MATCH ROADSTERS 900
Kawasaki Z900, Suzuki GSX-S 750, Yamaha MT-09
Animée par un moteur des plus sensationnels, la précédente Yamaha MT-09 marquait le pas face à la concurrence faute d’une partie-cycle rigoureuse. Alors, avant de s’attaquer aux nouvelles Monster, Tuono 660 et Duke 890, la nouvelle MT-09 se mesure à ses compatriotes pour un premier combat qui n’a rien d’un échauffement.
Dark side of Japan (le côté obscur du Japon), c’est la formule qui accompagne la présentation des membres de la gamme MT chez Yamaha. Adulée par son moteur extra, la MT-09 de la précédente génération souffrait d’une partie-cycle pas vraiment convaincante, surtout sur revêtement dégradé. Mais il ne fallait pas trop énerver les ingénieurs Yamaha. La nouvelle MT-09 revient en force en évoluant des jantes au guidon. De quoi aiguiser ses armes pour combattre la rude et nombreuse concurrence des roadsters de moyenne cylindrée. Depuis notre premier roulage au guidon de la MT-09 en février dernier, qui était des plus positifs, il nous tardait de la confronter à la concurrence. Et c’est sur ce premier match 100 % japonais que la Yamaha MT-09 doit montrer ce qu’elle a dans les carters. Esthétique, finition, moteur, partie-cycle et équipement, on va tout comparer pour qu’il n’en reste qu’une, laquelle affrontera le reste de la troupe européenne lors d’un prochain combat (à huis clos) programmé en juin prochain. Face aux Suzuki GSX-S 750 et Kawasaki Z 900, deux concurrentes de poids qui font partie des meilleures ventes de roadsters de moyenne cylindrée en 2020, la MT-09 a tout prévu pour se défendre. À commencer par une esthétique peu conventionnelle qui se démarque du reste de la troupe. Sans tomber dans le jugement des goûts et des couleurs, la MT-09 bénéficie d’un look très moderne. Peut-être un peu trop d’ailleurs, avec sa mini-optique unique haut perchée et son profil de gazelle prête à bondir. Un look affirmé mais assurément clivant et qui ne peut laisser de marbre. La Kawasaki Z 900 est du même acabit avec des lignes taillées à la serpe pour un look général un peu plus équilibré. Même si cela est subjectif, la Suzuki GSX-S 750 fait plus sage. Âgée de 4 ans déjà, sa ligne est encore dans l’air du temps mais il y a quelques détails qui dénotent par rapport à la production actuelle. Elle ne possède pas de feux à leds, les clignotants sont imposants et le tableau de bord s’affiche très classiquement en monochrome. En revanche, elle affiche une finition sans reproches, que ce soit au niveau des plastiques ou des différentes pièces disgracieuses judicieusement planquées. Car si on peut tergiverser au niveau du look de nos trois motos, les avis se rejoignent pour dire que la MT-09 trahit de vraies lacunes au niveau de la finition, avec en premier lieu un klaxon très visible comme les fils qui courent le long de la fourche, ou même le régulateur de tension apparent sur le flanc droit. Dommage, car la qualité et l’assemblage des plastiques ne souffrent pas la critique.
