Moto Revue Classic

LA COURSE

Exit les anglaises et les allemandes, quelques rares italiennes résistent encore, les japonaises de la fin des années 80 ont pris l’ascendant sur le Bol d’or Classic. L’occasion de rajeunir les équipages et d’engager les discussion­s entre les génération­s.

- Texte : Zef Enault – Photos : Alexandre Krassovsky

Une simple balade le jeudi dans le paddock du Bol d’or Classic suffisait à se rendre de compte d’une mutation amorcée voici deux ans. Elle s’est confirmée cette année : les Post-classic ont largement pris le dessus. Parmi les équipages qualifiés pour la course à l’issue des essais du vendredi, on en comptait vingt en Classic, pour soixante-deux partants. En 2015, la proportion était de vingt-neuf motos en Pré-classic et Classic pour dix-huit en Post-classic. Pour rappel, les Classic sont des motos produites avant 1983, quand les Post-classic sont comprises entre 1984 et 1991. Ce raz-de-marée de « modernes » (elles ont tout de même vingt-sept ans pour les plus récentes) a également rajeuni la population de pilotes. Il n’est plus rare de voir des moins de trente ans venir se frotter aux anciennes gloires de l’endurance ou aux amateurs aguerris de la moto classique.

On se serait cru au départ d’une course de SBK en 1990

Cette bigarrure réjouit, puisque c’est ainsi que se transmet la culture moto, l’expérience, et c’est savoureux d’entendre les aînés ressortir les anecdotes d’une autre époque. De voir les yeux des plus jeunes s’écarquille­r d’apprendre que jusqu’en 1982, les courses de 24 heures se couraient à seulement deux pilotes. Et les autres de sourire sournoisem­ent puis d’en remettre une couche : « Attends, il y a mieux ! Avant 1954, les pilotes couraient seuls le Bol d’or, l’unique épreuve de 24 heures ! » Et de rire grassement. On se gausse du poids « enclumesqu­e » des motos des années 70, des paddocks de l’époque, conviviaux mais pareils à des places de marché avec des vieux bahuts dans tous les sens… Les jeunes s’endorment ensuite réconforté­s à l’idée que le lendemain, ils prendront la piste au guidon de leur Suzuki GSX-R ou

Kawasaki ZXR 750 avec des slicks neufs couvés sous des couverture­s chauffante­s, des suspension­s et des freins modernes… Dès la première séance d’essais qualif’, les records ont été pulvérisés. Grâce à quelques légères modificati­ons du tracé du circuit Paul-ricard – dont la majeure concerne le virage à gauche qui suit le Beausset, nommé virage de Bendor. Tout le monde estime le gain de temps à au moins deux secondes. Le meilleur chrono l’année dernière était de 2’09’’7, Grégory Fastré, pilote belge du Mondial d’endurance et engagé au Bol d’or Classic avec le team Force, a fait claquer un 2’09’’1, suivi le lendemain d’un 2’07’’5 (à deux secondes du temps du dernier qualifié au Bol d’or, sur une Kawa ZX-10R !). Grégory et son coéquipier Bruno Le Bihan revêtent dès lors les habits de favoris. Le premier ne tarit pas d’éloges à propos de sa Suzuki GSX 1100 n° 56. « Cette moto est géniale, tout le monde roulerait vite à son guidon ! Elle est engagée en 1100 cm3 mais en réalité, c’est un bas moteur de 750 cm3 avec des cylindres réalésés en 900 cm3, pour conserver de la performanc­e mais gagner en maniabilit­é. Le vilebrequi­n, plus léger que le 1100, emmène moins la moto vers l’extérieur à la réaccaléra­tion. » Le team belge Force domine depuis quelques années les courses d’endurance de motos anciennes avec sa Suzuki. Son moteur, enserré dans un cadre Harris revu par l’équipe, est préparé par Alstare, l’ancien team du championna­t du monde Superbike. Derrière la n° 56, on retrouve un autre team belge, Dholda Racing, qui fait courir une Honda RC 30 affûtée, emmenée par un Mertens – mais pas le célèbre Stéphane. Gian Mertens s’illustre depuis peu en anciennes, aux côtés d’yves Bollaerts. Au troisième rang, une Yamaha OW 01 anglaise, pilotée par Jonathan Lodge et Steven Neate, puis une autre RC 30, anglaise aussi, emmenée par la star du Tourist Trophy James Hillier et Stephen Haith. On se serait alors cru au départ d’une course de Superbike de 1990… La première Classic est, comme souvent, la Japauto du Power Racing Team, qui réussit à ne pointer qu’à deux secondes du meilleur temps avec des jantes de 18 pouces et un lourd cadre en tubes d’acier. L’emprise de la catégorie Post-classic semble donc définitive. Première manche de nuit, départ à 20 h 50 le vendredi soir, et sortie du premier safety car quelques minutes plus tard seulement. Après quelques tours, la compétitio­n reprend. On attendait la Suzuki n° 56, c’est d’abord la RC 30 n° 111 pilotée par James Hillier qui s’illustre, suivie de deux Kawasaki ZXR, celles du team Hampe Racing

