Le championnat de France fait le plein…
Le championnat de France des Sables s’est ouvert le mois dernier à Berck. Avec des records d’affluence et des places qui partent aussi vite que la fonte des glaces au Pôle, on ne peut que se féliciter de la popularité de cette série, portée à bout de bras par les pilotes amateurs. Nous avons cherché à comprendre les raisons d’un tel engouement…
Si l’enduropale a toujours été la vitrine par excellence avec un nombre impressionnant d’engagés, l’épreuve était à nouveau au coeur des discussions à Berck pour la première manche du championnat
de France des Sables. « J’espère que tu as pris ton engagement ? Si tu étais en vacances à l’ouverture des inscriptions, c’est foutu ! » Et pour cause, en moins de quatre jours, les 1 200 places ont trouvé preneur, du jamais vu depuis la création de l’épreuve en 1975. Pour vous donner un ordre d’idée, il y a dix ans, deux mois environ étaient nécessaires pour trouver 900 participants. Et ceci n’est que la partie immergée de l’iceberg. Depuis quatre ans, c’est le championnat tout entier qui connaît un succès grandissant. Jugez plutôt, en 2015, les clubs fermaient leurs inscriptions quinze jours avant l’épreuve et en 2018, ils les ferment en moyenne deux mois avant le jour J. Berck a rempli toutes ses
catégories en une journée, c’est dire ! Qu’estce qui explique un tel succès alors que le calendrier n’a quasiment pas changé depuis quinze ans ? Jean-claude Moussé apporte un début de réponse, lui qui fréquente les plages
depuis plus de vingt ans : « L’arrivée des jeunes sur le championnat y est pour beaucoup. Aujourd’hui, courir Le Touquet fait rêver alors qu’auparavant, c’était un truc de vieux. Le sable s’apparentait plus à des fins de carrière. L’arrivée des jeunes a amené de la fraîcheur à la discipline. C’est un moment de convivialité où les pilotes se retrouvent et où les parents viennent pour passer un bon moment au bord de la mer. »
La mode du sable
Il faut dire qu’en ce week-end du 20 octobre, la douceur estivale qui s’étend la plage de Berck berce le paddock dans un climat de vacances des plus appréciables. Les terrasses sont pleines, les pilotes ont le sourire et mesurent la chance d’évoluer dans ce cadre. Ils sont de plus en plus nombreux chaque année à s’inscrire sur la totalité du championnat dans les différentes catégories : 190 participants en 2015, 270 en 2016, 386 en 2017 et 435 cette saison alors que la période d’inscription a été réduite à un mois. Pour trouver des explications, il suffit de se balader dans le parc-coureurs et de tailler la bavette avec les pilotes amateurs. Qu’ils soient jeunes, moins jeunes, du Nord, du Sud, sur 4-temps ou sur 2-temps, chacun trouve un intérêt à faire autant de kilomètres et bien souvent à investir toutes ses économies. Samuel Varier n’a que 18 ans et découvre pour la première fois la saison de sable. « Chez nous dans le Nord, le sable est plus populaire que le motocross. Depuis tout petit, je rêve de faire le championnat. Rouler dans le Sud sous 20 degrés en plein hiver, c’est magnifique. Ça nous donne l’impression de partir en vacances avec la bande de copains. Plus tu en fais, plus tu en veux mais à côté de ça, je passe beaucoup
d’heures au travail pour pouvoir le financer. » Au gré des rencontres, le budget est un sujet qui revient souvent dans les discussions. C’est également l’une des particularités de ce championnat qui demande un investissement conséquent, plus important que le motocross, et qui pour autant continue de séduire toujours plus. « Ça coûte clairement plus cher qu’une saison de motocross », rapporte Maxime Jeanne. Ce Normand de 30 ans s’est fait un nom dans les différents championnats de France Élite, National, d’europe, d’allemagne et du SX Tour. Son expérience l’a amené à rouler dans le sable depuis trois
ans. « Je trouve que c’est un mélange entre cross, endurance et supercross. Un peu comme le triathlon ou le marathon, c’est un sport à la mode où tu n’as pas de confrontations directes avec tes adversaires. C’est toi contre toi. La piste n’est jamais pareille d’un tour à l’autre donc on ne s’ennuie pas. On roule dans des paysages sympas et l’ambiance est cool. C’est plus convivial de rouler entre potes. Même si cela coûte plus cher, c’est plus intéressant de faire ce championnat. C’est aussi plus facile d’avoir des aides matérielles car la discipline a une certaine aura. J’ai davantage d’aides pour le sable, mais comme la saison est plus chère que pour le motocross, ça revient au même. » La popularité grandissante du sable portée par Le Touquet permet en général d’obtenir des petites aides