UNE VIRÉE EN AOC…
En partant de Paris direction la Champagne puis la Bourgogne, on a - plus ou moins involontairement - croisé pas mal d’appellations d’origine, les fameuses AOC et autres AOP. N’allez pas en déduire que cet essai n’était qu’un prétexte à picoler (le midi, on ne boit que de l’eau, Ndr), mais il faut bien admettre que territoires viticoles et routes à moto sont rarement éloignés. On a commencé sagement par le cidre du pays d’othe dans l’aube, puis le champagne sur la côte des Bar, sans oublier le Coteau-champenois et le rosé des Riceys (les Riceys, dans l’aube, est la seule commune de France à proposer trois appellations sur un même terroir). Ensuite, direction la Bourgogne côté Yonne, avec le Tonnerrois, l’auxerrois et bien sûr les superbes blancs minéraux de Chablis. Nous n’avons pas oublié Irancy, tant pour ces fameux vins rouges (Pinot noir, César) que pour sa petite route qui monte, toute en courbes, au milieu des vignes jusqu’au belvédère. Une route bordée de vibreurs, empruntée par la course de côte locale et par la descente en caisses en savon. Tout un programme ! Irancy s’est d’ailleurs auto-proclamée “premier village motard de France” avec plus de 120 motos répertoriées pour 287 habitants ! MJ y a ses habitudes chez Thierry Richoux, vigneron de talent converti au bio et, forcément motard. Thiebs, pilote à la cave
évasif. Le standard de finition est aussi plus élevé, mais une Ducati reste une Ducati. Cette petite Monster réclame de s'approprier le mode d'emploi avant d'en tirer la quintessence. Même si c'est l'une des motos les plus sages de la gamme italienne, les gènes de la marque sont bien là. Par rapport aux trois roadsters japonais, on la pilote plus qu'on ne conduit, avec un châssis rigide et des réactions plus vives. Toutefois, elle déçoit un peu par son moteur… Comparé aux autres, le vieux bloc Desmodue 803 cm3 refroidi par air s'avère bien creux à bas régime. Il est plutôt souple pour un twin Ducati (il est dérivé du moteur du Scrambler 800), mais il faut aller le chatouiller dans les tours pour en extraire le meilleur. Il n'y a rien ou presque sous 6 000 tr/mn, et aller au-delà de 8 000 tr/mn n'apporte plus grand-chose. Puis, d'origine, cette Monster tire excessivement long… A 90 comme à 130 km/h sur le dernier rapport, son régime moteur est inférieur à celui des japonaises et, sur les routes de notre essai, on s'est plus souvent retrouvé en 4e qu'en 6e pour coller au peloton. Cela se ressent aussi sur la conso, c'est en effet la plus gourmande. Le petit monstre rouge se fait bousculer en reprises, se fait torpiller en accel' par la Suzuki SV 650, qui partage pourtant la même architecture moteur en V. Alors oui, Il y a le plaisir du bel objet lorsqu'on roule au guidon de cette Monster 797, mais celui de la conduite est insuffisant, même si elle est correctement suspendue. La boîte reste dure, les petits chocs assez peu filtrés malgré une selle confortable, quelques vibrations subsistent, quelques lacunes d'équipement aussi… Mais heureusement, dès que la portion de route idéale se profile, on oublie tout dans un “Broaaâââaaap !” jouissif, quoiqu'assez discret.
ASSUMER SON CHOIX
Opter pour un roadster, c'est assumer son choix. Celui des sensations plus que de la protection, celui d'une esthétique affirmée plutôt qu'un confort princier. Même avec un petit saute-vent optionnel et un sac
sanglé tant bien que mal à l'arrière, vous n'en ferez jamais une bonne GT. Pourtant, rien n'empêche de rouler autrement qu'à sauts de puces entre deux terrasses de café ou à ne destiner ces roadsters qu'aux trajets boulot/ dodo. Avec des consommations assez raisonnables - autour de 5 l/100 km, sauf pour la Ducati, un peu au-dessus -, on envisage des étapes de 250 km avant que les témoins de carburant ne clignotent. Paris-marseille en moins de quatre pleins, ça se fait tranquillement par les petites routes, celles où le pompiste a encore le crayon derrière l'oreille, celles où le café en terrasse a meilleur goût que devant un distributeur d'autoroute, celles où les p'tits restaus à 12,50 € le menu existent encore, celles où les radars se font plus rares. Ces routes, qu'on a emprunté toujours avec la banane aux lèvres. Tout ça pour à peine 7 000 €. Alors, elle est pas belle, la vie ?