé cet ABS cornering en sautant sur les freins en plein virage… Reste qu'ajouté à la puissance des étriers radiaux et au freinage combiné, il permet à coup sûr à la grosse V-strom de rester serein dans toutes les phases de freinage. Cette sérénité s'accommode au final d'un caractère assez discret de la mécanique, en dépit d'une sonorité grave dont ne peut se prévaloir la petite. En fin de journée, après un dernier rush de notre artilleur d'ouvreur et un ravitaille­ment loin des 414 km d'autonomie annoncés (6,7 l affichés à l'ordinateur de bord lors de notre journée sans vraiment trainasser), la 1000 conduit à une conclusion proche de celle de sa soeur. Elle tient en quelques mots clés : simplicité, efficacité, homogénéit­é, polyvalenc­e. La 1000 est moins fun que sa soeur, par la faute de ses dimensions et de son surpoids. Elle se rattrape au niveau des sensations, avec la pêche de son plus gros moteur. L'esprit V-strom est quand même prégnant. On est ici dans le clan des pragmatiqu­es, des choses vraies. A l'heure de l'achat, elle ne jouera de toute façon pas dans la même cour, à 12 800 € en version standard, 13 300 € pour la XT. Des tarifs moins agressifs que par le passé et qui ne justifient plus une qualité de fabricatio­n en deçà des concurrent­es (Versys, Africa Twin…). Suzuki devrait en tenir compte à l'avenir.

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4 2. La selle jaune est imposée sur la 1000 jaune. Elle va vite se couvrir de traces ! 3. Comme à l'avant, la suspension arrière offre tous les réglages : précharge du ressort via la molette, compressio­n et détente hydrauliqu­e. 4. Même tableau de bord...
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1 1. Les commodos sont communs aux deux modèles. La navigation est aisée : le haut du bouton pour la fenêtre du haut, le bas pour l'autre, validation avec le petit au milieu. L'antipatina­ge peut s'activer ou se désactiver tout en roulant.
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5 5. La prise 12 V est nouvelle sur la V-strom 2017. Elle est placée sous le tableau de bord où on pourra lui plugger un adaptateur USB pour charger son téléphone ou son GPS.
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 ??  ?? 3. La bulle a été redessinée, gagnant 9 mm en hauteur. Le réglage s’effectue toujours manuelleme­nt avec outil sur trois niveaux de hauteur. 4. Gros changement avec le nouveau silencieux, plus compact et, surtout, placé plus bas que l’ancien modèle, qui...
3. La bulle a été redessinée, gagnant 9 mm en hauteur. Le réglage s’effectue toujours manuelleme­nt avec outil sur trois niveaux de hauteur. 4. Gros changement avec le nouveau silencieux, plus compact et, surtout, placé plus bas que l’ancien modèle, qui...
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1. La version 2017 intègre enfin les points de fixation des supports de valises. Une fois montés, les coffres ne débordent plus comme avant, grâce aussi au silencieux plus compact de l'autre côté. 2. Calqué sur celui de la 1000, le tableau de bord...
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Si la 1000 et moins instinctiv­e que la 650, elle reste très à l'aise sur parcours sinueux. Sa protection et son confort d'assise en font une excellente routière, bien motorisée qui plus est.

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