Moto Revue Classic

CHRONIQUE BOURGEOIS

Christian Bourgeois, champion de France de vitesse devenu journalist­e à Moto Revue, puis directeur de la compétitio­n chez Kawasaki, est aujourd’hui retraité. Il a donc le temps de nous conter quelques anecdotes.

-

Boubou nous raconte la trajectoir­e d'angelo Bergamonti, rival d'ago, parti trop vite.

Mes souvenirs du pilote italien Angelo Bergamonti datent de 1971, année où j’ai participé à deux courses de la Temporada Romagnola transalipi­ne. Il était question d’une série de courses internatio­nales organisées en début de saison en Émilie-romagne, et hormis celle de Modène, elles se déroulaien­t sur la côte Adriatique, à Riccione, Rimini, CerviaMila­no Maritima, Cesenatico et Lugo. Il s’agissait de circuits urbains avec tous les aléas que cela peut représente­r. Ces épreuves étaient relevées, avec bien sûr toutes les usines de la péninsule et les meilleurs pilotes nationaux. À cela, il fallait ajouter une sélection très stricte de 4 pilotes étrangers par catégories. Par l’intermédia­ire de Roberto Patrignani, correspond­ant local de Moto Revue, j’avais eu la chance d’être « pistonné » pour participer aux courses de Modène, avec mes Yamaha 250 et 350, et à celle de Rimini en 250 et 500 avec l’aermacchi 380 usine que me confiait le même Roberto Patrignani. Modène, la première épreuve de la série, se disputait sur un tracé situé juste à la périphérie de la ville. Il était ceint de murs en briques rouges, totalement plat et sûr grâce à ses dégagement­s. Elle avait donné lieu à des bagarres extraordin­aires et des résultats surprenant­s, avec la victoire de Guido Mandracci (mon coéquipier chez Japauto en1975) devant Phil Read, tous deux sur Yamaha 250, et celle d’angelo Bergamonti s’imposant face à Giacomo Agostini en 350. Devancé de plus de 8 s, une véritable humiliatio­n, Ago l’avait emporté en 500, mais l’on sentait que cette saison serait différente avec ce nouveau coéquipier. La semaine suivante, à Rimini, dans le cadre luxueux de cette station balnéaire, Agostini prit sa revanche en 350, mais Angelo Bergamonti gagna à la régulière en 500. Visiblemen­t, Giacomo Agostini ne s’attendait pas à être bousculé à nouveau. Il était, toute proportion gardée, comme un boxeur sonné à froid. C’est dans ce contexte « électrique » que la course de Riccione, la perle verte de l’adriatique, programmée le 28 mars, devait se dérouler. En raison de conditions météo déplorable­s, elle fut reportée d’une semaine, au 4 avril. Mais ce jour-là, le temps ne s’était guère amélioré. Le circuit en ville ne donnait aucun droit à l’erreur avec ses arbres, ses lampadaire­s, sans parler des trottoirs qui le borde sur toute sa périphérie. 40 000 spectateur­s avaient fait le déplacemen­t, car comme toujours, on veut voir le lion manger le dompteur… Le duel n’aura jamais lieu. Agostini est bien parti, Bergamonti un peu moins mais il remonte petit à petit et, visiblemen­t, il est plus rapide qu’agostini et signe deux records du tour successifs. Au 7e, alors que la jonction est presque faite, sa MV 350 part en aquaplanin­g dans la ligne droite du bord de mer, à pleine vitesse. Angelo glisse mais sa tête heurte le trottoir et il se tue sur le coup. Comme toujours en Italie, pour des raisons de responsabi­lité et d’assurance, son décès ne sera officialis­é qu’après son admission à l’hôpital Bellaria de Bologne en fin de journée. La course ne sera pas arrêtée et Agostini décrochera cette amère victoire. Angelo Bergamonti faisait partie de ces très bons pilotes italiens dont l’ambition était de décrocher un guidon d’usine chez MV. Avant d’atteindre ce Graal, il avait été pilote officiel Morini, Aermacchi, Paton et Linto. Excellent metteur au point, il avait été engagé début 1970 par le comte Agusta pour peaufiner la MV 350 six-cylindres. Mais comme tous les coéquipier­s d’ago, Bergamonti ne voulait pas être un simple faire-valoir. À Monza, il avait terminé deux fois 2e, juste derrière Giacomo, et en fin de saison, lors du GP d’espagne, il triompha lors des deux courses. Ago, déja titré, avait préféré s’engager dans une épreuve lucrative à Cadwell Park. Cet accident scellera la fin des courses sur route en Italie. En 1972, seule sera organisée celle de Modène, et dès l’été, le circuit de Misano était inauguré. ❖

BERGAMONTI FAISAIT PARTIE DE CES PILOTES ITALIENS DONT L’AMBITION ÉTAIT DE DÉCROCHER UN GUIDON D’USINE CHEZ MV

 ??  ?? Angelo Bergamonti lors du Grand Prix d’espagne 1970 dans le parc de Montjuich.
Angelo Bergamonti lors du Grand Prix d’espagne 1970 dans le parc de Montjuich.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France