Haute technologie
Tour d’horizon des technologies adaptées aux motos du futur proche en matière d’interactivité
Le futur de la moto sera connecté et l’interactivité quasi totale. Les constructeurs et les instances européennes en ont décidé ainsi pour réduire les accidents. Reste à savoir si nous aurons toujours la main sur nos guidons pour que le plaisir reste intact.
Rendre les routes plus sûres sans diminuer le plaisir de faire de la moto ou changer sa nature, c’est ce que nous voulons réaliser » , a déclaré Geoff Liersch, responsable de l’unité Two Wheeler & Powersports chez Bosch. S’appuyant sur une étude (réalisée par ses soins sur des motards allemands) qui révèle que 90 % des motocyclistes utilisent un smartphone à un moment ou à un autre de leur voyage – pour par exemple, planifier leur parcours ou leurs arrêts – et que plus d’un tiers (34 %) des personnes interrogées utilisent leur smartphone directement pendant le voyage, Bosch a développé un outil d’intégration de ces derniers dénommés mySPIN. Déjà présent dans l’auto, ce procédé, couplé à une centrale (Integrated connectivity cluster), permet de connecter l’écran de la moto à celui du téléphone, mais en faisant un tri dans les applications et les notifications, pour ne retenir que celles essentielles au voyage, le tout paramétrable depuis le guidon. KTM et Ducati ont déjà annoncé avoir recours à cette technologie sur certains de leurs prochains modèles. Toujours selon Bosch, un accident sur sept pourrait être évité grâce à un système de détection des collisions. L’association d’un capteur radar, du système de freinage, de la gestion du moteur et d’une interface entre le pilote et la moto permettrait en cas d’obstacle imprévu ou autre ralentissement un temps de réactivité plus rapide. Ainsi ce régulateur adaptatif règle-t-il la vitesse de la moto en fonction de la circulation et maintient la distance de sécurité nécessaire. Si le système détecte qu’un autre véhicule est dangereusement proche et que le pilote ne réagit pas à la situation, il le prévient par un signal acoustique ou optique. Ce système surveille également dans toutes les directions pour aider les motards à changer de voie en toute sécurité.
Prise de contrôle par intelligence artificielle
Bosch n’est pas la seule société à travailler sur ce système voulu par l’Union européenne, qui a planifié son obligation dans les futures automobiles à court terme. Ce qui, par effet domino, devrait également arriver sur les motos dans un futur proche. Continental
est également très avancé sur ce sujet. « Contrairement aux occupants des voitures, la protection passive telle que celle offerte par les airbags n’est possible que dans une mesure très limitée pour les motos. Pour cette raison, la prévention des accidents revêt une importance capitale pour les véhicules à deux roues en particulier » , déclare Christian Pfeiffer, responsable de projet ARASTM pour la zone des 2-roues et des sports motorisés chez
Continental. Il poursuit : « Contrairement aux voitures, les motos sont très exposées aux facteurs environnementaux tels que le vent, les conditions météorologiques et l’état de la route, ce qui rend la conduite plus difficile. De ce fait, les conducteurs se retrouvent plus souvent dans des situations dans lesquelles ils ont du mal à estimer la vitesse des autres usagers de la route. L’assistance au freinage d’urgence pour les motocycles est donc essentiellement de nature indicative. Il attire l’attention du pilote sur les situations critiques. » Mais si, dans l’automobile, les systèmes en place stoppent brutalement dès qu’il y a un problème, Christian Pfeiffer nuance son propos en ce qui concerne la moto : « L’objectif est d’initier un processus et que le pilote prenne le relais. Cela raccourcit le temps de réponse, ce qui peut réduire considérablement la distance d’arrêt. » Et donc les accidents. Ainsi les capteurs radar à courte et longue portée de Continental sont-ils devenus encore plus précis et puissants avec la cinquième génération, qui entrera en production à partir de 2019. Ils utilisent des algorithmes
