L’HISTOIRE DE LA HONDA RCB
LÉON, CHEMARIN ET LA HONDA RCB De 1976 à 1980, les motards français vibrent au rythme des exploits de Christian Léon, Jean-claude Chemarin et leur monture, la Honda RCB. Vive L’endurance !
En 1976, huit ans après son retrait des GP, Honda revient. En endurance d’abord, avec une RCB 1000.
Fin 1967, après avoir raflé les titres dans toutes les catégories solo de vitesse (50, 125, 250, 350, 500) et poussé par la Fédération internationale de motocyclisme (FIM) qui décide de limiter le nombre de cylindres et celui des vitesses, Honda décide de se retirer des championnats du monde. C’est par le biais du championnat d’europe d’endurance que le premier constructeur mondial revient aux affaires en 1976. Il faut dire que Honda et les courses d’endurance, c’est une longue histoire d’amour qui débuta avec la victoire de la CB 750 de Michel Rougerie et Daniel Urdich à l’occasion du Bol d’or 1969. Jusqu’au milieu des 70’s, l’usine confie diverses machines officielles à la filiale française mais celle-ci ne parvient pas à rééditer son exploit, dépassée par les cousines Japauto ou par le redoutable tandem Godier-genoud chevauchant des Kawasaki très affûtées. L’endurance était encore une discipline où les amateurs pouvaient tirer leur épingle du jeu.
L’endurance, une spécialité française
Fin 1975, tout change, Honda annonce son retour officiel à la compétition pour la saison 1976 après huit ans d’interruption ! Ce retour se fait sous la houlette de Michihiko Aika (ancien patron de l’équipe de Grands Prix) avec le Français Jean-louis Guillou comme responsable du Honda Endurance Racing Team (HERT). Pour l’occasion, une nouvelle machine est créée, la RCB (pour Racing CB) d’une cylindrée de 947 cm3. Le bas moteur est vaguement dérivé de celui de la CB 750… mais il n’a en fin de compte plus grand-chose à voir. Le haut moteur est aussi 100 % RSC (le service course Honda, ancêtre du HRC) et adopte une distribution par double arbre à cames en tête et quatre soupapes par cylindre. Une technologie
HONDA ET L’ENDURANCE, UNE LONGUE HISTOIRE
D’AMOUR DÉBUTÉE AU BOL D’OR EN 1969
largement maîtrisée par le numéro un mondial depuis la glorieuse épopée des Grands Prix des années 60. L’offensive Honda a été montée en peu de temps. Bardés d’appareils photos, quelques envoyés très spéciaux assistèrent attentivement à plusieurs épreuves d’endurance dans le courant de la saison 1975, afin de préparer la saison 1976. L’accident fatal du pilote essayeur japonais Morio Sumiya au cours d’une séance d’entraînement au Mans constituera un gros coup dur dans le développement du plan. Mais déjà, un premier prototype avait été comparé à une Japauto et le feu vert avait été donné au centre de recherches techniques d’asaka, près de Tokyo. Il fallait aussi trouver les pilotes car pas moins de quatre RCB étaient engagées dans le championnat. Trois équipages français furent créés, Léon-chemarin, RuizHuguet, Rigal-guili pour les Français et Woods-williams pour les Anglais. Si l’endurance est une spécialité française, il ne faut pas négliger l’importance des Britanniques. C’est à Zandvoort, aux Pays-bas pour une
APRÈS 8 ANS D’ABSENCE, HONDA REVIENT À LA COMPÉTITION EN 1976
épreuve hors championnat, que la RCB se mesure pour la première fois à la concurrence. Et qu’elle s’impose pour la première fois. Puis, tout le monde prend la route de la Toscane pour les 1 000 km du Mugello. Si le duo Rigal-guili tombe en panne d’essence, WoodsWilliams chute et Ruiz-huguet casse le moteur, l’équipage vedette l’emporte sans coup férir. Pour la première course de 24 heures dans le parc de Montjuich à Barcelone, c’est le tandem anglais qui vole la vedette (et la victoire) aux Français. L’honneur est sauf avec une deuxième place pour Léon-chemarin et une quatrième pour Ruiz-huguet. À Spa, toujours sur 24 heures, les Français reprennent leur bien et même plus puisque si Léon et Chemarin
l’emportent, Huguet et Rouge terminent à la deuxième place. Chemarin enfonce le clou à l’occasion du Bol d’or mais sans son fidèle coéquipier qui s’est blessé. Peu importe, les deux hommes remportent le titre européen avant la dernière épreuve, les 400 Miles de Thruxton. Et contre toute attente, c’est Ruiz et Huguet qui gagnent en terre anglaise. C’est le carton plein pour la RCB qui s’est imposée sur tous les circuits, en battant au passage tous les records de distance.
