BMW R 1250 RT
L’une des dernières survivantes de la catégorie GT, bientôt seule sur le marché dans les moins de 300 kg, pète la forme. Commercialement avec d’excellents résultats, techniquement avec une dernière évolution qui s’enrichit de nouveaux équipements high-tec
Depuis un long bail, 25 ans pour être précis, la RT évolue dans un fauteuil. Un confortable fauteuil. Dans le sillage de la GS qui s’accapare tous les honneurs et les succès, l’emblématique GT de BMW, qui partage la même base moteur-châssis, trace sa route sans sourciller depuis qu’elle est apparue en 1995 armée du Telelever et du Boxer. 7e vente de BMW dans le monde avec 7267 unités écoulées en 2020, 3e vente de la marque en France, les chiffres ne mentent pas. Surtout quand on parle d’une moto dont le panier moyen dépasse allègrement les 20 000 € au jeu des options. C’est l’une des toutes meilleures GT depuis un quart de siècle, et la course par élimination dans sa catégorie renforce aujourd’hui son statut de référence quasi sans contestation. Il reste en lice une FJR 1300 dont les mois sont comptés, une Goldwing beaucoup plus imposante et une K 1600 flamboyante avec son 6 en ligne, mais excessive pour beaucoup. Cette situation risque fort de rester en l’état. La version 2021 du vaisseau bavarois revient encore plus forte, bichonnée comme jamais par les ingénieurs. Ceux qui, parmi vous, fustigent les motos modernes bardées de technologie, fermez les yeux, vous n’allez pas aimer ! Mais alors pas du tout ! Car évidemment, sachant que le châssis ne change pas ni le Boxer 1250 Shiftcam hormis son homologation Euro 5 sans le moindre déchet, c’est bien la partie électronique qui évolue notoirement. Elle touche plusieurs secteurs, le confort, la sécurité et, comme on en a pris l’habitude, des aides à la conduite avec le fameux radar niché dans le nez de la BMW. « Nous avons donné à la R 1250 RT un nouveau look, une dotation de série enrichie et de nombreuses améliorations techniques pour obtenir une toute nouvelle expérience de pilotage. » Un discours certes corporate de la part du chef de projet Harald Spagl, qui résume cependant objectivement l’évolution de la RT 1250. Et ça commence en observant le museau redessiné de la RT où s’intègre le tout nouvel éclairage adaptatif à Leds. Petite précision : il est de série, tout comme les suspensions pilotées, l’appel d’urgence, L’ABS Full Integral Pro et le contrôle de motricité. Nous ne l’avons pas essayé mais le bloc optique central qui pivote sur deux axes pilotés par la centrale inertielle six axes (aïe, je vous l’avais dit !) va éclairer l’intérieur des virages à mesure que la moto penche et/ou qu’elle change d’assiette, en phase de freinage, par exemple. Entourant les quatre projecteurs, les nouveaux feux diurnes, bien visibles dans les rétros, donnent à la face de la RT un regard plus incisif, façon yeux de chat. Juste au-dessus, le carénage révèle de nouveaux déflecteurs latéraux de taille généreuse. En plein mois de mars,
La nouvelle RT con centre tout le savoir-faire de BMW dans le domaine du high-tech.
quelque part dans les Cévennes, leur efficacité ne fait aucun doute. C’est tout juste si l’on sent un léger courant d’air effleurer l’extérieur des épaules.
LES DOSSIERS DE L’ÉCRAN
Sur la version que j’ai récupérée, une Elegance Finition Pro, les 4 packs sont réunis (BMW concède une remise de 350 € quand on prend la totale). Poignées chauffantes réglées sur 3, selle sur 2, j’oublie les conditions humides et fraîches pour admirer ce coin aride des Causses et jeter un oeil à la nouvelle dalle de 10,25 pouces. Mazette, c’est l’équivalent de l’écran du dernier X1, le SUV de la marque ! La taille XXL de ce TFT particulièrement bien organisé permet le double affichage, infos de la moto et de voyage sur deux tiers, la carte de la navigation sur le dernier. Ou vice versa, au choix. Pour en profiter, et c’est la limite du système, il faut obligatoirement passer par l’appli
BMW Motorrad Connected (gratuite) depuis son téléphone qui permet de concocter ses trajets à l’avance et de disposer de bien d’autres possibilités. Mais qui n’offre pas les fonctionnalités d’une appli communautaire type Waze. Pas de recopie d’écran possible, donc. Et pour être tout à fait à l’aise, la logique des options vous pousse gentiment à prendre le pack audio (550 €) qui inclut, dans un compartiment, un port USB et la recharge par induction de votre téléphone. BMW précise qu’il s’agit de maintenir le téléphone en charge pendant la navigation et non d’un pur chargeur (1000 ma, soit 5W de puissance charge).