LES MOINS DE 30 ANS VIENNENT DÉSORMAIS SE FROTTER AUX ANCIENNES GLOIRES DE L’ENDURANCE

(Nicolas de Dieuleveul­t et Christophe Charles-artigues) et du team Eisen (Vincent Eisen et Baptiste Gigon). Mais Grégory Fastré ne se ménage pas pour remonter en tête, claquant un fabuleux 2’07’’0 en pleine nuit ! Avant de devoir pousser un long moment pour rentrer en panne aux stands. Bruno Le Bihan prend alors son relais mais la Suzuki ne va pas au bout… Et la Kawasaki de Hampe Racing s’impose devant l’autre ZXR du team Eisen. La RC 30 belge de Dholda Racing complète ce premier podium. Mais la Japauto, quatrième, n’était pas loin.

L’année prochaine, le nombre de Classic pourrait diminuer

Revanche le lendemain matin, à 8 h 30. Le soleil est timide, la piste un peu froide… Et le stand de la Suzuki du team Force vide. La courte nuit n’a pas suffi à la réparer. La lutte s’engage alors entre les trois équipages du podium de la veille. Cette fois, c’est le team Eisen qui l’emporte. Vincent, ancien champion de France Promosport 250 et vicechampi­on de France Open 250, acteur farouche de la CB 500 Cup en 1996 avec Sébastien Charpentie­r, s’est déchaîné au guidon d’une ZXR 750 qui disposait d’un kit spécial 800 cm3 (dont le réglage a posé de multiples problèmes aux essais). Avec un meilleur tour en 2’07’’1, il a égalé le temps de Grégory Fastré et a semé la RC 30 du team Dholda Racing. Logiquemen­t, avec une seconde place et une victoire, Vincent Eisen et Baptiste Gigon gagnent la catégorie Post-classic. Le team familial ne cache pas sa joie, une heure plus tard dans le paddock, débouchant force bouteilles et immortalis­ant l’instant près de leur grande tente blanche. En Classic, c’est la Japauto de Jaubert et Sauve qui s’impose et emporte donc ce 16e Bol selon la règle instaurée par l’organisate­ur. L’année prochaine, il ne serait cependant pas surprenant de voir encore le nombre de Classic diminuer. En espérant voir plus de motos italiennes en Post-classic, une Ducati 888 bien affûtée ou une Moto Guzzi Moto Bel pourrait tirer son épingle du jeu car, toujours selon l’organisate­ur, l’année prochaine, la cylindrée devrait être limitée à 750 cm3 pour les quatrecyli­ndres mais libre pour les twins et les Classic. De quoi laisser aussi un peu d’espoir à ces dernières. À suivre. ❖

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 ??  ?? 1- Les deux Suzuki GSX-R des teams Phase One (n° 3) et Holland Motor Sport (n° 24) devancent ici la Bimota du team Scuderia, signe des temps... 2- La Honda RC 30 de Classic Racer Nice a connu quelques déboires en première manche. Elle est tout de même repartie mais a fini dernière. 3- Le team italien Taurus (n° 44) a récolté moins de succès qu’à l’accoutumée, terminant 11e en première manche puis 8e dans la seconde. 4- Stéphane Mertens était engagé sur la Honda RC 30 du team Bike, comme à la belle époque.
1- Les deux Suzuki GSX-R des teams Phase One (n° 3) et Holland Motor Sport (n° 24) devancent ici la Bimota du team Scuderia, signe des temps... 2- La Honda RC 30 de Classic Racer Nice a connu quelques déboires en première manche. Elle est tout de même repartie mais a fini dernière. 3- Le team italien Taurus (n° 44) a récolté moins de succès qu’à l’accoutumée, terminant 11e en première manche puis 8e dans la seconde. 4- Stéphane Mertens était engagé sur la Honda RC 30 du team Bike, comme à la belle époque.
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1- La RC 30 du team belge Dholda Racing a fêté de belle manière le trentième anniversai­re de la Honda, à la troisième place de ce Bol d’or Classic. 2- Les Normands du team Magic Box ont sérieuseme­nt progressé cette année avec leur Kawa ZXR 750 en se classant 13e au général. 3- Le nouveau revêtement du circuit Paul-ricard n’a pas éliminé les nombreuses bosses de son tracé, provoquées par les automobile­s.
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4- On dit que le quatrième est le premier perdant... La Suzuki n° 177 du team Nocki Classic Team a tout de même fait bonne figure. 5- Vincent Eisen et Baptiste Gigon sont sur la plus haute marche de ce podium 2018, bravo !

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