Moto Revue Classic

LES JAPONAISES OUBLIÉES

Soichiro Honda et Masashi Ito étaient proches et partageaie­nt la même (belle) vision de la moto. L’un est devenu le plus grand constructe­ur du monde, l’autre a fait deux fois faillite. À quoi tient le succès ?

- Texte : Didier Ganneau – Photos : DG et Bonhams

Lilac, Marusho, les créations de Masashi Ito étaient comparable­s aux meilleures Honda. Sauf que...

Né en 1913, Masashi Ito a sept ans de moins que Soichiro Honda. Il a d’ailleurs démarré dans sa première entreprise (ART) au début des années trente avant de créer son propre atelier de tôlerie en 1946. En 1948, l’année même où Honda fonde la Honda Motor Company, il fabrique des carrosseri­es pour les camions Nissan et Toyota, mais le succès immédiat de son aîné (avec la Dream D de 1949) l’incite à passer à son tour à la production de motos. La LB 150 culbutée qu’il lance en 1951 est assez convention­nelle et ressemble fort à une 200 Zündapp d’avant-guerre. Appliquant le savoirfair­e de Masashi Ito, elle possède toutefois un cadre en tôle emboutie, et déjà la transmissi­on par arbre qui sera la marque de fabrique de toutes les Lilac. Le véritable décollage est pour 1953. La TW 350 Dragon est elle aussi dérivée d’une Zündapp, en l’occurrence le beau et récent prototype B 250 : cette fois, Ito est vraiment raccord avec les allemandes les plus évoluées du moment. La TW ne sera pas un grand succès commercial (73 exemplaire­s en tout), mais le petit scooter 90 Baby lancé en même temps rencontrer­a un plus large public (853 unités). Lilac produit plus de 6 000 machines en 1953, quand Honda en fabrique près de 30 000. Cela le situe au sixième rang des marques japonaises, derrière Honda, Fuji Rabbit, Mitsubishi Silver Pigeon, Tohatsu et Pointer, mais déjà devant les « anciens », Cabton ou Meguro.

En 56, la production frôle les 10 000 unités

En 1955, l’usine Lilac emploie plus de 600 personnes, et ses machines, comme la nouvelle SY 250 calquée sur une BMW R25, sont très soignées. La marque s’engage en compétitio­n, avec succès : au mont Asama – l’épreuve phare de la saison nationale qui se déroule pour la première fois –, non seulement une modeste Baby à boîte deux vitesses parvient à finir première « quatre-temps » en 125 devant deux Honda et derrière quatre toutes nouvelles Yamaha et trois Suzuki, mais une version coursifiée de la SY l’emporte en 250 aux mains du tout jeune Fumio Ito, futur officiel Yamaha. La production frôle les 10 000 unités en 1956, mais la concurrenc­e est devenue rude : Honda, Rabbit, Pigeon et Tohatsu mènent encore la danse, Suzuki a beaucoup progressé, Meguro et Pointer sont toujours pressants, Yamaha et Showa sont en pleine croissance, et Yamaguchi comme Toyomotor écoulent beaucoup de petites cylindrées économique­s. Pourtant, Lilac garde son cap : de la noblesse avant toute chose, comme en témoignent les 125 CF 28 et 250 LS 18 qui sortent en 1959. Ce sont des copies de Victoria Bergmeiste­r, des machines splendides mais trop chères car trop sophistiqu­ées (démarreur, etc.). La production pour 1959 s’établit à 11 241 machines, une progressio­n régulière mais sans commune mesure avec l’explosion du marché local, qui a pratiqueme­nt triplé entre 1953 et 1959. Masashi Ito comprend alors qu’il est trop petit, et condamné lui aussi au volume. Mitsubishi vient justement d’élaborer

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