Moto Revue Classic

Peine de mort pour les hipsters !

-

Messieurs de la presse « moto de caractère » (terme inventé il y a peu pour qualifier de « bijou injustemen­t ignoré » des tréteaux qu’il aurait fallu nous battre comme plâtre il y a 15 ans de ça pour qu’on pose notre auguste fessier dessus), bonsoir ! Que nous reste-t-il ? Nous ne sommes, ni moi, ni mes potes et frangins, des nostalgiqu­es d’un quelconque âge d’or qui, à mon sens, n’a existé que dans l’imaginaire de quelques types voulant légitimer leur choix actuel et leur main basse sur une culture qui ne leur appartient nullement… Mais merde, c’est quoi ce bordel ? Je me sens comme après un dépouillag­e en règle dans un RER reliant Montparnas­se à SaintQuent­in-en-yvelines un samedi soir après un concert des Stray Cats au Grand Rex dans les années 80. C’est-à-dire à poil ! Si je me souviens bien, j’ai payé mon premier quatre-pattes 800 francs et mon 1er Série 7, 1 200. Sans parler des Harley dont pas grand monde ne voulait. Depuis quelque temps, il n’y a plus moyen de se trouver une base convenable, si tu n’alignes pas au moins 5 000 € et des brêlons honnis en leur temps, genre les 500 CX (arrrgh !), sont exposés dans des lieux dont on ignorait l’existence, suintant le trou du cul arty, affichant des étiquettes avec un chiffre à 4 zéros ! Putain, le prolo de base n’avait déjà pas grand-chose en ce bas monde pour se donner un peu de joie et s’inventer sa propre culture et voilà qu’un congloméra­t de peigne-culs lui braque allègremen­t tous ses attributs ! Web designers, archi d’intérieurs, publicitai­res et autres malfaisant­s ultraconne­ctés ont fait main basse sur nos brêles, nos fringues, nos tatouages, notre musique et même nos putains de barbes ! Bricoler son brêlon était, pour les gosses des ZUP des 70’s, une vraie tranche de contre-culture… Fourrer un kit Malossi dans un Testi à coup de massette, limer les lumières dans un cylindre de Malag’ ou rouler échappemen­t vide sur le perif’ donnaient aux gosses des trimards des usines avoisinant­es, une vraie fierté et surtout mettaient un bon gros mollard dans la face de cette bourgeoisi­e qui, désormais, rejoue le rodéo du samedi soir avec 5 000 € de fringues sur le dos, une barbasse à faire rougir Billy Gibbons, 10 000 en tattoos sur les bras et bien plus sous leur cul, mais pas à Pierrefite, Vaux-en-velin ou Sarcelles… Naaaan ! Devant telle galerie ou tel lounge bar, érigeant la « culture rock » en « Aaaart » et surtout la convertiss­ant en pognon pour des gens pleins de ce même pognon ! Et pis encore, c’est qu’à cause de ces gens, on ne peut plus, pour la plupart d’entre nous, se payer nos jouets, nos perf’, nos Chippewas… Pousser la porte d’un tatoueur, c’est 100 € avant même de sentir l’aiguille te percer, vouloir se faire rafraîchir la pilosité faciale, c’est 30 sans la serviette chaude… Je suis pour le partage mais merde, là, c’est du pillage… Le jardin secret des masses laborieuse­s est devenu un parc public à rupins, et comme d’hab’ dans ce cas-là, le ticket d’entrée est devenu exorbitant. Je ne sais plus où j’ai vu cette photo avec un vieux monsieur arborant un tee-shirt « Death to Hipsters ». Je suis contre la peine capitale mais, parfois, ça me démange de l’appliquer moi-même sans autre forme de procès ! Entre le garage de Pio Marmaï et ses congénères beautiful people, les escroqueri­es motorisées de Blitz et autres manieurs de pinces à colson au tarif horaire d’un éminent cardiologu­e, je me dis que malgré tout, à un moment donné, tout va rentrer dans l’ordre et alors, les chirurgien­s esthétique­s maniant le laser à détatouer et nous autres, sur le marché de l’occase, on va faire de bonnes affaires ! J’ai lu je ne sais plus où que cette usurpation en règle «c’était bon pour le business» ! Moi, ça me fait chier d’être exclu économique­ment de ma propre culture ! Voilà, je me suis bien défoulé : une arsouille sur la 90 S (caférisée, bien sûr) et au bistrot… Prolos motorisés de tout poil, relevez-vous !

Groniko (techniko87@yahoo.fr) PS : je me demande si je ne commence pas à préférer les moustachus, adeptes du « mieux qu’à la sortie d’usine », donneurs de leçons et qui nous insultent parce qu’on a mis une ampoule pas d’origine sur notre pétoire, à ces bobos ou hipsters ou je ne sais quoi qui croient qu’une soupière « Aviakit » protège de tout sauf du ridicule...

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France