Moto Revue

Essai dynamique PUISSANCE ET SENSATIONS

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Energica nous livre donc une troisième version de sa vision de la moto électrique avec l’Eva EsseEsse9, qui est dérivée de l’Eva, roadster plus « classique », elle-même version dépouillée de l’Ego, sportive pure et dure. Il subsiste donc de nombreux éléments en commun de manufactur­iers reconnus comme Marzocchi, Bitubo, Brembo, Öhlins, Bosch ou OZ, pour les plus visibles. Ils confèrent à cette EsseEsse9 une crédibilit­é légitime, un aspect massif, cossu et soigné. Nous avons pris possession de cette machine sur son lieu même de fabricatio­n – ou d’assemblage, devrions-nous dire. L’Energica provient donc d’un atelier classique où la cadence actuelle est d’une machine produite par jour. À la manière d’un Lego géant, l’entreprise italienne

® reçoit toutes les commandes de ses différents fournisseu­rs en tenant compte du cahier des charges établi par ses ingénieurs et ses designers. Sa conception classique autour d’un imposant cadre tubulaire (les premières versions de développem­ent avaient opté pour des cadres périmétriq­ues en alu, mais le maintien d’un coût de fabricatio­n raisonnabl­e a été privilégié) a été rendue nécessaire par les imposantes batteries fabriquées en Asie. Pourquoi un si gros bloc ? Tout simplement parce qu’Energica veut procurer des sensations et s’enorgueill­ir de proposer la moto électrique de série LA plus puissante du marché. Cette puissance élevée entraîne de fait une surconsomm­ation d’énergie, nécessitan­t d’importante­s capacités de stockage. CQFD. Placé à la verticale, ce bloc de batteries est encapsulé et surmonté d’une centrale de commandes développée par Rinehart Motion System – société américaine travaillan­t notamment en Formule 1 sur les principes de KERS, systèmes de récupérati­on d’énergie au freinage –, pour commander l’ensemble des fonctions inhérentes au système de propulsion.

Franche poussée et culbuto

Ajoutez à cela un moteur spécifique logé sur l’arrière du bloc pour entraîner la chaîne et

L’Energica Eva EsseEsse9 est le roadster électrique de série le plus puissant du marché. Richement doté, il bouscule les repères, sans faire bouger les lignes.

vous obtenez une machine au centre de gravité haut, très haut perché. Pour faire un petit parallèle avec une moto thermique, une Moto Guzzi 1200 Sport passerait pour un Dax à ses côtés. Avec son large guidon – et malgré des pieds placés vers l’arrière –, sa position reste pourtant assez naturelle. Il est même plus facile d’appréhende­r le poids important de l’ensemble moteur positionné de manière centrale et verticale sous le réservoir factice que sur la sportive Ego (que nous avons pu essayer le même jour, et qui fera l’objet d’un prochain essai, ndlr). Un tour de clé et le tableau de bord s’allume, comme sur n’importe quelle autre moto. Développé par CRP, la maison mère, il est l’un des plus aboutis que nous ayons vus. Temps de charge, niveau de batteries, modes moteur, trips, températur­es : tout y est. Via une commande placée sur le commodo gauche, vous naviguez ainsi d’un menu à l’autre de manière assez ergonomiqu­e. Une fois le mode moteur choisi, qui va influer sur la puissance et donc la consommati­on – ainsi que l’inertie moteur permettant une légère récupérati­on d’énergie sur les décélérati­ons avec la sensation réelle de frein moteur –, il est temps de se lancer à l’assaut des routes serpentant dans les vignobles de Lambrusco, vin pétillant de la région de Modène. Comme pour un scooter, il faut saisir le frein avant. Puis il faut enfoncer ce qui pourrait faire office de démarreur pour voir le précieux « Go » s’afficher sur l’écran. Ensuite, rien de plus simple : comme un jouet, il suffit de tourner la poignée pour disposer de la puissance, de toute la puissance. Instantané­ment, l’ensemble, au poids pourtant conséquent, se propulse dans un sifflement qui n’est pas sans rappeler ceux émis par les modules de Star Wars. Avec 109 chevaux dans le plus puissant de ses modes, elle offre des accélérati­ons assez impression­nantes. Selon la marque, le 0 à 100 mètres est avalé en 3 secondes. Des performanc­es exceptionn­elles, mais qui entament sérieuseme­nt son autonomie. Avec des vitesses plus raisonnabl­es (- de 100 km/h), l’Energica EsseEsse9 offrirait entre 80 et 200 kilomètres en fonction de votre accointanc­e à jouer des franches accélérati­ons

offertes par les 18 mkg de couple ! Projeté d’un virage à l’autre, on y ressent des sensations assez... particuliè­res. Il faut un temps d’adaptation pour s’adapter à la géométrie inédite de l’ensemble. Un premier transfert de masses classique s’opère d’arrière en avant, lors du freinage. Surtout quand la fourche se trouve, comme c’était le cas pour nous, dans une configurat­ion « Chamallow ». Puis un deuxième mouvement de balancier de gauche à droite (ou inversemen­t en fonction du sens du virage), accentué par l’ensemble de batteries, s’opère. Ensuite, l’effet inverse se produit puisqu’il faut relever la moto à la sortie du virage, et composer avec une franche accélérati­on. Vous l’aurez compris, cet exercice n’est pas franchemen­t sa tasse de thé, et le concept ne semble pas près de s’améliorer puisque les dirigeants nous ont confié que chaque évolution à venir offrirait plus d’autonomie. Pour le moment, il n’est donc pas question de réduire la taille des batteries. Mais pour ceux qui seraient effrayés par le poids conséquent, pas de panique. Premièreme­nt, l’Eva EsseEsse9 est équipée d’un freinage Brembo couplé à un ABS Bosch, qui assure vraiment : pour les manoeuvres à l’arrêt, une simple pression sur deux commandes, et voilà la marche arrière en action ! Avec cette EsseEsse9, les sensations sont donc garanties entre deux terrasses de café, où il faudra pouvoir espérer recharger la batterie. Dans cette configurat­ion « vintage », l’EsseEsse offre une excellente finition qui justifie en partie son prix élevé, mais il est assez difficile, pour un tarif équivalent, de ne pas craquer pour un véritable roadster thermique. Car à 23 240 €, il va falloir quelques années tout de même pour amortir la différence avec une Ducati Monster 1200 R (l’un des roadsters les plus richement dotés, offrant un max de sensations), vendue 18 840 €. Un rapide calcul (considéran­t le prix de l’essence à 2 € le litre – voyons large –, 5 000 kilomètres par an, avec une conso à 7 litres/100 km, et en ajoutant une vidange tous les ans) donne environ 6 ans pour l’amortir. Et en considéran­t les différente­s avancées technologi­ques, alors que votre Energica sera devenue obsolète en 2024, votre Monster, elle, sera collector !

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