Carton plein pour la RCB
Pourtant, Honda ne s’endort pas sur ses lauriers et en 1977, arrive une nouvelle version qui voit sa cylindrée monter à 997 cm3 et son poids descendre de 15 kg ! La moto est donnée pour 125 chevaux à 9 000 tr/min (avec un couple de 10 mkg à 8 000 tr/min) pour un poids de 172 kg à sec. Et puis le radiateur d’huile est positionné sous les deux optiques, ce qui lui donne une gueule inimitable. À Misano (qui remplace le Mugello en dernière minute), seulement deux motos sont engagées : une pour les champions en titre et une pour les Anglais WoodsWilliams. Au final, c’est la Japauto de Green-maingret qui l’emporte. Direction
l’allemagne pour les 8 Heures du Nürburgring où Léon abandonne sur chute alors que la victoire lui était promise. Cette fois-ci, Honda France a confié une deuxième machine à Huguet-luc. La RCB n° 2 prend le relais mais tombe en panne d’essence… Du coup, c’est l’ équipage WoodsWilliams qui s’impose et prend la tête du championnat. Ça sent le règlement de compte entre l’écurie France et le team british ! À Barcelone, c’est la vengeance avec trois RCB françaises aux trois premières places. À Spa, ce sont les deux premières places qui reviennent aux Français. Sauf que dans les deux cas, Léon et Chemarin se contentent de la deuxième marche du podium. Leur soif de victoire sera étanchée lors de la plus belle des épreuves qui se déroule pour la dernière fois au Mans, le Bol d’or. Et là, les deux compères ne font pas de détails en collant 13 tours au deuxième malgré une chute dans la nuit ! Une troisième place en Angleterre leur permet d’empocher un troisième titre consécutif, là encore, malgré une chute de Léon.
1978 : 6 épreuves, 6 victoires
En 1978, la RCB évolue plus profondément avec un nouveau bas moteur qui préfigure celui de la CB 900 F. L’embrayage devient à sec et l’alternateur passe en bout de vilebrequin (à la place de la magnéto derrière les cylindres). Elle dispose d’environ 130 chevaux pour 168 kg et reste évidemment la reine de l’endurance avec son équipage vedette, Léon-chemarin. Au terme du championnat disputé sur six épreuves, la Honda s’impose six fois, dont cinq avec l’équipage franco-français. Pourtant, le premier constructeur mondial maintient la pression, sentant peut-être venir la menace de Kawasaki et de Suzuki. En 1979, la moto est de nouveau améliorée avec un gabarit encore réduit et un gain de chevaux et de couple (137 chevaux à 10 000 tr/min et 11 mkg à 8 500 tr/min), le poids, en revanche, reste inchangé.
AU BOL, LÉON ET CHEMARIN COLLENT 13 TOURS AU DEUXIÈME MALGRÉ UNE CHUTE DANS LA NUIT
Le scénario reste toutefois le même, Léon et Chemarin l’emportent trois fois sur six (24 Heures du Mans, 8 Heures du Nürburgring, 24 Heures de Barcelone), et empochent un quatrième titre consécutif. Pour faire bonne mesure, ils gagnent le Bol d’or disputé hors championnat malgré l’opposition des très véloces Yamaha TZ 750 de Sonauto. Mais il était écrit que la RCB ne serait jamais championne du monde. En effet, en 1980, la FIM instaure (enfin) un championnat du monde d’endurance mais édicte un nouveau règlement. Dorénavant, les moteurs doivent être dérivés de la série, comme dans le championnat TT F1, cher aux Britanniques. Finies les RCB, la nouvelle RS 1000 est dotée d’une évolution du moteur de la CB 900 F Bol d’or commercialisée l’année précédente. Si cette nouvelle moto prend le titre mondial, c’est cette fois avec l’équipage de jeunes loups, Marc Fontan-hervé Moineau, recrutés par Honda France. Les vieux renards sont fatigués : Chemarin finit 8e et Léon 12e seulement. Puis ce dernier se tue au Japon en testant les nouvelles Suzuki et Jean-claude quitte la firme qui a fait sa gloire pour rejoindre Kawasaki et empocher son unique titre de champion du monde en 1982.