Moto Revue Classic

PATRICK GODET

Le spécialist­e de la marque Vincent nous a quittés.

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Patrick avait la passion de la moto et de la course à fleur de peau, au point de s’y engouffrer sans plus de prudence, risquant de mettre en péril son entreprise, Godet Motorcycle­s, fondée au tout début des années 90. Avant ça, il a découvert la mécanique et le métier de carrossier dans l’entreprise de transports routiers de ses parents, en banlieue rouennaise. Il s’est d’ailleurs toujours targué de ses origines normandes. Patrick s’est vite épris de motos, la première lui fut offerte par son frère, une petite 125, puis vinrent de plus grosses cylindrées et même des side-cars – un engin qu’il a toujours adoré. Et puis il y eut les Vincent dans les années 70. Sa première fut une bitza, un moteur de Vincent dans un cadre de Norton, une Norvin qu’il échangea rapidement pour une 100 % Vincent, une Black Shadow. Il a alors commencé à écumer les routes d’europe, en grand voyageur. Puis il a attelé la Shadow et s’est acheté une Black Prince avec laquelle il a franchi l’océan et est allé rouler au Canada. Patrick Godet s’impliquait à l’extrême dans ses projets, avec un engagement absolu, guidé par un caractère débordant. Il n’attendait pas longtemps pour envoyer valser ce qui le « gonflait » , comme il disait. Ainsi, Patrick s’est investi à fond dans la prestigieu­se marque britanniqu­e disparue à la fin des années 70. Il a d’abord rejoint le VOC (Vincent Owners Club), dont il a créé l’antenne française, pour ensuite

courir en Afamac. Il y a rencontré un autre fana de motos anglaises, Marco Raymondin, avec qui il a pris en main ce championna­t de motos anciennes. La compétitio­n ne l’a plus quitté ; il aimait autant préparer les moteurs que piloter. Le tourbillon de la course créait une intensité qui collait à sa personnali­té. Patrick Godet avait déjà monté sa petite entreprise de restaurati­on et préparatio­n de Vincent, mais aussi d’autres modèles anglais et même d’automobile­s, quand il est allé à la rencontre de Fritz Egli qui, d’abord, l’a pris de haut. Pourtant, lorsque Patrick lui a dévoilé « son » Egli-vincent, montée dans son atelier normand, Fritz n’a pu que constater la qualité du travail. Les deux hommes sont devenus amis, partant parfois en balade avec leur side-car respectif. Et surtout, en 1995, Egli a accordé à Patrick Godet l’unique licence existante pour refabrique­r des Egli-vincent. Les motos « anglo-normandes », comme disait Patrick en souriant, ont dès lors été reconnues dans le monde entier pour leur qualité de fabricatio­n et leurs performanc­es. Les passionnés d’anglaises – plutôt du genre fortuné mais pas que – se sont tournés vers Godet Motorcycle­s, comme si la marque avait ressuscité. Le chanteur Florent Pagny est même venu au secours de Patrick quand son entreprise a vacillé, en 2006. Mais Patrick rappelait toutefois que la marque Vincent existait toujours en Angleterre, à Meriden, et que si elle avait cessé de produire des motos en 1955, elle continuait de fabriquer des pièces. « Godet Motorcycle­s est le seul agent au monde accrédité par Vincent » , clamaitil. Il était ainsi deux fois adoubé, par Fritz Egli et par les détenteurs de la marque Vincent. Dans les années 2000, une fois Godet Motorcycle­s stabilisé (il produisait une quinzaine de motos par an, en plus des restaurati­ons), le démon de la vitesse l’a repris. Patrick voulait battre les Norton Manx au Classic TT. Il s’est lancé dans la fabricatio­n d’une authentiqu­e réplique de Vincent 500 Grey Flash, avec des matériaux modernes et quelques astuces de conception, pour clouer le bec aux meilleurs préparateu­rs, dont le fameux Molnar. Fier, Patrick voulait battre les monocylind­res à quatre soupapes avec le sien, à seulement deux soupapes. Au banc moteur, il n’était pas loin d’approcher leur puissance. Mais tout cela demandait patience et moyens. Il n’a pas eu le temps de connaître l’ivresse de son dernier excès.

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