C’est gonflé
Qu’on le veuille ou non, l’airbag moto (ou plus exactement l’airbag porté par le motard) est l’équipement de protection qui concentre le maximum d’attentions actuellement. Celle des assurances qui encouragent son utilisation en consentant des remises sur le matériel, voire des rabais sur les primes, ou (et) qui le mettent en scène et le font parfois gagner en concours. Celle de certains constructeurs de motos qui, par une dotation faite de ce matériel aux nouveaux propriétaires d’un modèle de leur catalogue, décident d’une campagne marketing ciblée. Celle de la Fédération française de motocyclisme, qui commence à le rendre obligatoire dans les compétitions de vitesse, à l’instar de la FIM ayant précédé nos instances nationales sur le sujet en exigeant depuis quelque temps du plateau Motogp (Motogp/moto2/moto3/ Moto-e) qu’il le porte. À la manière encore D’ASO (organisateur du Dakar), qui l’a imposé à tous les motards engagés sur la dernière édition disputée en janvier 2024. Celle des pouvoirs publics aussi, sensibles à ce halo entourant l’airbag, et qui peut-être pour quelques-uns l’envisagent comme certains de leurs aînés ayant réussi à une autre époque à rendre le port du casque (pour les motards) et celui de la ceinture de sécurité (pour les automobilistes) obligatoires. Qu’on le veuille ou non, donc, l’airbag est aujourd’hui dans bien des têtes, et accroché jour après jour à toujours plus de bustes… Une manière d’occuper l’espace, à l’image de ce gilet gonflable une fois déployé. À déclenchement filaire mécanique, à déclenchement autonome (par batterie) automatique, protégeant tout ou partie du torse, du cou, des épaules, des hanches et du bassin, l’airbag se diffuse sous bien des formes et autant de technologies. Une recherche soutenue qui ne se traduit pas hélas par des tests égaux – et donc impartiaux – entre fabricants, comme le montre très clairement le sujet réalisé dans ce numéro, page 40. Entre l’italie et la France qui ont pris le leadership en matière de développement de technologie airbag, chacun y fait un peu sa sauce. Peu d’études d’accidentologie d’abord, ce qui pousse les fabricants à développer leurs matériels selon leurs propres enseignements, leurs inspirations, voire leurs certitudes, et surtout, pas de normes harmonisées, mais au contraire des certifications établies pour chaque type et marque de matériel par des organismes différents. En clair, chaque airbag, en fonction de sa nationalité, aura ses spécificités de fonctionnement, de protection, sera soumis à une batterie de tests qui ne sera pas celle passée par le voisin… Forcément, ça brouille un peu le message, et si on ne conteste nullement l’efficacité de l’airbag louée par nombre d’utilisateurs lambda et par les professionnels (hors fabricants, évidemment), si on se dit que sans airbag, l’énorme « à plat dos » subi par Marc Marquez suite à la percussion de Jorge Martin lors du GP de Valence 2023 l’aurait certainement impacté bien plus douloureusement (là, il s’était relevé nickel), on ne peut que regretter de ne pas aller au bout des choses en mettant en place ces protocoles de tests transversaux qui permettraient de répondre à une même norme. Mais dans ce nouvel eldorado, c’est une sorte de loi à « l’ouest du Pecos » qui semble s’appliquer… Un peu gonflé, quoi..