Honda 1000 Africa Twin Adventure Sports
Nom et coloris calqués sur la XRV 650 de 1988, électronique plus évoluée, réservoir plus gros, débattements et garde au sol augmentés, bulle haute, poignées chauffantes… Et si c'était elle, la vraie Africa Twin ?
Trente ans, ça se fête. Et quand on s'appelle Africa Twin, qu'on est (re)née en 2016, on n'a pas tellement le choix que d'en profiter pour rendre hommage à sa mythique matrice de 1988, la XRV 650. Comment faire ? Un coloris spécifique ? Un peu léger. Et puis la déco HRC, que l'on connaît depuis la renaissance de l'africa, il y a un peu plus de deux ans, s'en approche déjà pas mal. Et pourquoi pas une vraie version spéciale, encore plus baroudeuse ? Ça, c'est une bonne idée ! Coup de bol, c'est aussi celle qui a germé dans les petites têtes des disciples de Soichiro. Et elle ne date pas d'hier, puisque, au salon d'osaka 2016, Honda avait déjà présenté l'africa Twin Adventure Sports Concept. De concept, elle n'avait que le nom et ne laissait donc aucun doute quant à son arrivée dans la gamme. Deux ans plus tard, voici sous nos yeux la nouvelle Africa Twin Adventure Sports en hommage à la version éponyme de 1988.
24 LITRES, C'EST PAS BIDON
Qui dit nouvelle déclinaison dit aussi nouvelles caractéristiques. D'abord, un coloris spécifique. OK, on vient de dire que c'était un peu léger pour un hommage, mais, en même temps, il lui fallait bien une déco spéciale, à cette Adventure Sports… Et un peu de mauvaise foi n'a jamais tué personne. Disons-le tout de suite, parée de cette sublime robe, la nouvelle Africa en jette sévèrement ! Un surplus de baroud qui tient autant à ses peintures “dakariennes” qu'à ses nouvelles mensurations. Car Honda a joué le jeu jusqu'au bout et doté son Adventure Sports d'un nouveau réservoir de 24,2 litres, contre 18,8 sur la version standard. Forcément, sa largeur a considérablement augmenté et l'autonomie avec. Si les 525 km évoqués par le constructeur semblent un peu optimistes, on peut imaginer dépasser les 400 km sans problème. Mais revenons aux mensurations. Cette nouvelle Africa Twin est aussi plus haute. Ses débattements de suspensions ont été rehaussés de 20 mm devant et 22 mm derrière, atteignant respectivement 252 et 240 mm. La selle de la belle nippone oscille désormais entre 900 et 920 mm selon que vous la positionnez sur le cran du bas ou du haut. C'est d'ailleurs
là que le bât blesse. Déjà peu accessible en version standard, l'adventure Sports, dont le perchoir est au final plus haut de 5 cm, l'est encore moins. Pour être sûr de poser les deux pieds par terre, il faudra en passer par la liste des options afin d'opter pour la selle creusée. Ou mesurer 1,90 m, à vous de voir. Reste qu'une fois à bord, on se sent immédiatement bien. D'abord, parce que l'assise a gagné en moelleux, ensuite parce que le guidon a été réhaussé de 3 cm et avancé de 6 mm vers le pilote et, enfin, parce que les repose-pieds sont plus larges
Facile et douce, l'africa Twin Adventure Sports donne simplement envie de rouler
qu'avant. Ainsi posé sur la nippone, je savoure donc les premiers kilomètres de la journée. La douceur et la progressivité des commandes font mouche et me rappellent le savoir-faire de Honda en la matière. Une bonne tranche d'autoroute : rien de tel pour jauger la protection offerte par une monture. Sur ce point, l'adventure Sports peut compter sur une bulle haute de série et son réservoir élargi. Le résultat est plus que satisfaisant. Le bas des jambes reste légèrement exposé, mais il en va souvent ainsi sur les trails. Outre les bonnes dispositions de l'africa pour abattre du kilomètre, ce premier tronçon d'autoroute met aussi en lumière quelques lacunes. D'abord, l'absence de régulateur de vitesse. Que Honda n'ait pas voulu le greffer sur la précédente version équipée d'un accélérateur à câble, passe encore, mais là, avec l'arrivée du ride by wire… Bref. Autre grief au sujet du tableau de bord, basculé de quelques degrés vers l'avant pour en améliorer la lecture. C'est raté, car si l'affichage, entièrement repensé, semble plus contrasté qu'avant, les informations sont finalement moins lisibles. Certes, il y en a plus (voir plus bas), mais les éléments principaux tels que le régime moteur et le rapport engagé sautent moins aux yeux que sur l'ancienne instrumentation. Dommage.