de détection d’objets améliorés, capables d’identifier des objets encore plus petits, tels qu’un échappement tombé sur la route. Les fonctions supplémentaires proposées par Continental pour les véhicules à deux roues sont nombreuses : la détection des angles morts, l’assistance des panneaux de signalisation et l’assistance intelligente des phares. La détection d’angle mort surveille la zone située derrière la moto au moyen d’un capteur radar à courte portée et avertit le conducteur des véhicules se trouvant dans l’angle mort s’il a l’intention de changer de voie. L’aide aux panneaux de signalisation utilise une caméra pour enregistrer les limitations de vitesse, les dépassements et les restrictions d’entrée dans les rues à sens unique et les indique au conducteur. Continental propose également aux constructeurs de petites cylindrées le nouveau module M4L. Derrière ce nom, comme l’explique Torsten Bellon, responsable des systèmes d’injection pour les deux-roues motorisés chez Continental, « un microprocesseur est ajouté à la moto. Il peut être utilisé pour autre chose que la gestion du moteur. Nous avons profité de cette opportunité pour développer constamment le système afin d’offrir une meilleure connectivité. Grâce à cette fonctionnalité supplémentaire, notre système M4L contribue à préparer les motos aux futures normes d’échappement et aux exigences de connectivité » . Le prototype d’application développé par Continental permet aux conducteurs d’afficher leur vitesse moyenne ou leur consommation moyenne à l’aide d’un smartphone, par exemple, ou de constater les problèmes grâce au système de diagnostic embarqué. En outre, l’application peut également offrir une fonction de clé pour faciliter le démarrage. L’Inde et les pays d’Asie où le trafic est dense, les infrastructures moins bonnes, et le recours aux deux-roues motorisés est un moyen de locomotion peu onéreux, sont bien évidemment les marchés ciblés, avec de nombreux constructeurs qui ne bénéficient pas du savoir-faire technique en la matière. Si certains grands constructeurs développent leurs propres solutions, KTM et Ducati ont annoncé avoir recours à certaines technologies de ces deux multinationales allemandes fondées au XIXe siècle, qui en quelques dizaines années se sont imposées comme leaders sur l’ABS. Un système devenu obligatoire. Elles ne sont pas pour autant les seules à plancher sur les assistances électroniques pour réduire
les accidents. Triumph a dévoilé cette année une nouveauté dans ce domaine avec un système de contrôle de caméra GoPro. Via un module de connectivité Bluetooth ,
® caméra et écran TFT se connectent afin de commander la caméra directement sur le tableau de bord. La vision n’est pas faite pour être regardée directement mais pour faciliter l’enregistrement. Mais il est aisé d’imaginer une diffusion en direct. Surtout que la marque anglaise s’est également associée à Google pour que la navigation de Googlemaps s’affiche sur l’écran des Triumph.
Caméras, capteurs, connectivité et plaisir
Une fois l’itinéraire sélectionné sur l’application Triumph, les indications de direction s’affichent sur l’écran du tableau de bord sous la forme d’icônes simples. Navigation, calculateur d’itinéraire et points d’intérêt, comme les hôtels, les stations-service et les restaurants. Un autre géant du Web et de la téléphonie s’intéresse à cette interactivité et à la connectivité. « Chez Samsung, nous sommes conscients que l’innovation peut jouer un rôle clé car elle permet de réaliser des projets révolutionnaires ayant un impact direct sur la vie » , explique Francesco Cordani, responsable de la division Marcom chez Samsung Electronics Italia. Ainsi est né le projet Smart Ride, en partenariat avec Energica (marque de motos électriques italienne qui va fournir les machines pour la Coupe du monde FIM Moto-e). Une montre Galaxy Watch se connecte à la moto et permet de consulter le niveau de la batterie, l’autonomie, la position de la moto. Il est également possible d’afficher en temps réel la consommation moyenne, mais aussi la puissance fournie, des informations sur le trajet, les performances du véhicule (vitesse, couple, puissance, tours/minute), et même d’activer le klaxon pour localiser ou dissuader les criminels. Smart Ride va plus loin également avec l’installation d’une caméra à l’arrière dont les images sont restituées en temps réel sur deux écrans positionnés en remplacement des rétroviseurs. Bien que toutes ces solutions tombent sous le coup des lois sur le traitement des données et de la confidentialité, espérons que cet assistanat, sous couvert de réduire les accidents – une cause bien évidemment noble –, n’entachera pas le plaisir de rouler librement. n