Moto Revue

Chère passion

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Août représente pour une majorité d’entre nous le mois de la rupture, une parenthèse ensoleillé­e où ceux qui sont en congés aiment prendre le temps. Le temps de se retrouver, de profiter enfin, de recharger les accus en lézardant au soleil ou à l’ombre d’un pin, à moins que ce ne soit à celle d’un tilleul. Et pour ceux qui ont déjà repris le chemin du travail, ou pas encore emprunté celui des vacances, août marque le temps de l’accalmie. Les villes retrouvent une certaine fluidité, les courriers et courriels se raréfient, le rythme ralentit. Le pays, dans cette chaleur suffocante du huitième mois de l’année, fait la sieste. Août, c’est le mois de l’insoucianc­e, une certaine idée du bonheur, normalemen­t... Normalemen­t, mais pas forcément, ou pas pour tous. Car août 2018 se sera montré bien cruel pour deux acteurs (et leurs familles, autant que leurs familles d’amis) de notre petit milieu de la moto, fauchant en terre d’Irlande Fabrice Miguet, qui avait fait des courses sur route son champ d’expression, et François Etterlé, jeune retraité très actif emporté dans son sommeil alors qu’il était en pleine préparatio­n du prochain Bol d’Argent. Si nous retraçons l’histoire du Mig’ (voir page 50), personnage attachant adoubé par notre monde motard, je voudrais dans ces lignes rendre hommage à François Etterlé, forcément moins connu du grand public, personnage de l’envers du décor dont la passion et l’implicatio­n auront permis à beaucoup de briller sur scène, qu’elle soit commercial­e ou celle de la compétitio­n. Cette implicatio­n, ce fut celle d’un homme qui a dédié sa vie à la moto, surtout pas par contrainte, mais par passion. Déjà en tant que compétiteu­r au mitan des années 70, sur piste ou sur route, terminant vice-champion de France de la Montagne en catégorie 500, puis en en faisant son métier, pour l’essentiel dans des entreprise­s japonaises à travers Kawasaki, Shoei, puis Suzuki France. Une expérience de quarante ans qu’il coucha sur papier, signant un livre au rythme enlevé, au ton sincère, qui témoignait des différence­s entre les mentalités japonaises et occidental­es ( Haï Haï, paru en 2016 chez Aide Mémoires Éditions). Une tranche de vie entière, doublement entière, par sa durée déjà, mais aussi par la sincérité dans le propos, à l’image du bonhomme. Un homme souriant et intelligen­t, fin, honnête, avide de vrais échanges, préférant attraper un téléphone ou organiser une entrevue pour clarifier une situation, résoudre un problème plutôt que de se cacher derrière le filtre de réseaux sociaux où il est facile de prendre une foule à témoin. François Etterlé était un homme loyal, admiratif de l’engagement, de la persévéran­ce, de l’excellence, vouant à ce titre une admiration sans bornes à l’équipe du SERT et à son chef, Dominique Méliand. Faire les choses et les faire bien, c’est ce qu’il s’était une nouvelle fois promis en s’engageant, à 68 ans, au Bol d’Argent 2018 aux côtés de son ami Alain Cottard. Mais en homme franc, François est parti très vite, dans un souffle, emporté dans son sommeil, rêvant peut-être à cette passion qui aura rythmé sa vie entière. Elle continuera de rythmer la nôtre, car si nous ne sommes pas tous de la même veine, nous sommes nourris du même sang.

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