Moto Revue

Marquez Un peut en cacher un autre

En enchaînant deux podiums au Mans et en Aragon, Alex Marquez a rappelé à tout le monde que Marc avait un frère. Champion du monde Moto3 et Moto2, le cadet de la fratrie espagnole compte bien encore faire parler de lui.

- Par Michel Turco, LBSM. Photos Jean-Aignan Museau.

Le 25 octobre, pour la première fois de la saison, Alex Marquez n'est pas passé sous le drapeau à damier. L'Espagnol est tombé à dix tours de l'arrivée du Grand Prix de Teruel. Parti dixième, il occupait alors la quatrième place d'une course où il imaginait enchaîner un troisième podium d'affilée. « C'est de ma faute, a-t-il reconnu. J'ai perdu du temps derrière Zarco, et quand j'ai fini par passer, je me suis trop précipité pour rattraper Mir. C'est une erreur de débutant qui me rappelle que j'ai encore pas mal de choses à apprendre. Notamment à savoir être patient. » Alex sait aussi qu'il doit faire mieux aux essais pour ne pas avoir à prendre autant de risques en course. « Je dois progresser en qualificat­ions pour me retrouver mieux placé sur la grille car la course n'est

qu'une conséquenc­e des essais », analyse-t-il. Quoi qu'il en soit, depuis la première saison triomphale de son frère en 2013, plus aucun pilote Honda débutant n'avait réussi à monter sur un podium MotoGP. Le cadet des Marquez y est déjà parvenu à deux reprises. Mieux que ça, Alex a offert au HRC son premier podium de la saison. Pas question pour autant de se voir en sauveur du premier constructe­ur mondial. « Ces deux podiums sont simplement la récompense du travail réalisé depuis le début de l'année, confie l'Espagnol. J'y ai toujours cru, j'ai toujours fait en sorte de progresser. Honnêtemen­t, je n'ai rien changé à mon quotidien avant d'obtenir ces deux résultats. Ma méthode et ma façon de travailler sont toujours les mêmes. Je dirais juste que la journée de test que nous avons pu faire entre les deux courses à Misano m'a aidé à accélérer ma progressio­n. Entre la dernière séance d'essais au Qatar, fin février, et le premier Grand Prix à Jerez fin juillet, je n'avais pu faire aucun essai. Pour un Rookie, rester quatre mois sans rouler, ce n'est pas évident. Les autres débutants (Binder et Lecuona) ont pu, eux, faire des essais avec KTM, grâce aux concession­s dont bénéficie ce constructe­ur. Voilà pourquoi cette journée à Misano était pour moi importante. Elle m'a permis de rouler sans pression, en prenant le temps d'essayer pas mal de solutions différente­s sur la moto. J'ai pu aussi travailler sur mon pilotage dans des virages particulie­rs. Des choses qu'il est difficile de faire sur un week-end de course. Tout cela m'a procuré un supplément de confiance. »

Au Mans, sous la pluie, Alex est remonté de la dix-huitième à la deuxième place. Un exploit qui n'a pas fait tourner la tête au pilote Honda Repsol, ce dernier déclarant alors : « Un podium sur le mouillé, ça ne veut pas dire grand-chose. J'estimerai avoir vraiment progressé lorsque je serai capable d'obtenir le même résultat sur le sec. » Ce qu'il a fait le week-end suivant. Pourquoi autant d'humilité ? « Ça n'était pas de l'humilité, juste du réalisme. À ce momentlà, j'étais conscient de ne pas encore avoir le niveau pour être un réel candidat au podium.

«Les critiques me poussent à progresser»

Courir sur le mouillé, c'est particulie­r... La performanc­e est liée aux conditions, au feeling que tu peux avoir avec la moto, le tracé, le grip de la piste... Après, je ne vais pas vous dire que cette deuxième place m'a laissé insensible. Un premier podium, ça donne de la confiance. Et ça enlève un peu de pression. » Le résultat ne s'est pas fait attendre. Dès le week-end suivant en Aragon, Marquez a décroché une nouvelle deuxième place. Après s'être, cette fois, élancé

de la onzième place de la grille de départ.

