Aprilia RS 660
Le segment des routières sportives voit arriver avec cette italienne de moyenne cylindrée une machine séduisante et très bien conçue
On la trouvait déjà mignonne sur les podiums des salons, elle nous a définitivement conquis sur les routes d’Italie. Belle et intelligemment construite, l’Aprilia RS 660 portée par un inédit twin parallèle de 100 chevaux investit avec classe et dynamisme le segment des routières sportives. Le sport serait-il de retour ?
Élégance, agilité, facilité, confort, caractère, équipement, placement tarifaire, ce n’est pas tous les jours que nous arrive en essai une moto réunissant autant de qualités. Évidemment, elle n’est pas la seule à porter en elle toutes ces alléchantes aptitudes sauf que la concernant, s’y ajoute une belle pointe d’audace puisque la RS 660 s’oriente vers un marché dit « délaissé ». Oui, délaissé. Par les constructeurs d’abord, par les utilisateurs ensuite, à moins que ça ne soit l’inverse... Toujours est-il qu’effectivement, se revendiquer « sportive de route » de nos jours, c’est tout sauf l’assurance de participer activement aux bénéfices de ses actionnaires ! Mais au fait, c’est quoi une « sportive de route » ? Exit les hypersports de 200 chevaux, celles-ci ne sont pas pour tes p’tits bras et même si ton banquier te suivait dans le financement de la belle, tu n’y pourrais rien face à ton assureur ! Tu as 30 ans et plus ? Tu n’es pas concerné par la réforme A2 ? Alors peut-être as-tu une chance mais vérifie quand même la tonicité de tes bras (et de tes lombaires) avant de te lancer... Soyons francs : une hypersport sur la route, si elle est effectivement habilitée à y évoluer, vu la radicalisation du parc, mieux vaut l’oublier. À l’inverse, la « sportive de route » doit faire montre d’un minimum de polyvalence, tout en préservant son pilote, tant physiquement que psychologiquement. Une moto qui ne jouera pas aux osselets avec nos vertèbres ni ne viendra déclencher les sirènes de la peur à la moindre remise des gaz, donc.
183 kilos pleins faits, c’est plutôt très bien
100 chevaux, c’est bien. Si, bien sûr que c’est bien, c’est largement suffisant en toutes circonstances quoique l’on en pense. Évidemment, si on leur impose de devoir tirer 400 kilos de marchandise, ça va faire juste mais dans le cas d’une moto affichant moins
de 200 kilos remplie de tous ses fluides et prête à prendre la route, c’est plutôt engageant. La RS 660 cube exactement 658,86 cm3, revendique 100 chevaux à 10 500 tr/min et jusqu’à 6,83 mkg de couple au régime de 8 500 tr/min pour une masse totale et avec les pleins de 183 kilos. Globalement, il n’y a pas de quoi s’extasier, les rapports poids/puissance et poids/couple n’étant pas complètement dingues. Cela dit, 183 kilos tous pleins faits, c’est un très bon point lorsqu’on le compare au poids de certaines de ses concurrentes, telles la Ducati SuperSport
(110 ch, 12,5 mkg et 210 kg tous pleins faits), la Honda CBR 650 R (95 ch, 6,3 mkg et 208 kg
tous pleins faits), la VFR 800 (106 ch, 7,5 mkg et 239 kg tous pleins faits), voire la Kawasaki Ninja 650 (68 ch, 6,5 mkg et 193 kg tous pleins faits)... Mais la RS 660 ne s’arrête pas à ces quelques bons chiffres puisqu’en plus de recevoir un inédit twin parallèle doué d’un rendement plus qu’intéressant, elle se met en valeur par bien d’autres biais. À commencer par sa plastique élancée, emprunte de légèreté et aux lignes dynamiques. Associée à la triplette d’optiques avant, la RS 660 insiste sur sa filiation avec la RSV4. Signe que chez Aprilia, on n’en a pas encore fini avec ce fameux design. L’inspection visuelle relève un niveau de finition qui régale. Pour ce qui est des équipements, là encore, la RS 660 se défend mieux que bien avec notamment une dotation électronique flatteuse (afficheur TFT couleur, Quickshifter up & down, régulateur de vitesse, feux de virage, modes moteur multiples incluant les réglages de sensibilité à la poignée, du contrôle de motricité, de l’antiwheeling et du frein moteur). Demi-guidons ouverts et placés au-dessus du té supérieur, selle confortable, triangle guidon/selle/reposepieds franchement excellent, gabarit d’ensemble parfaitement calibré, en plus d’être craquante à l’oeil, cette RS 660 sait recevoir.
Une mécanique plus que recommandable
Oui, ça sent le sport mais ça ne prend pas au nez non plus, il n’y a qu’à s’attarder sur les 820 mm de hauteur de selle et le moelleux de celle-ci. La sonorité du twin parallèle nous plonge dans une ambiance dynamique, ceci par son timbre très typé... V-twin ! Cela nous vient du calage à 270° plébiscité par Aprilia.
Si le levier d’embrayage (non réglable) ne se destine pas aux petites mains, la progressivité du mécanisme est excellente et l’engin décolle donc en toute facilité. On perçoit immédiatement les très bonnes prédispositions de la partie-cycle ; l’équilibre est parfait, la moto manifeste autant de légèreté qu’elle assure en stabilité, elle réagit de partout, que ce soit depuis les appuis repose-pieds, d’un léger contre-braquage et même d’un petit mouvement de hanche. En moins de trois kilomètres, on a alors saisi l’évidence servie par la RS 660, qui témoigne d’une facilité et d’une neutralité exemplaires. Tout semble lui profiter, depuis son gabarit jusqu’à l’ergonomie impeccable, en passant par le tarage futé des suspensions, la balance avant/arrière optimale ou la monte pneumatique
arrière en 180/60 x 17 (sans doute la plus judicieuse évolution pneumatique appliquée aux motos avec roue arrière de 5,5 pouces de large, c’est-à-dire presque toutes les motos routières de moyenne cylindrées). C’est certain, chez Aprilia, on a pris le temps de l’essayer et de l’optimiser avant de la commercialiser, cette pépite. En effet, il arrive encore, en 2020, d’avoir affaire à des motos... moins bien abouties. Là-dessus, la RS 660 profite d’une mécanique tout ce qu’il y a de plus recommandable. Qu’est-ce donc une mécanique recommandable, me demanderezvous ? Une mécanique facile, docile en bas et douée d’une belle progressivité d’embrayage, une mécanique qui accepte d’évoluer à faible rotation sans vous secouer les marrons, une mécanique disponible à tout moment et qui sait satisfaire un esprit taquin, celui qui recherche
envolées lyriques et mécaniques. Certes, on relève une légère flexion d’effort du twin parallèle Aprilia vers 6 000 tr/min, mais c’est pour reprendre de plus belle vers le cap des 7 000 tr/min, et nous livrer ensuite un joyeux récital de sportivité jusqu’à 11 500 tr/min ! Enfin, toutes ces caractéristiques remarquables ne le seraient sans doute pas tant si la moto n’y avait adjoint les services d’un confort exemplaire. Car la selle n’est pas loin de signer un sans-faute et la protection termine de doper le potentiel d’attraction du modèle. Et c’est en cela qu’elle mérite et interprète à la perfection ce fameux qualificatif de « sportivo-GT ».