Moto Journal

Les secrets du hole-shot device

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C’est la trouvaille technique de ces derniers mois: le hole-shot device, cet artifice permettant d’effectuer des départs canons en abaissant l’avant et l’arrière de la machine. Comment ça marche ? Quel est le gain de ce système ? Moto Journal en a parlé au Mans avec Nicolas Goyon, le chef-mécanicien d’iker Lecuona chez Tech3.

Que ce soit à l’intérieur des garages, entre deux camions ou en conférence de presse, c’est l’un des sujets qui occupe la plupart des discussion­s de ce début de saison. Le hole-shot device, ce système qui permet d’abaisser à la fois l’avant et l’arrière de la machine au moment du départ, ne cesse en effet de faire parler de lui. Et plus la saison avance, plus le débat s’intensifie. Si certains sont favorables à la présence d’un tel système en catégorie reine, d’autres, à l’inverse, n’en voient pas l’intérêt. C’est notamment le cas de Marc Marquez. Dès son retour de blessure, au Portugal, l’octuple champion du monde s’était ouvertemen­t interrogé sur l’utilité de cet artifice. « Oui, je vais l’utiliser, comme tout le monde, mais sincèremen­t, je ne suis pas vraiment convaincu, disait-il à Portimao. Pour moi, cela n’a pas vraiment de sens. Il n’y a encore pas si longtemps, rien de tout cela n’existait et le spectacle était pourtant le même à la télévision... » Mais, concrèteme­nt, en quoi consiste ce système et comment fonctionne-t-il ? Bien entendu, aucune usine ne donne une explicatio­n détaillée sur le sujet, et encore moins une fiche technique. Cependant, certains axes commencent tout doucement à se dégager. L’abaissemen­t de la partie avant est ainsi sans doute la plus simple à comprendre, puisque c’est quelque chose qui est déjà répandu en motocross depuis des années. « En fait, nous bloquons la fourche, développe Nicolas Goyon, figure de Tech3 et chef-mécanicien d’iker Lecuona cette année. C’est pour ça que nous voyons chaque pilote mettre de gros coups de frein avant de se placer au niveau de son emplacemen­t sur la grille. Le but est en effet d’enfoncer la suspension pour la bloquer. »

L’utilité ? Limiter la phase de cabrage. L’abaissemen­t de la partie arrière, lui, reste un petit peu plus secret. Goyon donne quelques indication­s : « Nous avons un système de suspension où nous avons la possibilit­é d’agir sur un des paramètres afin d’abaisser l’arrière, par l’intermédia­ire d’un levier au guidon. » Dans le paddock, certains bruits font cependant état que cet abaissemen­t de la moto à l’arrière, pour certaines machines, ne serait pas seulement dû à une manipulati­on du pilote et que d’autres paramètres, notamment électroniq­ues, entreraien­t en ligne de compte. Bien évidemment, tout cela reste pour le moment invérifiab­le, et suscite inévitable­ment la curiosité des nombreux cerveaux présents sur les circuits. Mais si certains mystères demeurent aujourd’hui sur la manière dont le système est concrèteme­nt mis en place à l’arrière, son intérêt, lui, est limpide. Goyon explique : « Un des paramètres limitant d’un départ en Motogp, c’est le cabrage. Quand on passe de 0 à 200 km/h, on passe forcément par une phase où on est obligé de maîtriser la puissance pour éviter ce phénomène. Une des manières de repousser cette limite, c’est de diminuer ce qu’on appelle le taux de transfert, une variable donnée par la hauteur du centre de gravité sur l’empattemen­t de la moto. Il faut donc jouer sur ces variables pour repousser cette limite de wheelie. En Motogp, c’est ce que nous faisons en abaissant le centre de gravité. » Du coup, pour mettre en place l’ensemble de ces paramètres, les tâches des pilotes se multiplien­t. « C’est une véritable Playstatio­n, confirme Goyon. Il y a des boutons dans tous les sens. Il y a un paquet de manettes avec lesquelles il faut jouer sur la plupart des motos qui ont ce système avant-arrière. Et du coup, comme on repousse la limite de wheelie, ça nous permet d’augmenter la puissance de manière significat­ive ». Les chiffres sont en effet là pour en témoigner. Avant que le hole-shot device apparaisse, le départ arrêté de 0 à 200 km/h était effectué environ en 2”7, alors qu’aujourd’hui on atteint les 2”3. Ce qui est tout simplement énorme ! Passer sous la barre des deux secondes risque cependant de s’avérer particuliè­rement difficile dans l’immédiat, hormis si une nouvelle trouvaille venait à sortir du chapeau des ingénieurs.

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