PENDINE SAND RACER
Une déclinaison de la Brough Superior SS 100, la Pendine Sand Racer, prouve l’ardeur de la marque franco-britannique. Toujours attentive à son passé, elle le décline sous des formes contemporaines avec, cependant, des éléments techniques raffinés.
Dernière déclinaison de la nouvelle SS 100, la Pendine Sand Racer en jette.
La fameuse marque anglaise Brough Superior vit en ranimant habilement son passé. Si elle a ressuscité il y a trois ans, grâce à l’anglais Mark Upham, propriétaire du nom Brough Superior, c’est en France que les motos ont été conçues, puis fabriquées désormais dans les locaux toulousains de Thierry Henriette (Boxer Design). Après la première SS 100, essayée dans MR Classic n° 90, les Pendine R et S viennent maintenant commémorer les grandes heures de Brough, dans les années 1920. Aujourd’hui, nous sommes à Pendine, une longue plage de onze kilomètres, sur les côtes du Pays de Galles, le long de la baie de Carmarthen, entre Laugharne Sands à l’est et le village de Pendine à l’ouest. C’est à présent un paisible lieu de villégiature offert aux rêveries romantiques ou frêles châteaux innocents. Ce même sable vibrait il y a une centaine d’années du vrombissement rauque des balbutiements de la mécanique. La plage de Pendine accueillit dès 1922 les tentatives de records de vitesse de moto, puis d’auto, à une époque où les circuits fermés ou anneaux de vitesse bitumés n’existaient pas. Seules ces immenses langues de sable semblaient appropriées à cet exercice alors très en vogue. Les motos atteignaient là-bas 160 km/h, 180, puis au-delà de 200 km/h… En auto, la célèbre Blue Bird de Malcolm Campbell signa l’un des premiers records en 1927, à plus de 240 km/h. George Brough adorait cet endroit. Il engagea rapidement ses machines en compétition, d’abord motorisées par des moteurs Matchless puis JAP (il y eut quelques autres motoristes dans des cadres Brough). Prouver à la face du monde que ses motos étaient capables d’être parmi les plus rapides lui était essentiel.
La Pendine reprend l’essentiel de la SS 100
Le rendez-vous de Pendine s’avérait alors incontournable, puisque c’est là que se déroulait le Welsh TT, nom donné à ces épreuves de vitesse sur sable. Ses motos s’y imposèrent à quatre reprises. George aimait l’endroit, tant pour la compétition que pour son cadre paisible et poétique une fois les moteurs coupés. À partir de 1928, il nomma ses modèles de course Pendine (il confia également le nom de la plage galloise à sa propre maison…), dont le nom de code était SS 101. Elles étaient basées sur le moteur 1 000 cm3
JAP des SS 100, soigneusement préparé, avec des partie-cycles elles aussi améliorées. George lui-même les pilotait, ainsi que d’autres pilotes. Il obtint quelques records de vitesse sur le circuit anglais de Brooklands ou sur la ligne droite française d’arpajon (célèbre dans les années 20 pour ses courses de vitesse), et bien sûr à Pendine. Mais c’était le pilote C.F. Edwards qui y glana les meilleurs résultats au guidon d’une Brough. La nouvelle Pendine Sand Racer de la marque ressuscitée commémore donc ces exploits, presque cent ans plus tard. Brough fêtera en effet son centenaire l’année prochaine et présentera au Salon de Milan, en novembre 2018, une nouveauté qui marquera cet anniversaire. Peut-être une Alpine Grand Sport, poursuivant ainsi le devoir de mémoire… La Pendine reprend l’essentiel de la SS 100, dont le coeur, le bicylindre en V 1 000 cm3 ouvert à 88°, développé il y a maintenant sept ans en collaboration avec le motoriste français Akira, et le squelette, un magnifique cadre en titane de seulement 8 kilos. Et toujours cette suspension avant de type Fior.
La S pour Sport et la D pour Desert
La nouveauté se trouve toutefois à l’arrière, avec un superbe bras oscillant, en aluminium taillé dans la masse, ajouré en son centre. Il actionne un nouvel amortisseur, réglable, qui offre un débattement supérieur à la SS 100, spirit of TT oblige. Le guidon offre une position plus droite, et les jantes sont de 19 pouces à l’avant et de 17 pour l’arrière. Autre belle pièce, le double échappement relevé, sur le côté gauche de la moto, qui achève de rendre hommage aux mythiques courses sur sable évoquées précédemment. Le freinage, enfin, se distingue de la SS 100, et s’il reste de marque Beringer, il ne fait plus appel au système 4D (deux petits doubles disques de part et d’autre de la jante), mais utilise des disques classiques de 320 mm pincés par des étriers à fixation radiale. Détail esthétique : la coque arrière s’est affinée et le phare a vu son diamètre réduit. Le Pendine se décline en deux versions, la S pour Sport et la D pour Desert… La première voit son phare encadré par un petit sautevent en plexiglas de facture discutable, mais dispose d’une finition d’échappement plus jolie, avec des silencieux terminés
en biseau. On la reconnaît à sa couleur classique noir et or. La seconde est dépourvue de protection, son phare est surmonté d’une petite grille et ses silencieux d’échappement sont sobrement ronds. Elle dispose de jantes à doubles branches particulières et d’une peinture plus tape-à-l’oeil, argentée et bronze. Aucune de ces deux versions n’est bien sûr réellement adaptée au tout-terrain, il s’agit d’un hommage, les pneus de type routier le prouvent… Et le prix dissuade de prendre le risque de rayer ce joli plumage : 59 930 euros pour l’une ou l’autre des deux versions. Il faut noter qu’elle sera disponible au mois de septembre, avec le freinage ABS, norme Euro 4 oblige… Outre le nouveau modèle prévu pour l’an prochain, Albert Castaigne, directeur général de la marque, reconnaît travailler avec son équipe sur deux autres futures machines. Est-ce à dire que Brough Superior version XXIE siècle se porte bien ? Impossible de le savoir, les chiffres de ventes sont à peine évoqués (environ 300 motos, dont beaucoup de pré-commandes de la première version de la SS 100, la MK1, mais pas de chiffres sur la MK2), les points de vente en France restent rares (cinq concessions) mais cela sied à une marque de prestige. Il faut pourtant espérer qu’elle puisse se développer, tant pour l’équipe française que pour le plaisir de croiser l’une de ses motos, voire d’en essayer une. Le moteur bénéficie de toutes les qualités qu’un twin peut offrir : force de caractère, sensations, puissance (100 chevaux, avec une possibilité de disposer de 130 chevaux pour la piste…) et une étonnante vivacité. Peu de twins sont aussi modernes que celui qui chante les louanges de modèles inspirés de motos quasi centenaires. ❖
AUCUNE DE CES DEUX VERSIONS N’EST RÉELLEMENT ADAPTÉE AU TOUT-TERRAIN