matérielles plus facilement, même si l’on est amateur. C’est un constat que l’on remarque également chez ceux qui s’engagent sur le Dakar par exemple. Après deux saisons 100 % privé soldées par deux titres de champion de France CFS-2 (2-temps), Maxime Jeanne a été épaulé par sa copine pour trouver les 14 000 euros de budget pour la saison. Un budget qui peut varier du simple au double en fonction de la cylindrée et de l’investissement des pilotes amateurs. Champion de France SF-3 (250) en 2017, Guillaume Renaux n’a pour autant jamais sollicité d’aide malgré les 25 000 euros de budget pour cette saison-là. Cette année, le pilote mosellan de 31 ans a décidé de passer en 450 pour réduire les frais et découvrir autre chose. « Ça reste un plaisir avec mes amis et je ne veux pas avoir de comptes à rendre. À la base, je ne suis pas trop motocross mais j’avais des potes qui faisaient le sable alors, je me suis dit pourquoi pas. Il y a maintenant huit ans que j’en fais. C’est un truc entre potes, on part en vacances sur les courses, on est une petite famille, c’est ça qui me plaît. Ça n’a pas de prix d’ailleurs et c’est la raison pour laquelle beaucoup font ce championnat. Je pourrais finir troisième de ma ligue en motocross et être tout seul, ça ne m’intéresserait pas. » Ces notions de plaisir, convivialité et amis reviennent assez souvent à mesure des rencontres dans le paddock. Dimitri Beck, 31 ans, habite près de la frontière Suisse et est présent à Berck. Pour autant, une blessure au genou quelques
« Cette discipline apporte beaucoup de plaisir aux pilotes. » David Frétigné
jours auparavant a ruiné sa saison de sable. Malgré la déception, il n’a pas hésité à faire le trajet jusque dans le Nord et fera de même à Loon pour retrouver et encourager ses amis. « En motocross, on sait parfois que sur certains terrains, on ne prend pas trop de plaisir alors que dans le sable, on en prend quelles que soient les conditions. Il faut vraiment être passionné pour faire tous ces déplacements, mais on l’est tous. » Cette année, son budget était de 18 000 euros. Résidant en Rhônealpes, les frais de transport sont le nerf de la guerre : « Ils gonflent le budget chaque
année. » Alors que la fédération aimerait étendre le championnat à huit épreuves contre six aujourd’hui, l’envie ne s’éteindrait pas pour autant : « Ça risquerait de coincer au niveau du budget, mais je pense participer une fois à toute une saison. Il ne faut pas s’en faire, les grilles seront quand même pleines avec huit courses. »
Une discipline rafraîchie
Les Juniors et les Espoirs participent grandement à ce succès du championnat de France des Sables depuis la création de l’enduropale Jeune en 2011. Comme l’a souligné Jean-claude Moussé un peu plus haut, ils ont ramené de la fraîcheur sur cette discipline. Ce n’est pas David Frétigné qui nous contredira. Son fils Adrien roule chez les Juniors. « C’est un très beau championnat, médiatisé, qui met le pilote en valeur car c’est une discipline complète à tous points de vue. Ça demande beaucoup de travail sur le corps et la
moto qui permet d’apprendre beaucoup pour la suite. Pour nous, c’est un championnat court qui n’empiète pas trop sur la scolarité d’adrien. » Sur le podium du Touquet en 1999, David a lui aussi son explication sur l’explosion actuelle du championnat :
« Toutes les disciplines ont besoin de temps pour mûrir. Ce n’est pas évident de s’entraîner dans le sable et beaucoup ont hésité avant de franchir le pas. Aujourd’hui, la communication fait que ça donne envie à beaucoup de venir sur ces magnifiques plages et de pouvoir rouler avec les pilotes pros. Cette discipline apporte beaucoup de plaisir aux pilotes. » À voir le sourire des pilotes, des organisateurs, des partenaires et du public à l’arrivée des courses, on se dit que tout le monde y trouve son compte dans ce championnat et c’est tant mieux pour la suite des événements. Souhaitons que cette dynamique subsiste et perdure dans le temps. Des petites remarques ont été faites sur l’absence de primes (cas unique en FFM) et le manque de reconnaissance des seconds couteaux qui jouent le top-10 en CF-1 ou la victoire en CF-2, CF-3 et autres catégories. Explications prises auprès de la fédération, ces derniers ne souhaitent plus allouer de prime de résultats aux pilotes et répercutent cette tâche sur le club organisateur qui a libre choix du montant alloué et des catégories. À noter que cette année, c’est le promoteur qui versera une prime de championnat à la fin de la saison, c’est une nouveauté. Que l’on soit d’accord ou non, la ruée des pilotes vers le sable suffit pour se faire un avis.