EN MODE TRAIL
Le seul avantage de l'autoroute à moto, c'est que ça laisse vraiment le temps de cogiter et de relativiser. Passé le petit agacement contracté contre nos amis nippons au sujet du cruise control et de ce nouveau tableau de bord, j'enclenche le mode trail de mon cerveau et commence donc à savourer les premiers virolos aux alentours de Grenade. Avec ce constat : l'adventure Sports n'est pas moins facile à emmener que la version standard. Elle aurait pu, elle qui totalise 11 kg de plus que sa petite soeur (253 contre 242). Sur les changements d'angle comme sur les transferts de masse d'avant en arrière, l'africa XXL demeure aussi naturelle. La roue avant de 21 pouces grève toujours un peu sa vivacité, mais sa finesse (90) reste un atout question précision. Bien sûr, ça plonge gaiement sur les freinages appuyés, et ça s'écrase tout aussi
Machine du quotidien, l'africa Twin saura aussi vous emmener à l'autre bout du monde. C'est vous qui voyez...
joyeusement sur l'arrière lors des grosses accélérations. C'est ça, le fameux mode trail ! Pour vous aider à l'assimiler, vous pouvez compter sur une hydraulique très bien gérée. Le train avant renvoie toujours la bonne dose d'informations, même en phase de compression. Au diapason de cet amortissement de grande qualité, le freinage est à la fois puissant et dosable, même à l'arrière, si important pour asseoir la grande Africa sur les prises de freins musclées. Si je peux aussi bien me concentrer sur les informations que me renvoie la moto, c'est aussi que je n'ai pas à m'occuper de la boîte de vitesses. Cette fameuse DCT, pour laquelle 46 % des acheteurs craquent en France, ne cesse d'étonner. Un peu moins développée sur les NC, Integra et X-ADV, elle prend tout son sens sur l'africa Twin Adventure Sports. Encore peaufinée pour 2018, cette transmission à double embrayage n'a pas d'égale question vitesse et douceur de passage des rapports. Accouplée au nouvel accélérateur électronique, qui offre une parfaite connexion poignéeroue, elle est un outil précieux. L'ensemble nécessite toutefois une petite mise au point pour montrer tout son potentiel. Si douée soit-elle, l'africa Twin ne peut rien faire contre le temps qui passe et la technologie qui progresse. La carte du zéro électronique qu'arborait fièrement Honda lors de la renaissance du mythe en 2016 s'est soudainement transformée en joker magique. Toujours cette foutue mauvaise foi… Attention, n'allez pas croire que la japonaise s'est mutée en Ducati Multistrada, mais, avec l'arrivée de ce fameux ride by wire, elle offre maintenant trois modes de conduite : Urban, Tour ou Gravel pour le tout-terrain. Au coeur de chaque mode, la cartographie moteur, le niveau du frein moteur ainsi que l'antipatinage, désormais réglable sur sept niveaux, sont prédéfinis. Un quatrième mode, baptisé User, vous permet enfin de tout calibrer selon votre volonté.
PLAISIR INCHANGÉ
De l'autre côté, la boîte DCT propose toujours un mode Drive et trois modes Sport. Comme avant, le mode Drive ne jure que par les bas régimes pour
abaisser la consommation et c'est sur les modes Sport 1 ou 2 que la DCT est la plus agréable. S'adaptant à votre style de conduite, elle irait presque lire dans vos pensées ! Puissance moteur sur 1 (sur 3), frein moteur sur 2 (sur 3) et antipatinage réglé sur 2, et l'africa est prête à épater la galerie. C'est fou, ce que l'on peut faire avec cet engin à grands débattements qui se tortille dans tous les sens ! Elle n'aura jamais la rigueur et l'efficacité d'une BMW R 1200 GS, mais elle est assurément plus fun à mener et vous colle rapidement une banane qui ne cesse de grandir avec les kilomètres. Rentrer fort sur les freins, faire légèrement glisser l'arrière à la remise des gaz, tout devient possible, sans forcément déconnecter les aides. Plus le revêtement se dégrade, plus elle vous donne le sentiment de survoler la route sur un aéroglisseur gommant toutes les imperfections de l'asphalte. Sur ce point, elle n'a aucune concurrence. Cerise sur le gâteau : le coup de gaz au rétrogradage lorsque vous prenez la gâchette – du DCT. D'autant plus jouissif que l'échappement a été retravaillé et que la sonorité du bicylindre est bien plus présente qu'avant. Ça pétarade plus, c'est plus métallique, bref, c'est top. A noter qu'un shifter up&down (option) a fait son apparition sur la boîte mécanique, et s'avère des plus agréables à utiliser. Côté caractère moteur, le plaisir reste inchangé. A bas régime en ville comme en haut du compte-tours pour arsouiller, ce bicylindre est un modèle de disponibilité. Plein partout, il crache toujours ses 99 Nm à 6 000 tr/mn, et en donne déjà une bonne louche entre 3 000 et 4 000. Docile et rond aux alentours de 2 000 tr/mn, exempt de toute vibration parasite sur autoroute à 4 500 tr/mn et presque un peu énervé passé 6 000 tr/mn, ce 998 cm3 accepte tous les usages, sans jamais surprendre son pilote. C'est peut-être ce que lui reprocheront certains, mais, comme toujours chez Honda, c'est l'homogénéité qui a primé. Et pour un trail, dont le maître-mot reste la polyvalence, c'est d'une logique implacable.