L’aveyron, terre de moto et de gastronomie…
Quand la fin de la belle saison se prolonge jusqu’aux portes de l’hiver, ça donne des randos hautes en couleur. Ce fut le cas en Aveyron dans la roue d’un moniteur B.E. qui propose de beaux séjours aux confins de trois départements d’occitanie.
C’est vrai, l’été est déjà loin. Très loin. Même le super été indien qu’on a vécu de miseptembre à mi-octobre semble évaporé. Et puis bim ! Miracle de la météo, on a eu une minovembre plutôt colorée entre gilets jaunes qui fleurissent aux ronds-points et feuilles mortes qui s’accrochent encore dans les forêts de feuillus… Une sorte d’automne indien quoi ! Coup de bol, je ne suis pas resté bloqué trop longtemps en périphérie de Villefranche-de-rouergue en allant chez Rand’aveyron. À peine un quart d’heure à poireauter dans les bouchons de la contestation. Le temps de se souvenir que la sous-préfecture de l’aveyron a tout de même un beau passé lié à l’enduro. Comme la naissance de la marque BPS dans les années 70,
suivie d’épreuves qualifiées de costaudes dans les 80’s. On se remémore les frères Costes et Philippe Cammisar, tous de la région, qui ont laissé leur marque dans les années 90. On se souvient aussi très bien du GP de France disputé à Villefranche en l’an 2000. Grand Prix dont le promoteur Alain Blanchard, boss D’ABC, habite toujours la jolie bastide rouergate. Bref, le temps que mon rond-point soit libéré, je me dis que je ne devrais pas être trop déçu côté chemins, paysages et autres gâteries enduristiques en venant me balader dans le coin. Une région qui a laissé une telle empreinte sur notre noble sport doit forcément coller avec la pratique. C’est ce que m’a soutenu François Bousquet, guide rando et fondateur de Rand’aveyron. Basé à moins de dix kilomètres de Villefranche, il m’accueille dans sa structure de la Maze, près de La Rouquette. Un joli centre de vacances toutterrain dédié aux colonies estivales, plutôt bien équipé : de l’hébergement collectif, une cuisine, un atelier, des bureaux, des minimotos et des enduros, sept hectares de prairies et de bois pour l’initiation… Je ne m’attendais pas à trouver ça en arrivant dans ce coin de campagne plutôt isolé. « Ça fait une quinzaine d’années que j’ai commencé l’école de moto du samedi pour les jeunes et un peu plus tard l’activité colonies de vacances,
m’explique François Bousquet. La rando pour adultes et la société Rand’aveyron, c’est plus récent, même si j’en faisais déjà au coup par coup. » Moniteur B.E. depuis le début des années 2000, ex-pilote de motocross, double champion de ligue avant de se lancer dans
le monitorat sous l’aile de Pascal Finot (oui, l’entraîneur des crossmen français victorieux à plusieurs reprises au MX des Nations), François a désormais 38 ans et pas mal de kilomètres dans les bottes. « Depuis quelques années, des moto-clubs de grandes entreprises avec qui je travaille déjà pour les colos m’ont contacté pour que je leur organise des randos clés en main. Je me suis équipé en motos de prêt, en équipements et j’encadre des groupes
de cinq à dix personnes à la demande. » En dehors de son activité colos, il a donc lancé Rand’aveyron et propose des balades autour de Villefranche-de-rouergue, que l’on soit ou non équipé d’une moto d’enduro. Il y a de la TTR 250, WR-F 250, KDX 200, Gas Gas 250 pour s’initier à la balade. Il y a surtout un vaste territoire truffé de chemins en tout genre dans le secteur. « Dans un rayon de 60 à 80 kilomètres autour d’ici, on a de tout,
explique mon guide du jour. Du très roulant au sentier technique. Je m’adapte en fonction des demandes. Du débutant tranquille aux enduristes plus expérimentés. » Et de m’expliquer qu’on est à la « frontière » entre trois départements : Aveyron, Lot et Tarn-etgaronne. Avec dans chaque cas des terrains différents. Grands causses calcaires et vallées profondes, zones agricoles ou bien plus sauvages. Mais le mieux, hein, c’est d’aller découvrir tout ça.
