Comparatif hypersport Quatre reines de la piste s’expliquent : Aprilia RSV4 RR, BMW S 1000 RR, Honda CBR 1000 RR et Suzuki GSX-R 1000 R
« Une sportive sur route, c’est débile ! » Ah oui ? On a décidé d’aller voir, de prendre la route, la vraie, la virevoltante, en quittant la capitale pour rejoindre le centre de la France à dos des quatre nouveautés hypersport de l’année. Une « balade » au plus près de nos émotions, comme seules savent les faire naître ces machines d’exception.
On est loin du début des années 2000, celles où nos axes routiers n’étaient pas encore envahis par des milliers de radars automatiques (presque 5 000 aujourd’hui), celles où les constructeurs se tiraient la bourre (et nous avec !) sur un segment sportif encore performant commercialement, celles où – par ricochet – le cycle de renouvellement de ces machines ne durait souvent guère plus de deux ans... Une période bénie pour toute une génération de motards choyés par des constructeurs toujours plus audacieux, lesquels s’affranchissaient allègrement des critères de polyvalence pour creuser l’excitant sillon du radicalisme. Et puis la répression routière s’est débridée (alors que nos motos ne l’étaient officiellement pas, loi des 100 ch oblige), les ventes se sont essoufflées en même temps que les amendes se multipliaient... D’autres catégories, plus accessibles, plus paisibles, ont pris le pas sur les sportives. Les cycles de renouvellement des modèles se sont allongés de plusieurs années, parfois tellement étirés que l’on a pu penser à un moment qu’ils avaient perdu toute élasticité... Mais il restait bien une certaine souplesse aux constructeurs, pas mal d’envie aussi, et le besoin de continuer de montrer l’étendue de leur savoir-faire technologique. Cette année, ce sont quatre modèles hypersports qui goûtent à l’excitation du changement. Si l’Aprilia RSV4 RR et la BMW S 1000 RR ne sont pas bouleversées, la Honda CBR 1000 RR et la Suzuki GSX-R 1000 R sont sujettes, si ce n’est à une révolution, tout au moins à des évolutions majeures. La Suzuki déjà, inchangée depuis 2009, qui hérite d’une plastique plus aiguisée, même si la filiation avec la lignée GSX-R reste évidente. Mais le gros du boulot a porté sur… un peu tout. La partie- cycle avec un nouveau cadre (moins large), un bras oscillant allongé (+ 4 cm), de nouvelles suspensions (fourche Showa BFF et monoamortisseur Showa BFRC), et son lot de modifications moteur, tant d’un point de vue mécanique qu’électronique.
On a signé en connaissance de cause !
Parce que oui, l’électronique arrive enfin sur la Suzuki, et plus encore sur cette version R (19 399 €), qui hérite d’un quickshifter up and down permettant un passage à la volée des rapports à la montée et à la descente, d’un Launch Control (assistance pour les départs), de trois modes de gestion moteur et d’un Traction Control réglable sur 10 degrés de sensibilité. Vu des entrailles maintenant, le 4-cylindres en ligne avoue une plus grande
finesse (plus court et moins large) et voit sa cylindrée passer à 999,8 cm3 grâce à des cotes « super carré » (76 x 55,1 mm contre 74,5 x 57,3 mm précédemment), le taux de compression augmente de 0,3 (13,2 à 1) et le régime maxi de 1 000 tr/min (14 500 désormais). Au final, la GSX-R grimpe à 202 ch et 11,8 mkg. La Honda CBR 1000 RR, bien que revue de fond en comble, n’annonce que 192 ch et 11,3 mkg. Dans son cahier des charges, le premier constructeur mondial n’a pas cherché à se lancer dans une course à la puissance, mais a travaillé une nouvelle fois sur la maîtrise générale. Inchangée dans le fond – comme la Suzuki – depuis 2009, la Honda propose une électronique très développée, basée sur un IMU (unité de mesure inertielle) travaillant sur cinq axes, qui gère le contrôle de traction, l’ABS (plus ou moins intrusif en fonction de l’angle, de la pression, de la vitesse...), et bride les délestages de la roue arrière au freinage comme ceux de la roue avant à l’accélération. Si un embrayage à glissement limité est disponible de série, le shifter up and down est disponible en option. Et comme sur la Suzuki, un mode utilisateur permet d’ajuster ces paramètres selon ses envies, ou ses capacités... Honda souhaite mettre le pilote au centre des attentions, sans jouer le jeu de l’escalade, au contraire de ses rivales européennes. Si la BMW millésime 2017 ne tranche pas avec le précédent millésime, elle peaufine encore sa fiche technique, surtout pour l’adapter à Euro 4, et la démocratise en adoptant de série des équipements qui étaient avant des options ; c’est le cas du freinage semi-intégral (le levier avant commande aussi l’arrière) équipé du Race ABS et du DTC déconnectable. Surtout, même inchangée mécaniquement, elle revendique toujours 198 ch et 11,5 mkg. Quant à l’Aprilia, elle reçoit aussi une nouvelle ECU Magneti Marelli plus puissante et va encore plus loin en permettant de régler les différents paramètres via un smartphone (Bluetooth ), et ainsi
® d’intervenir sur les réglages, virage par virage. Mécaniquement, les Italiens ont aussi travaillé pour réduire les frictions (et répondre à Euro 4) : on retrouve ainsi 4 pistons plus légers et de nouveaux traitements internes, comme de nouvelles valves pour gérer le flux des gaz d’échappement. Esthétiquement en revanche, rien ne change, et il faut reconnaître que c’est très bien ainsi. Les présentations faites, on ajuste, dans le sous-sol de la rédaction, nos sacs à dos sur nos combinaisons. On a signé en connaissance de cause, le voyage ne sera ni maxi-trail, ni GT, le confort un vague souvenir, mais le plaisir... Quatre tours de clé, et c’est parti !