« Je savais que j'étais dans le coup. Par ailleurs, mon technicien Michelin m'avait expliqué après les essais que j'étais l'un de ceux qui tapaient le moins dans les pneus. Pour lui, il était évident que je pouvais finir la course sur un bon rythme. Ça m'a libéré pour le départ, j'ai pu attaquer d'entrée sans me soucier de l'usure des pneus. J'ai pu me concentrer et m'appliquer sur mon pilotage du premier au dernier tour. Le fait d'avoir obtenu un premier podium au Mans m'a aussi aidé à prendre un peu plus de risques... »

Peut-être un peu trop pour la deuxième course organisée sur le circuit d'Alcañiz. Qu'à cela ne tienne, Alex a fait taire les moqueurs et les imbéciles qui ne voient en lui qu'un pilote qui doit tout à son frère. « J'ai toujours fait en sorte de ne jamais donner d'importance aux critiques, assure-t-il. Mieux que ça, les critiques me motivent pour continuer à travailler et à progresser. C'est pour moi un moteur. Dans le fond, je suis plutôt “Peace & Love”. Je me moque de ce qu'on peut raconter à mon sujet. Je ne me suis jamais pris pour un autre. Je sais où j'en suis et je sais où je veux aller. Je suis lucide quant aux progrès que je dois réaliser. » Même s'il n'est pas encore là où il souhaite arriver, Alex commence aujourd'hui à dompter une Honda avec laquelle un bon paquet de pilotes n'a jamais réussi à obtenir le moindre résultat. « C'est une moto très exigeante pour le pilote, explique le cadet des Marquez. En premier lieu, il faut vraiment être affûté physiqueme­nt. J'ai la chance d'avoir Marc à la maison. Il m'a beaucoup aidé à me préparer à mon passage en MotoGP en me faisant travailler physiqueme­nt. Il connaît la Honda mieux que personne, et il sait exactement comment elle sollicite le pilote. Étant plus grand et plus fin que lui, j'ai ainsi ciblé mon entraîneme­nt en me renforçant sur des points spécifique­s. Pour le reste, la Honda demande un pilote complet et bon partout. Sur une Yamaha, il faut être capable d'exploiter la vitesse de passage en courbe, sur une Ducati l'accélérati­on... Sur une Honda, il faut être bon au freinage, au point de corde, comme à la sortie du virage. C'est une machine avec laquelle il faut toujours être à cent pour cent. Dès que tu relâches un peu, c'est mort. Quand, avec une autre moto, tu vas perdre deux dixièmes, avec la Honda, tu vas en perdre sept. C'est pour ça que c'est une moto qui n'est pas évidente pour un débutant en manque d'expérience. » Et à ce titre, l'aide de Marc n'est pas inutile. « Il me donne toujours des conseils. Il sait mieux que tout le monde comment cette Honda doit se piloter. Et il me connaît aussi très bien, il sait quoi me dire et comment faire passer ses messages. Mais bon, c'est facile de dire : “Freine plus tard, tourne plus vite et accélère plus tôt”. Il faut être capable de mettre tout ça en pratique en roulant à plus de 300 km/h. Les conseils sont importants, mais la façon dont on les reçoit encore plus. » Quant à son passage en fin de saison dans l'équipe Honda LCR, Alex a décidé de ne pas le vivre comme un déclasseme­nt. Bien au contraire. « Cette décision ne change rien à ma relation avec le HRC avec qui je reste sous contrat. Je sais que j'aurai l'an prochain la même moto, les mêmes évolutions, le même soutien... Je prends ça comme une étape dans ma formation de pilote MotoGP. Je vais pouvoir continuer à apprendre avec un team qui a fait ses preuves, dans une ambiance certaineme­nt plus familiale, et tout ça, avec moins de pression. Ça m'aidera par la suite à revenir encore plus fort dans le team Honda Repsol. »

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Dans la famille Marquez, je suis, je suis... Alex ! Après ses résultats au Mans et en Aragon, le frère de Marc a changé de statut.
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Une magnifique remontée de la 18e à la 2e place, Alex nous a régalés.

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