EXPLOSIF
Toujours animée par ce redoutable 3-cylindres, la MT-09 a gagné en cylindrée sans perdre une once de son caractère. Ses 42 cm3 supplémentaires sont davantage là pour permettre de passer les nouvelles normes que pour gagner en performances. En témoigne la puissance annoncée à seulement 4 ch supplémentaires. On retrouve son côté racleur en bas avec une souplesse digne de celle offerte par un 4-cylindres. Les montées en régime sont ultravives et rageuses pour catapulter la MT-09 à chaque sortie de virage avec force, et surtout avec la banane sous le casque. Même s’il ne déborde pas de puissance, le moteur avec ses 119 ch annoncés est largement suffisant pour prendre son pied sur route. Ce bloc possède deux visages. On peut évoluer gentiment en profitant de son couple généreux en montant les rapports aux alentours des 5000 tr/ mn. Ou passer du côté obscur, tirer les
rapports jusqu’à le faire hurler jusqu’à la zone rouge pour claquer la vitesse supérieure et s’offrir des sensations démoniaques. On ressent alors un ultime coup de pied au cul lorsque le bargraphe du compte-tours franchit le cap des 7000 tr/mn, tout en profitant d’une excellente allonge, et la sonorité typique qui s’échappe de dessous de la moto finit de vous hérisser les poils sur les avant-bras. Vraiment sensationnel, ce moteur! D’autant que la boîte de vitesses retravaillée en profondeur permet des passages de rapport éclair grâce au shifter de série qui fonctionne à la montée comme à la descente. Douce et onctueuse, on n’avait jamais vu une boîte aussi agréable à utiliser sur une Yamaha. On retrouve des performances moteur similaires au guidon de la Z 900. Animée par un bloc de 125 ch associé à une transmission assez courte, la Z impressionne par ses relances. Vif dès les bas régimes, le moteur Kawa se régale à prendre des tours sans jamais faiblir en offrant de belles performances, avec certes un poil plus d’inertie que le 3-pattes de la Yamaha. On peut vraiment descendre bas dans les tours pour profiter de son côté élastique et reprendre sans jamais manquer de ressources.
On retrouve cette souplesse au guidon de la GSX-S 750, au bloc de même architecture. À la différence que celui la Suzuki cube seulement 750. C’est donc le moteur le plus faible des trois en cylindrée et cela se ressent lorsqu’on évolue dans le bas du compte-tours avec des relances moins pêchues. Il faut davantage jouer de la boîte pour évoluer sur le bon rapport en sortie de virage et ne pas hésiter à tutoyer les hauts régimes pour en tirer sa quintessence. Car dès qu’on commence à titiller la poignée droite, ce bloc se transforme en petite teigne. Il prend des tours à n’en plus finir dans une sonorité de moto de piste, ce qui ne surprend pas trop quand on sait que sa base est empruntée à feue la GSX-R 750. Avec un tel tempérament, aucun problème pour suivre la meute enragée. D’autant plus que son châssis fait partie des plus affûtés de la troupe.
TROIS PHILOSOPHIES
Passer d’une moto à l’autre permet de percevoir la nette différence de philosophie entre les protagonistes. La Yamaha est fidèle à sa position de conduite assez droite. Le guidon est placé assez haut et le buste est mécaniquement assez droit. Les jambes sont dépliées (on peut régler sur deux positions la hauteur des repose-pieds) et la position de conduite plutôt détendue est confortable. À l’inverse, la
GSX-S ne cache pas ses gènes de sportive avec un guidon assez étroit positionné plus bas qui impose une position de conduite plus inclinée vers l’avant, sans toutefois être radicale. C’est d’ailleurs elle qui est la plus confortable avec une selle assez moelleuse et épaisse associée à des suspensions qui filtrent bien les aspérités de la route. Même si elles ne sont pas réglables, leur tarage est des plus équilibrés apportant de la rigueur et du confort. C’est plus raide au guidon de la Z 900, qui possède une position de conduite assez détendue, à mi-chemin entre celle de la MT et celle de la GSX-S. Toutefois, au chapitre confort, la selle dure et les suspensions assez raides la placent un cran en dessous sur ce point. Dès le démarrage, la Z 900 rassure par une certaine facilité de conduite malgré un gabarit imposant. Elle se guide