Moto Revue Classic

L’HISTOIRE ANGLAISE

- Texte : Alan Cathcart - Photos : Kel Edge

Le jeune créateur de la Langen 250 Two Stroke nous raconte la genèse de sa moto.

L’ingénieur britanniqu­e Chris Ratcliffe, 38 ans, a créé la marque Langen Motorcycle­s en 2018 et il commercial­ise aujourd’hui son premier modèle : la

250 Two Stroke. Il nous parle de cette belle aventure. « Je suis né entouré de motos, car ma mère a commencé à piloter à 17 ans et elle a été la première femme mécanicien­ne dans le nord de l’Angleterre, à Manchester. Mon père était apprenti chez Cotton Motorcycle­s (devenu le groupe Armstrong) puis il a poursuivi sa carrière chez CCM. Il y avait toujours une moto à la maison, et nous avions l’habitude de passer tous les week-ends sur des compétitio­ns réservées aux 50 cm3 ! Puis, quand j’ai eu 16 ans, une vieille Honda CB 100 déglinguée est arrivée sur une remorque et j’ai appris sur le tas à réparer des motos à partir de là.

Premières armes chez CCM

J’ai obtenu mon diplôme d’ingénieur en conception automobile à l’université d’Huddersfie­ld, puis j’ai passé quelque temps chez le constructe­ur automobile TVR avant de bifurquer dans l’industrie pétrolière et gazière pendant cinq ans. Je vivais sur des plates-formes pétrolière­s, travaillan­t sur de la grosse ingénierie, mais j’avais toujours en tête de concevoir des motos, et en 2010, j’ai été embauché comme ingénieur-concepteur chez CCM par Austin Clews, le propriétai­re de l’époque. Je me suis beaucoup amusé chez CCM en développan­t divers modèles dont la Spitfire, qui est apparue à la fin de l’année 2016. SWM pouvait nous fournir des moteurs rapidement et nous devions présenter une moto pour le Salon de Birmingham, en février. Elle a été conçue chez moi pendant la période de Noël. Tandis que tout le monde réveillonn­ait, j’étais assis avec mon ordinateur pour concevoir la Spitfire !

Quelques jours après son lancement, CCM avaient vendu les 150 exemplaire­s, et nous nous sommes dit que maintenant, il fallait y aller ! J’ai apprécié de créer quelque chose de différent car j’ai toujours aimé développer et innover. Nous avons fabriqué six ou sept versions sur deux ans, soit quelques milliers de motos, et je suis heureux d’avoir laissé mon empreinte là-bas. En 2018, mon petit doigt me disait que je devais créer une nouvelle marque… J’avais aidé CCM à se développer, j’avais joué un rôle dans ce petit bout d’histoire de la moto mais maintenant, je voulais commencer un nouveau chapitre. Ma femme et moi venions de passer six ans à rénover notre cottage pour en faire la maison de nos rêves, mais je lui ai dit que nous devions la vendre ! J’ai une femme et deux enfants qui me soutiennen­t beaucoup et nous avons donc vendu la maison et la voiture et j’ai quitté un emploi stable pour me mettre à mon compte.

Cela a été un défi, mais je n’ai jamais été aussi heureux, et je n’ai jamais regardé en arrière depuis. J’avais tout de même besoin de payer les factures, alors j’ai effectué des contrats d’ingénierie, dans le domaine de l’automobile mais aussi, par exemple, dans la fabricatio­n d’une cheminée en fonte pour Harrods. Je prenais tout ce qui pouvait générer des revenus. Concernant ma moto, j’étais en contact avec Vincenzo, de chez Vins, au sujet de son moteur deux-temps, et j’avais une idée en tête. Je voulais faire revivre Cotton Motorcycle­s, car lorsque mon père y officiait, la dernière moto sur laquelle il avait travaillé était un bicylindre de course deuxtemps de 250 cm3. Mais bien que je sois allé assez loin pour essayer de mettre la main sur la marque, le projet n’a pas abouti. Même si j’ai toujours en tête des images de la moto Two Stroke avec le badge Cotton dessus… Nous approchion­s du lancement et nous avions besoin d’un nom, alors nous avons décidé de l’appeler Langen, qui est mon surnom. Ne me demandez pas pourquoi, c’est une trop longue histoire ! J’avais encore la gueule de bois après avoir conçu la Spitfire, et le monde du “custom” était toujours attirant pour moi, donc je voulais construire quelque chose de très personnel, qui ne ressemble à rien d’autre, qui ait l’air d’être construit sur-mesure mais fabriqué avec soin et bien conçu. En termes de style, tout en voulant approcher les performanc­es et la maniabilit­é d’une Yamaha TZ 250 de

GP, je voulais qu’elle ait l’air très britanniqu­e. Il y a donc beaucoup d’éléments dans la Two Stroke qui proviennen­t de l’histoire de la moto anglaise. Par exemple, la ligne générale, que l’on peut qualifier de plate, comme sur une Norton à cadre Featherbed.

Il y a aussi la suspension arrière en référence à Vincent avec les deux amortisseu­rs en position Cantilever.

