TRIUMPH 250 BLAZER
Au début des années 70, Triumph propose une jolie 250 trail-bike pour faire concurrence à la production nippone.
Au début des années 70, Triumph fait une tentative sur le marché du trail-bike…
Dans les forêts des Landes girondines, on ne rencontre pas que des chasseurs. Les grandes étendues s’y prêtant, bon nombre de motards en font un terrain de jeu ou de détente avec leurs trail-bikes, la faible concentration de la population laissant de la place pour tout le monde. Ainsi, Denis, ajusteur dans l’aéronautique, profite-t-il de ces chemins dans ses moments de liberté. Lui qui roule régulièrement en Harley-Davidson, son engin de prédilection, choisi sur un coup de coeur, se nomme Triumph T25 SS Blazer, une 250 cm3 monocylindre de 1971. Eh oui, La marque de Meriden a aussi produit des petites cylindrées. Enfin, pas vraiment, car dès 1951, BSA devient propriétaire de Triumph. La marque de Birmingham commercialise la B25 en 1968, sur la base de la C15, animée par un monocylindre 250 cm3 à soupapes culbutées apparue en 1959. Ce moteur a été modernisé avec une culasse et un cylindre en aluminium, de plus grosses soupapes et un taux de compression plus important. Plus léger et plus puissant, il est monté dans la partie-cycle de la B44 Victor, la 500 cm3 monocylindre de la gamme.
Le tout-terrain, marché juteux
Outre la B25 Starfire destinée à la route, deux modèles tout-terrain sont commercialisés : la SS Gold Star, puis la T Victor Trail reconnaissable à son réservoir en alu. Vous l’avez compris, la Triumph T25 Trail SS
Blazer n’est autre qu’une
BSA rebadgée. Face aux constructeurs japonais, il faut faire feu de tout bois. Malheureusement, Honda avec ses quatre-temps et Yamaha avec ses deux-temps ont déjà verrouillé le marché de la trail-bike et n’ont laissé aucune chance à la production anglaise sur ce juteux créneau, en particulier aux États-Unis. Et pourtant, cette grosse 125, comme la qualifie Denis, a de quoi séduire. Avec à peine plus de 130 kg et malgré un moteur de 25 chevaux, la T25 est une machine agile, bien adaptée au tout-terrain. Elle est facile à manier et, par exemple, le demi-tour dans un chemin étroit entre les arbres ne pose aucun problème.
Les trois gallons (11,35 litres) du réservoir longiligne sont suffisants, le petit moteur étant d’une grande sobriété. Une moto passe-partout que Denis transporte dans son camping-car avant de se lancer sur les chemins de terre.
Allumage électronique
Une question me turlupine : comment un amateur de V-twins américains peut-il s’éprendre d’une 250 anglaise « off-road » ? Cela correspond au passé de ce féru de mécanique qui a beaucoup pratiqué le cross et l’enduro dans sa jeunesse avec ses amis. Il a déniché cette monture à Toulon où elle était stockée depuis de longues années. Une grosse révision s’imposait. Denis, qui aime que tout soit en ordre et bien réglé, a refait le faisceau électrique et a monté un allumage électronique qu’il cache dans un boîtier, sous le réservoir. Il précise que le régulateur se trouve sous la batterie, ellemême située sous la selle. Le carburateur Amal a été démonté et soigneusement nettoyé, sachant que toutes les pièces sont disponibles sur le site de la marque. Denis a aussi refabriqué la grille de protection du silencieux d’échappement qui avait disparu. Autre modification, il a monté un tendeur de chaîne sur le bras oscillant. De quoi éviter les « sauts
PETITE ET LÉGÈRE, LA BLAZER S’EN SORT TRÈS BIEN EN TOUT-TERRAIN
de chaîne » lorsqu’il pratique le tout-terrain de manière intensive. Il s’est aussi permis de monter un guidon italien Tommaselli à la place de celui d’origine. Quand il dit qu’elle est facile à utiliser, il faut le croire. Après avoir « titillé » le carburateur, un seul coup de kick suffit à lancer le petit mono et filer sur les premiers sentiers venus. La tenue de route – ou plutôt de chemin – est suffisante, pour peu que l’on ait pris soin de monter de bons amortisseurs et de remplacer l’huile de fourche. D’après Denis, certains auraient même transformé la T25 en moto de trial, la souplesse du moteur se prêtant parfaitement à la discipline. On veut bien le croire.
Un mono dans la bruyère
Sur les chemins entre les pins, on fait parfois des rencontres étonnantes. Alors que son propriétaire me démontrait les qualités de la Blazer, nous sommes tombés sur des adeptes de motos des années 20 et 30, dont la moyenne d’âge ne dépasse pas les
35 ans ! Johanna, Vincent et Hugo se sont donc pris de curiosité pour cette 250, même si elle n’a que 50 ans. De plus, le tout-terrain ne rebute pas Johanna qu’elle a longtemps pratiqué avec une bande de copains, elle aussi. Denis n’a donc pas hésité à lui confier sa monture. Habituée aux machines qui ont le sélecteur à droite, « Jo » n’a pas mis très longtemps pour se sentir à l’aise au (grand) guidon de la petite anglaise. Elle a juste été un peu surprise pas le volume des poignées en caoutchouc typiquement britanniques. En parlant de caoutchouc, sur les roues, Denis a monté des pneus Heidenau qui offrent un bon compromis entre route et tout-terrain. Denis a tout de même recommandé à notre amazone de faire attention au frein avant surdimensionné. Le tambour double came est magnifique mais beaucoup trop puissant pour une 250, qui plus est destinée au tout-terrain. Rien d’étonnant, c’est le même que sur la Bonneville 650 alors que de leurs côtés, les Nippons montaient des petits éléments simple came beaucoup moins coûteux… Denis n’a pas le temps de finir que Jo était déjà dans la bruyère, debout sur les repose-pieds, juste avant de s’engouffrer dans la pinède. On l’a vu ressortir avec un large sourire qui ne trompe pas. Elle s’est juste arrêtée pour nous vanter la facilité d’utilisation de la T25 avant de repartir dans les ornières d’un pré. En la voyant se faire secouer au guidon de la Blazer, cela me faisait penser à la situation des constructeurs britanniques au début des années 70. En 1972, BSA faisait faillite et Triumph entrait dans le giron du groupe NortonVilliers qui allait donc devenir NVT et abandonner ses modèles tout-terrain. Dommage, mais ça n’aurait de toute façon pas suffi pour sauver l’industrie motocycliste anglaise…