naturellement sans forcer sur le guidon. Le moteur coupleux permet de rester sur le même rapport sans tricoter du sélecteur. En revanche, dès que le rythme augmente, la Z 900 a du mal à cacher ses 210 kg. Elle a tendance à s’écarter de la trajectoire si on rentre vite en courbe et son agilité pèche dans les enchaînements de petits virolos. À l’inverse, la MT-09 virevolte de virage en virage quel que soit le rythme. Sa finesse, associée à une position de conduite droite et à une agilité hors pair, permet de placer la Yamaha où l’on veut sans forcer. Il suffit de poser le regard à l’intérieur d’un virage pour qu’elle s’y engouffre. La MT-09 a fait d’énormes progrès au niveau du châssis en gagnant en stabilité et en rigueur sur bitume dégradé. Fini l’effet pompe à vélo de l’ancienne. Même si l’évolution est notable, elle reste malgré tout un peu moins stable que la GSX-S 750, la plus efficace du lot à l’attaque. Son train avant est précis, stable avec un excellent retour d’information. On peut entrer vite en virage en traçant de belles trajectoires et en toute confiance, rassuré par la stabilité. Même en cas de bitume dégradé, les suspensions encaissent et sa position de conduite plus basculée invite naturellement à charger le train avant et à déhancher. On manque un poil de feeling au niveau du train avant sur la MT-09 lorsqu’on va chercher la limite, sûrement à cause du guidon placé un peu haut (qui empêche de charger l’avant). Alors, un peu moins efficace la Yamaha? Sans aucun doute. Mais la MT-09 se démarque par son
côté joueur unique. La partie-cycle ludique s’associe parfaitement au moteur plein de vie et à son poids contenu (20 kg de moins par rapport aux deux autres). Il n’est pas rare de sortir en roue arrière d’un virage serré en profitant de la patate du moteur et de la compacité de son châssis. Un côté ludique et débridé qu’on ne retrouve pas sur ses rivales, plus sages en comportement. Un autre point fort de la MT-09 réside dans sa motricité hors pair, rarement prise en défaut même par ces températures assez basses. On peut souder en sortie de courbes sans (trop) réfléchir. Au pire, l’électronique prend le relais de façon transparente. De plus, c’est un détail qui a son importance, le feeling du frein arrière est excellent, contrairement au reste de la troupe. À l’inverse, la Z 900 manque de motricité dès qu’on accélère fort en sortie de virage. Le pneu semble avoir de la difficulté à passer le couple et la puissance au sol avec un contrôle de motricité qui intervient rapidement. Difficile de savoir si c’est à cause de la monte pneumatique d’origine ou des suspensions. En revanche, une fois posée sur l’angle, à l’image de la GSX-S 750, la Z 900 offre une plus grande stabilité que la Yamaha.
COUP DE MASSUE
Au chapitre de l’équipement, la MT-09 assène un coup de grâce à la concurrence tout en étant proposée quasiment au même tarif. La fourche est entièrement réglable (uniquement précharge sur la Suzuki, la détente en plus sur la Kawasaki), le maîtrecylindre est à montage radial tout comme les étriers de freins (montage simple sur la Kawasaki), les reposepieds sont réglables en hauteur, le phare a recours aux leds, comme les clignotants. Le tableau de bord, certes un peu petit, s’affiche en couleur et permet de paramétrer toutes les aides au pilotage. On peut ajuster différentes cartographies moteur, le contrôle de motricité, l’anti-wheeling, le contrôle de glisse ou L’ABS, le tout géré par une centrale inertielle à 6 axes, comme sur les sportives haut de gamme. Et ce plutôt facilement via les boutons placés sur les commodos. Certains affirmeront que ça ne sert à rien, mais ces aides au pilotage peuvent malgré tout être utiles au pilote qui enroule gentiment et qui se fait surprendre par une perte d’adhérence. Ou aider le pilote chevronné qui veut gagner en performance. À côté, la GSX-S 750 fait le strict minimum avec un contrôle de motricité ajustable et un ABS. Pas d’éclairage à leds ni de tableau de bord en couleur ni de suspensions réglables, la Suzuki est une moto simple, mais pas moins efficace comme on l’a vu plus haut. Restylée l’année dernière, la Z 900 avance désormais un regard agressif au travers un éclairage à leds