Essai dynamique L’ÉQUILIBRE
En poussant la porte d’un concessionnaire Benelli, vous serez sans doute frappé par le gabarit de la TRK. Massive, elle semble disproportionnée à cause de sa petite roue avant, et n’est pas mise en valeur par ses coloris unis. En version X, en revanche, c’est tout le contraire ! Équipée d’une roue avant de 19’’, d’un silencieux relevé en position latérale, dynamisée par des coloris éclatants, cette moto est transfigurée, on pense plus à une Ducati Multistrada 950 qu’à une Honda CB 500 X : la TRX 502 X est incontestablement valorisante, cela agit sur l’inconscient car, au moment de prendre la route, on ne part pas dans l’esprit de découvrir une moto de débutant. D’ailleurs, bien que très modestes, les responsables de la marque ont une telle confiance dans leur produit qu’ils nous avaient concocté un itinéraire exigeant fait de dizaines de kilomètres de chemins blancs et de routes ultra-sinueuses, piégeuses, défoncées, sans grip, caractéristiques des collines de la province de Pesaro et Urbino. Et pour ne rien gâcher, les ouvreurs de notre petite troupe – pilotes de développement de la marque – connaissent le coin par coeur et impriment un gros rythme d’entrée de jeu.
Routière de bon niveau
C’est ainsi que, perché sur sa colline, le village de Montegridolfo, point de départ de notre balade, oppose à la TRX ses ruelles étroites, parfois pavées ; la Benelli fait oublier son poids et se laisse guider sans difficulté. La gestion de la poignée de gaz est onctueuse et pas trop directe, c’est agréable. La position de conduite est relax, la large selle pilote offre une belle latitude à son occupant qui est installé à une hauteur modérée (84 cm), le grand guidon est proche du buste, le réservoir est plutôt fin à l’entrejambe, l’embrayage est souple et le freinage pas trop violent : la TRK X est un peu large avec ses protections latérales proéminentes mais elle s’adapte parfaitement à la ville. Elle s’y fait oublier. Pas le temps de s’assoupir, les
De trail grand voyageur, de plus de 300 cm³, équipé de jantes à rayons pour sortir des routes goudronnées, il n’y en a pas à moins de 9 000 € : voyons si la TRK 502 X fait le job pour un prix contenu.
premiers lacets s’annoncent et le rythme augmente un peu. Le bitume dégradé est efficacement digéré par les suspensions souples, la Benelli se laisse balancer d’un virage à l’autre sans trop d’effort et demeure d’un bloc. La tenue de route inspire confiance même à bon rythme, nous autorisant à employer le terme de « toucher de route ». Les racines italiennes sont bien là. On peut même tenter l’arsouille, à condition de garder l’efficace petit twin au-dessus de 5 500 tr/min, régime nécessaire à extraire l’engin des virages avec un minimum de force. Le limiteur intervient au-dessus de 9 000 tr/min mais inutile de pousser, il ne se passe rien de plus au-delà des 8 000 tr/min. La plage de régime est donc réduite mais ce n’est pas un problème car la boîte de vitesses facile et bien étagée accepte les passages à la volée, sans faux points morts. Il faut attaquer assez fort pour trouver les limites de la moto : le freinage n’est ni très mordant, ni très puissant, mais il fait le job, la béquille centrale frotte allègrement et sur l’angle, les suspensions peinent à digérer les irrégularités de la route ; la moto peut rebondir. Cependant, c’est aussi le cas de la totalité des machines de ce prix, qui ne disposent jamais d’éléments de suspension très haut de gamme : on lui pardonne, donc. Mais au fait, connaissez-vous l’une des significations de la lettre X appliquée à la TRK ? Le fait de pouvoir, à la croisée des chemins, emprunter une piste plutôt qu’une voie bitumée ; au sens propre comme au sens figuré, d’ailleurs... et notre ouvreur semble aimer sortir de la route.
Un X, mais pas de cinéma !
Sans prévenir, d’un coup de clignotant à Leds, nous voilà lancés à bonne allure sur l’une des nombreuses voies non bitumées qui relient les parcelles agricoles mouchetant de couleurs ce magnifique paysage fait de collines et de trouées qui laissent entrevoir le bleu de la mer Adriatique. Dans cet environnement, la partie-cycle est une merveille de stabilité, la direction précise, les nouvelles suspensions gomment les trous, le freinage dosable n’est pas violent pour un sou, un plus lorsqu’on roule ABS déconnecté (bouton accessible au pouce gauche) ; le moteur onctueux n’effraie pas et offre suffisamment de traction à bas et mi-régimes pour cet usage. On contemple, on s’évade… En position debout, la moto est un peu large au niveau des bottes, on la contrôle avec les malléoles plutôt qu’avec les jambes, mais le réservoir ne gêne pas trop et le guidon
est plutôt bien positionné, même si un rehausseur ferait merveille (c’est aussi le cas sur une Africa Twin standard, par exemple). Sous réserve de se cantonner aux chemins roulants, donc, vu le poids, et de ne pas tenter de gros excès vu le manque de débattement de la fourche, la TRK 502 X se montre rassurante pour les novices en off-road light. Elle permet même aux plus aguerris de notre groupe de franchement s’amuser à grands coups de dérives et de travers, au freinage comme à l’accélération. Plus loin, à Saludecio, nos guides proposent une halte dans un petit café typique où Valentino a dû s’arrêter puisqu’il est originaire de la région (Tavullia est à moins de 15 km). Des photos dédicacées par la légende vivante décorent les murs, les miniatures de toutes les motos du champion sont exposées… les locaux apostrophent les membres du staff et s’enquièrent des TRK 502 X qu’ils détaillent de leur oeil connaisseur, ils sont fiers de la marque et considèrent visiblement que les Chinois la relancent sans en trahir l’esprit. D’ailleurs, l’Italie est le premier marché de Benelli, suivi de l’Espagne et de l’Allemagne… C’est l’heure pour nous de dresser un rapide bilan. Sur ces routes défoncées et mal entretenues, la TRK 502 X fait merveille, elle encaisse tout et permet de profiter du paysage sans aucune retenue dans un niveau de confort de protection assez remarquable pour le tarif demandé : une vraie réussite !