ERGONOMIE IMPECCABLE
Confortablement installé aux commandes de cette grande routière à l’allure altière, je profite du Boxer, époustouflant de souplesse, bien secondé par un shifter qui enquille les vitesses comme on enfile des perles. Le gros couple de 143 Nm un peu au-dessus de 6000 tours et l’allonge du bloc à distribution variable rendent le voyage des plus agréables. C’est fluide, sans vibrations, c’est réactif avec des cartographies bien calibrées où le mode Dynamic est en option et le mode Eco, nouveau, parfait pour rouler pendant la digestion. Dans le confort que procure la RT sur le ruban de bitume qui défile sous les Pilot Road 5, on ne voit pas les kilomètres défiler. Il m’aura quand même fallu une paire d’heures pour me sentir tout à fait à l’aise avec l’ergonomie des commandes. Même si les boutons sont assez nombreux au poste de pilotage, il faut reconnaître une forme de logique dans leur utilisation. Un bouton, une fonction, le contrôleur rotatif, le bouton de menu général, on s’y retrouve finalement bien. Pour faciliter encore plus la vie du pilote, la RT 2021 s’est équipée sur le flanc gauche de quatre boutons raccourcis dirigeant directement vers la radio, le chauffage, l’audio et la navigation. Pratique ! Dès les premiers ronds-points et les virages à vitesse peu élevée, la RT montre des mouvements de pompage. Bizarre de la part d’une moto qui s’est toujours révélée extrêmement rigoureuse… sauf lors de notre dernier comparo GT avec la première 1250, où notre RT manifestait déjà ce type de réaction. Petite vérification des réglages hydrauliques dans le menu Assist, sachant que le mode pilotage (éco, pluie, route de série) agit sur les réglages de suspension. Côté suspensions, entre road et dynamic, il faut opter pour le second afin d’obtenir un peu plus de frein hydraulique, sinon ça reste vraiment souple. Malgré tout, je ne retrouve pas la grosse sérénité de la BMW que j’avais goûtée lors d’un bon trip dans le Cantal avec la dernière 1200. Changements de réglages hydrauliques en usine ? Peut-être. Deux confrères ont éprouvé ce même ressenti. Un troisième pas du tout. Les pneus, des Michelin Pilot Road 5 au comportement alerte et sans fausses notes, étaient en tout cas à la bonne pression. Toujours est-il que cette moto, bardée d’électronique, encore plus au jeu de nombreuses options, est capable de contrôler tous les paramètres, mais en vous mâchant le travail. Ainsi le réglage de la précontrainte, automatique suivant la charge embarquée, seul, à deux ou chargé. Certains regretteront peut-être le réglage manuel pour relever l’assiette de la moto, par exemple en durcissant le ressort. En revanche, des bretelles comme le freinage Full integral Pro qui sollicite les deux freins simultanément et L’ABS en fonction de l’inclinaison en virage, l’aide au démarrage en côte dernière génération (en option) ou le DTC qui surveille en continu le patinage de la roue arrière peuvent être aussi transparents à la conduite qu’ils sont salvateurs en cas de situation chaude.
RÉGULATEUR… OU PAS ?
L’autre grosse nouveauté de la RT, c’est le régulateur de vitesse adaptatif. Pour connaître ce système en voiture, difficile d’affirmer que ça manquait à la moto. Si ce genre de gadget n’aide pas à la vigilance au guidon et peut même s’avérer dérangeant quand la moto freine seule alors qu’il n’y a pas lieu de toucher aux freins, pour autant, le système de la RT, qui fonctionne de 30 à 160 km/h, s’avère très au point. Il suffit de régler la distance avec le véhicule qui précède depuis un bouton au guidon parmi trois choix et de se laisser guider. Le DDC est même assez intelligent pour solliciter le freinage quand le frein moteur ne suffit pas et aussi faire ralentir la moto en virage quand il estime que vous avez trop d’angle. J’imagine la mine déconfite de nos lecteurs les plus conservateurs qui appellent au retour à la simplicité avec à la clé des motos que l’on conduit avec sa main droite et son cerveau, au feeling, et qui ne coûtent pas le prix d’une belle bagnole. Parce que côté tarif, la RT semble jouer sur sa position dominante. À 22 490 €, ça commence à représenter une somme rondelette, même si l’équipement de série progresse, notamment avec les suspensions pilotées, les feux de virages et L’ABS dernière génération. Mais BMW sait faire en sorte de rendre ses options ou packs indispensables (4 en tout avec un rabais de 350 € si on les prend tous) pour donner la pleine mesure des qualités routières de son vaisseau.