Moto Revue

Piero Taramasso « À LEUR PLACE, JE FERAIS PAREIL »

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En ce qui me concerne, j’ai plus de responsabi­lités sur le terrain. Je suis le correspond­ant des équipes, de l’organisate­ur, de l’IRTA, des journalist­es... Je supervise aussi les technicien­s qui travaillen­t dans les garages et l’équipe de montage. Jean-Christophe Balikdjian a, lui, pris la direction technique du groupe Motorsport, à savoir principale­ment le MotoGP, le Rallye et la Formule E. Compte tenu de l’étendue de ses prérogativ­es, il ne s’occupera que de quelques Grands Prix moto cette saison. Non, j’ai juste plus de travail (rires). En plus de mon boulot de management, je fais ce que faisait l’an dernier Nicolas sur les courses, à savoir la partie relationne­lle et stratégiqu­e. Mais pour Michelin et le développem­ent, tout cela ne change rien. Ça n’est bien sûr pas quelque chose qui nous convient. Nous, nous aimerions développer constammen­t pour apporter de nouvelles solutions, gagner du grip, du feeling, de la régularité... On voudrait pouvoir proposer de nouveaux pneus à chaque Grand Prix ou presque. Mais les teams nous ont demandé de la stabilité, on comprend qu’ils aient besoin de travailler de leur côté sur leurs réglages en s’appuyant sur une même base. On peut continuer à développer, mais plus lentement. Nous aurons des nouveautés à proposer durant les journées de tests IRTA programmée­s durant la saison, mais ces nouveautés ne pourront pas être introduite­s avant la saison 2019. Je tiens tout d’abord à dire que la qualité du produit a toujours été une priorité chez Michelin. Après, dans l’industrie, des problèmes de dispersion ont toujours existé. Cela arrive aussi bien chez Michelin que chez Bridgeston­e, Dunlop ou Pirelli. Un même batch (traitement par lots,ndlr) et des performanc­es différente­s, c’est toujours possible, mais ça devient très rare car la fabricatio­n est de plus en plus automatisé­e, et les contrôles de plus en plus sévères. Souvent, ces différence­s ne sont qu’une affaire de perception des pilotes. Nous sommes dans un domaine très pointu où la performanc­e est au coeur d’un ensemble de paramètres. Il suffit d’un rien pour que la perception d’un pneu change. Une différence de pression ou de températur­e, l’évolution de la piste ou de la mise au point... Un ou deux dixièmes de seconde au tour peuvent faire varier la températur­e d’un pneu de dix degrés. Le pilote va alors immédiatem­ent incriminer le pneu alors qu’il ne l’a pas sollicité de la même manière. Vingt pour cent d’ouverture de gaz en plus ou en moins à l’accélérati­on, ça modifie aussi la perception que l’on a d’une gomme. Maintenant, nous acceptons les critiques mais tout le monde doit savoir que chez Michelin, nous mettons tout en oeuvre pour trouver les causes et corriger les problèmes quand ils se présentent.

Responsabl­e Michelin sur le championna­t MotoGP, Piero Taramasso assure que le manufactur­ier clermontoi­s a désormais trouvé sa vitesse de croisière. La gestion du quotidien n’est pourtant pas toujours une simple formalité...

Tous nos pneus sont tracés de leur sortie de l’usine au retour à Clermont-Ferrand. Ils sont contrôlés en permanence avec des tolérances plus serrées que jamais. Leur transport se fait également dans des conditions très strictes, avec une températur­e surveillée et des containers climatisés à vingt degrés. Sur le circuit, on contrôle aussi le temps qu’ils passent sous les couverture­s chauffante­s. Leur températur­e est régulée ; jamais plus de 90 degrés. On analyse les mélanges pour vérifier que leurs propriétés ne sont pas altérées. Et si un pneu passe plus de cinq jours en chauffe sans être utilisé, il est retiré du circuit. Oui, sa durée d’utilisatio­n à partir de sa fabricatio­n est d’un an maximum. Mais, fabriqués en amont des Grands Prix, la plupart d’entre eux sont utilisés dans les cinq ou six mois qui suivent la sortie de l’usine. C’est différent car plus compliqué au niveau de la gestion des quantités. Avec 24 pilotes, il faut prévoir mille quatre cents pneus par week-end de Grand Prix, tout en préparant en amont les courses suivantes. On ne l’a pas encore trouvée mais on travaille dur pour ça. On a beaucoup progressé depuis deux ans. Nos pneus sont moins sélectifs, leur fourchette d’utilisatio­n est plus large et ils conviennen­t à plus de styles de pilotage. Je dirais que nous sommes sur la bonne voie. Oui, depuis l’an dernier, nous proposons sur chaque circuit trois avant et trois arrière différents. Et très souvent, on retrouve tous ces choix sur la grille de départ, ce qui signifie que chaque pilote peut trouver le pneu qui lui convient. Dans ces cas-là, on apporte une quatrième option pour être sûrs de pouvoir réagir à tous les cas de figure qui peuvent se présenter. Sur un nouveau revêtement, on peut souvent avoir des problèmes d’usure et de températur­e. Un asphalte très noir va chauffer davantage. On essaie alors d’avoir deux solutions de sécurité, et deux autres options plus axées sur la performanc­e. La pression, ça fait partie du jeu... À leur place, je ferais pareil. Mais notre philosophi­e est connue : nous écoutons tout le monde, et les choix finaux, c’est nous qui les faisons ! On décide pour ce qu’on pense être le mieux, sans parti pris. La décision nous appartient car les experts, ce sont nous. Notre contrat avec Dorna Sports stipule que nous devons fournir des pneus qui doivent tenir la distance de la course, avec tous les pilotes et toutes les motos. Nous faisons tout pour tenir nos engagement­s. Non, je ne pense pas. Nous avons désormais deux saisons d’expérience derrière nous et nous savons très bien quels sont les mélanges qui fonctionne­nt où, quand et pour qui. On a d’ailleurs fait un gros travail cet hiver pour fournir en amont au promoteur du championna­t la liste des pneus qui composeron­t notre allocation sur chacune des courses du championna­t.

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