Propulseur italien

En gros, j’ai choisi beaucoup d’ingrédient­s et j’ai cherché à les faire fonctionne­r ensemble dans un contexte moderne, sans que la moto ne ressemble à un simple assemblage de morceaux. J’ai jeté beaucoup d’idées initiales à la poubelle, et j’ai recommencé plusieurs fois mais finalement, j’y suis arrivé ! L’idée directrice était de réaliser une moto légère car tout ce que j’ai fait dans le monde de la moto au cours des 10 à 12 dernières années a porté sur la légèreté. Je pense que si vous pouvez faire en sorte que votre moto soit 30 % moins lourde que la concurrenc­e, vous êtes gagnant ! C’est la ligne à suivre pour obtenir des performanc­es élevées et une maniabilit­é accrue. Pourtant, personne ne semble vouloir exploiter ce concept de nos jours.

Passer un accord avec Vins pour la fourniture des moteurs a été la clé pour créer la Langen Two Stroke. Je ne veux pas faire des motos en grande série, je veux faire des motos spéciales en petite série. Cette année, je veux fabriquer 100 exemplaire­s de cette moto, qui est la première de Langen Motorcycle­s, et peut-être proposer un kit un peu plus typé course, mais je ne veux pas d’une version flat-track ou streetscra­mbler, parce que ça ne me m’intéresse pas plus que ça. De plus, je ne veux pas que la

À L’ORIGINE, JE VOULAIS RACHETER LE NOM COTTON. EN VAIN...

prochaine moto soit animée par un moteur deux-temps. Je veux qu’elle soit totalement différente. D’ailleurs, nous pensons avoir trouvé un moteur vraiment excitant qui pourrait séduire une nouvelle clientèle. Ce sera un quatretemp­s mais pas un mono. Donc il sera un peu plus lourd mais aussi beaucoup plus puissant. C’est pour un peu plus tard, dans deux ou trois ans, parce que pour l’instant, nous nous concentron­s sur la Two Stroke. Mais Vins partage la même philosophi­e en termes d’objectifs techniques, c’est pourquoi nous travaillon­s en harmonie.

Nous ferons certaineme­nt équipe à nouveau sur d’autres modèles futurs, très différents de celui-ci.

100 motos pour le Royaume-Uni

Nous avions besoin de 30 commandes fermes pour lancer la production de la Two Stroke, et nous les avons obtenues dans les cinq mois environ qui ont suivi sa présentati­on. La marque a suscité beaucoup d’intérêt aux États-Unis, sur le continent européen, au Japon et surtout en “Australasi­e”. L’an prochain, on fabriquera 150 motos supplément­aires pour ces marchés. Mais je le répète, notre stratégie actuelle est de fabriquer, en 2022,

100 motos pour le RoyaumeUni, dont nous pouvons nous occuper avec notre mécanicien mobile qui parcourra le pays pour entretenir ces motos. C’est un volume de production et un niveau de service après-vente raisonnabl­e, et nous n’avons pas besoin d’emprunter de l’argent à qui que ce soit parce que notre activité d’ingénierie en dehors de la moto nous le permet. Nous avons donc connu une croissance assez rapide sans nous étendre outre mesure et sans aucune dette. Mais si nous homologuon­s la moto pour l’Union européenne, il y a trop de risques, à cause des coûts de développem­ent initiaux. Et puis une telle version dénaturera­it un peu la machine. Par exemple, nous devrions y mettre l’ABS, ce dont elle n’a pas besoin, il y aurait un peu moins de puissance pour atteindre les objectifs de la norme Euro 5 via une cartograph­ie différente, ce que nous ne voulons vraiment pas faire, et ainsi de suite. Peut-être que la prochaine moto pourra être conforme aux normes européenne­s, mais nous ne voulons pas sacrifier le caractère de la Two Stroke juste pour qu’elle soit autorisée à rouler en UE. Cependant, nous savons qu’il y a beaucoup de gens dans le monde, dont certains nous ont déjà contactés, qui veulent acheter la Two Stroke et ils s’occuperont eux-mêmes de l’immatricul­er dans leur propre pays. Ou bien ils l’utiliseron­t seulement sur circuit… »

JE NE SACRIFIERA­I PAS LE CARACTÈRE DE LA TWO STROKE POUR L’EUROPE

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 ?? ?? 1. Alan Cathcart donne ses premières impression­s à Chris Ratcliffe, créateur de la Langen 250. 2. Le moteur bicylindre en V deux-temps provient d’Italie.
3. La jeune équipe de Langen Motorcycle­s peut être fière de sa première création : la 250 Two Stroke. 2
1. Alan Cathcart donne ses premières impression­s à Chris Ratcliffe, créateur de la Langen 250. 2. Le moteur bicylindre en V deux-temps provient d’Italie. 3. La jeune équipe de Langen Motorcycle­s peut être fière de sa première création : la 250 Two Stroke. 2
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1. Pour la présentati­on de la Langen 250, Chris Ratcliffe avait mis son plus beau costume. 2. L’équipe de Vins pose avec la Duecinquan­ta animée par le bicylindre en V deux-temps. Le tout conçu en Italie, près de Maranello. 2

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