Essai dynamique EN PROGRÈS MAIS “PNEUT” MIEUX FAIRE
Cinq mois. C’est à cinq mois que remonte ma dernière valse avec la Tracer 900. La première du nom, au guidon de laquelle je me suis infusé un essai longue durée en compagnie du reste de la rédaction (à lire dans le Moto Revue n° 4068). Performante, rigolote, vive mais pas franchement confortable, ni très rigoureuse, voilà en gros ce qu’il en était ressorti. Du MT-09 tout craché, avaient persiflé les mauvaises langues sans qu’on puisse vraiment leur donner tort. Cinq mois après, en montant sur la nouvelle génération, j’ai l’impression de reprendre la valse là où je l’avais interrompue. Il paraît que la hauteur de selle s’est accrue de 5 mm. Du haut de mon mètre 73, je ne perçois pas la différence. Selle en position basse (la modification de sa hauteur est simpliste), mes pieds sont bien à plat. Conciliante : c’est le mot qui me revient en tête lorsque je manoeuvre les 214 kg de la Yam’, moteur coupé. Mais dès que je démarre son troiscylindres, ce sont trois autres syllabes qui me traversent l’esprit : bouillonnante. Il a beau ne tourner que sur son régime de ralenti, le trois-pattes Yamaha tient à montrer qu’il en a sous la culasse. Comme un chiot, il jappe et tire sur sa laisse : il est temps de l’aérer un peu. Les premiers hectomètres rappellent à mon souvenir une boîte de vitesses un peu accrocheuse. Du Yamaha tout craché, persifleront encore les mauvaises langues, sans qu’on puisse vraiment leur donner tort. Pour m’en abstraire, je me penche sur les petites nouveautés ergonomiques vantées par le constructeur. Le dispositif de réglage de la bulle ? Mieux, bien mieux : je peux le manipuler d’une main, et donc en roulant. La bulle elle-même ? Évasée en sa base, je la trouve plus jolie sans ressentir le moindre bénéfice, mais à 80 km/h, c’est assez logique. Pareil pour le guidon, plus étroit et rapproché de mon buste : à un train de sénateur, je ne vois pas la différence. Mais y a-t-il beaucoup de sénateurs qui se déplacent en Tracer 900 ?
Moins joueuse, plus typée GT
Probablement pas. Et c’est heureux, car la moto n’est pas franchement faite pour ça. Entendons-nous bien : rouler à la coule, elle sait le faire. Mais ce que son moteur aime et incite à faire, c’est prendre des tours. Bon, le souci, c’est qu’une Tracer 900 qui prend des tours atteint rapidement de hautes vitesses (près de 230 compteur), et que sur la première génération, le seuil des 180 km/h marquait par des louvoiements une nette dégradation de la tenue de cap. La nouvelle fait-elle mieux ? La réponse à cette question se fait fatalement au risque du permis, mais coup de chance, en pleine Andalousie, voici l’embranchement d’une autoroute allemande. Une opportunité comme ça ne se refuse pas. On enquille ma Tracer et moi : 140 km/h, 150 : la protection est top et la moto ne bouge pas. 180 : placée en position haute, la nouvelle bulle évasée protège toujours efficacement
Cette Tracer fait globalement mieux que sa devancière. Mais il y a un mais. Et même plusieurs, dont deux gommards qu’il eut été plus judicieux de gommer de la dotation.
ma tête et mon buste, sans trop générer de bruits aérodynamiques. Allez, on va chercher la vitesse maxi : fond de 6... ah non, celle-ci est trop longue et le trois-pattes s’essouffle. Fond de 5 alors... 228 km/h et verdict : tenue de cap sans reproche, plus aucun louvoiement. Un miracle ? Non, un empattement plus long de 6 cm. Radical pour gagner en stabilité. Mais avec ce genre de solution, ce qu’on gagne d’un côté, on court le risque de le perdre de l’autre : en agilité. Revenu sur un réseau secondaire sinueux à souhait, je ne tarde pas à m’en apercevoir : l’ancienne Tracer était remarquable de vivacité sur les changements d’angle ; la nouvelle demande plus d’implication, plus d’effort sur le guidon. Ça n’en fait pas un camion, mais la moto est moins joueuse, plus typée GT. Je n’y vois pas un défaut. Plutôt un parti pris, en cohérence avec la vocation routière de l’engin. Et puis de toute façon, rapidement, l’envie de jouer me sort de l’esprit. Sur un revêtement ni plus ni moins dégradé que ceux que l’on rencontre sur le réseau français, ma Tracer se met à se tasser sur ses changements d’angle, à se relever à la prise de frein. Beaucoup plus désagréable : les Dunlop Sportmax D222 de première monte pèchent par un gros manque de grip. L’arrière notamment, qui décroche lorsque je sollicite la pédale de droite avec un tout petit peu d’insistance. Ces pneus, c’est, à mon sens, le gros point noir de cette nouvelle Tracer. Un point noir d’autant moins excusable qu’ils équipaient déjà et avec peu de brio la précédente version. L’amortissement attire moins la critique : il y a des progrès (à l’accélération, la moto se tasse moins sur son amortisseur arrière), mais on retrouve tout de même encore les travers de la première Tracer, notamment cette fourche qui a toujours tendance à pomper. La fermer en hydraulique permet d’améliorer un peu les choses, mais on reste loin des prestations offertes par les suspensions de la récente MT-09 SP, une machine sur laquelle Yamaha a consenti à mettre du vrai beau matériel, pour en transfigurer le comportement. Mine de rien, la voici la réponse à notre question...