GRAND PRIX DU QATAR
Zarco impressionne les rois du Motogp
Viñales s'impose en favori
Pardon, monsieur, cette place est réservée », plaisante Johann Zarco en me surprenant dans le resto du hall d’embarquement de Roissy mardi matin, cinq jours avant le GP. Le Français est décontracté et de bonne humeur, ce qui fait plaisir à voir. « On s’est bien entraînés la semaine dernière en Espagne, avec Laurent Fellon [son coach] et son fils Lorenzo, qui a une nouvelle 85 2-temps Yamaha. Cette année, on a décidé de mettre l’accent sur le supermotard, parce que ça coûte moins cher que la R1 et, qu’en fin de compte, c’est plus efficace. Sur des petites pistes de kart avec la 450 Yam, les virages arrivent vite, ce qui te permet de travailler l’agilité sur la moto. Laurent me dit : “C’est important, car quand tu vois comme Viñales est vif sur la M1, c’est de lui qu’il faut s’inspirer, plus encore que de Valentino.” En supermot’, j’ai changé mon style, je roule genou par terre avec mes bottes de vitesse, et non plus pied sorti en bottes de cross. Ces dernières étaient trop rigides. Du coup, j’ai gagné en vitesse de passage. Je suis content car, après avoir stagné pendant un moment, j’ai gagné neuf dixièmes de seconde au tour. Je suis passé de 49”1 à 48”2, soit un dixième de seconde de moins que Marquez qui s’entraîne là aussi. Maintenant, il faut que j’arrive à tenir la cadence pendant 40 minutes à fond, car il se fait des vraies simulations de course. Marc n’était pas présent ce jour-là, mais Jorge Lorenzo oui, et roulait en 49”1, jusqu’à ce que son team le panneaute en 48”3. Ça m’a un peu étonné qu’il descende son chrono d’un coup. J’ai même cru à un coup d’intox qui m’était destiné. Mais Laurent dit que c’est possible. Quoi qu’il en soit, tu vois qu’un mec cinq fois champion du monde est capable de changer son style quand il veut. Car, à un moment, il roulait en vrac comme Marquez. C’est peut-être là qu’il a fait son chrono. »
SATANÉ VIRAGE N° 2
Intéressant, ce retour en grâce du supermotard. De quoi donner envie à notre quintuple champion du monde Thomas Chareyre de s’essayer au Motogp… Pourtant, en conférence de presse pré-gp mercredi, quand MJ demande à Rossi, Marquez et Lorenzo si eux aussi s’entraînent de cette façon, les trois disent que c’est rare. S’ils éludent la question, il y a de grandes chances qu’il y ait effectivement quelque chose à gagner avec ce type d’entraînement. Malgré tout, je me dis que ce n’est que du supermotard et qu’avec une motogp entre les pattes, pour Johann, ce sera une autre chanson. Faux : quatre jours plus tard, le double champion du monde prend tout le monde de court pour nous offrir une véritable démonstration. Dimanche soir, 22 h 50, derrière le stand du team Tech 3. Les gouttes de pluie qui rebondissent sur le toit métallique nous rappellent qu’on a vraiment eu du bol de pouvoir assister au GP. Johann surgit de la porte de derrière douché de frais et en civil, sa casquette Monster sur la tête. « J’ai fait le maximum pour rester tête nue, mais là, il n’y a plus le choix ! », plaisantait-il la veille. Autour de lui, la dizaine de journalistes venus des quatre coins du monde a presque l’air plus attristé que lui. « C’est vraiment pas de chance », lance Adam Wheeler (On-track Off-road). « Non, ça c’est sûr, réplique Johann en anglais pour que tout le monde le comprenne. Je m’élançais de la quatrième place. On a eu un peu de mal à prendre le départ du fait des conditions assez étranges. Mais j’ai vu [lors des tours de chauffe] que la piste était praticable et je me sentais prêt pour la course. Etant en deuxième ligne, j’ai voulu saisir l’opportunité d’imprimer un rythme rapide comme les top-pilotes. J’ai pris un bon départ, fait un bon freinage en vue du premier virage. J’ai pu voir que j’étais à l’aise par rapport à eux. Je suis heureux d’avoir pu les doubler, prendre la tête et tenter de m’échapper. Le feeling était bon, je ne voulais pas attaquer plus, mais ça montrait que je n’étais pas loin de la limite, car il a suffi que je sois un tout petit peu trop large au virage n° 2 pour chuter. C’est dommage, bien sûr, il y avait moyen de faire podium, voire plus. Mais que cette première course se soit déroulée comme ça, c’est bon pour mon mental, c’est bon pour ma confiance. J’ai pu voir comment mes adversaires contrôlaient la course de manière intelligente. C’est une bonne leçon. J’ai besoin d’apprendre cette nouvelle catégorie, il y a des détails que je dois assimiler. Je n’ai pas fini cette course, mais je peux dire que j’y arriverai prochainement. »
ZARCO, CE SONT LES AUTRES QUI EN PARLENT LE MIEUX
Après avoir parlé à Johann, on pénètre dans le box Tech 3 pour savoir ce que pense son chef ingénieur Guy Coulon : « Je pense que sa cadence était convenable. Il a élargi un petit peu à l’entrée du 2. Il y a des bosses assez glissantes. Il a perdu l’avant dessus parce qu’il n’est pas passé exactement au même endroit. Il ne s’est pas emballé : au contraire, à ce moment de la course, il commençait même à se relaxer. Il trouvait qu’il était dans un rythme
« Que cette première course se soit déroulée comme ça, c'est bon pour mon mental » Johann Zarco
où il ne fatiguait pas, où il contrôlait bien la situation. Le positif, c’est que sur cette course-là, on avait le rythme. Les circonstances étaient un peu particulières, parce que le départ était compliqué, le niveau de grip incertain… Mais on avait le rythme. Les top-pilotes ont plus d’expérience, clairement. Ils ont quand même essayé de gagner, donc je ne pense pas qu’ils étaient sur la réserve. Avec la cadence que tenait Johann, il était dans le top-5 sans problème. » Vient ensuite l’heure de la conférence de presse d’après course des trois vainqueurs. La pluie a cessé et derrière