Château de princesse
Avec nous pour la journée, son cousin Cédric. Enduriste au rire facile et au coup de gaz précis, Cédric connaît lui aussi les chemins du coin par coeur. Et c’est toujours un vrai panard que de rouler dans la roue de gars qui connaissent bien leur secteur et s’enquillent des bornes sans hésiter. Tu prends la roue et tu profites. Et ça commence dès qu’on sort de son terrain au bout de 50 mètres de bitume ! Paf, piste calcaire. Un kilomètre après, on enchaîne sur un single plus sauvage entre deux murs de pierre. À peine le temps de s’habituer et on arrive à Monteils (là où trône le lycée privé François Marty avec option enduro au bac…). Le temps de traverser le village endormi et on grimpe sur les hauteurs de la vallée de l’aveyron où nous attend un panorama sympa d’où l’on aperçoit Villefranche-derouergue tout au fond. Ici, c’est du chemin calcaire, pas mal de dalles et des marches plus ou moins mauvaises. Du chemin qui sinue entre les chênes, rien de difficile, on se concentre sur la trajectoire dans la roue du guide qui garde un bon rythme régulier, ni trop rapide ni mollasson. À ce tempo sympa, le temps défile et on arrive vite fait dans la région de Najac. Najac, c’est un incroyable bourg médiéval surmonté d’un château de princesse que t’aperçoit à des kilomètres à la ronde. Le truc immanquable et carrément sorti d’une image de carte postale. Les sentiers pour arriver jusqu’au bourg sont du même acabit : médiévaux et qui se méritent sur le gras. Coup de bol, c’est plutôt sec et c’est tant mieux car ici le moindre chemin est bien technique. Y’a du gros relief, c’est à la fois sombre en bas des gorges de l’aveyron et fascinant quand on débouche en pleine lumière tout en haut du village. La rue qui traverse le bourg conduit direct à la
forteresse. Pause photo immanquable. Pause déjeuner également vu que ça fait déjà un moment qu’on tourne dans le coin. Pas grand-chose d’ouvert à cette saison. « C’est
bien plus touristique en été ! », confie François qui avoue ne pas amener de groupes ici pendant les vacances estivales. Mais on trouve une belle auberge qui fait dans le local côté saveurs mais également des galettes bretonnes (!) bien servies. Le temps de se remplir le bide tout en causant des bonnes choses du passé (ses courses de MX en championnat de France Élite dans la roue de Sorby et Lalloz, son passage en enduro au début des années 2000) et le temps file vite. Oubliée l’idée d’aller traîner du côté du Lot et des grands causses, les journées de novembre sont trop courtes. On va juste se concentrer sur cette boucle aveyronnaise et en partie tarn-et-garonnaise. Et le faire bien. Alors de Najac, on traverse une nouvelle fois la vallée de l’aveyron aux eaux calmes. Rapidement, les chemins du coin activent notre digestion. Sur nos Katé, Yam et Sherco on se fait gentiment brasser dans ces sousbois magiques. Magiques parce qu’éclairés de mille couleurs d’automne, du vert profond de certaines fougères encore intactes au jaune quasi fluo des feuilles de hêtres en passant par l’orange des chênes. Mes guides connaissent leur affaire en super chemins : et que je te grimpe sur un point de vue génial façon toboggan, et que je te redescends dans la vallée suivante en s’enquillant une dizaine d’épingles bien coriaces à négocier. Et que je te traverse un ruisseau sur un pont en pierre pas plus large que trois pneus d’enduro ! Et que je m’envoie quelques marches naturelles creusées dans le sentier par des centaines d’années de circulation pastorale. On en voit de bonnes mais sans jamais pousser plus que de raison, galérer et surtout jamais en hors-piste. De la rando-enduro comme on en redemande. Plus tard, on aperçoit une paire de chevreuils après avoir traversé La Rouquette et grimpé un dernier single magique. Quelques pistes roulantes et retour au centre tout-terrain alors que le soleil est déjà bien bas, planqué dans des nuages aussi noirs qu’un mauvais régime totalitaire. J’ai bien peur que ce magnifique « automne indien » soit en train de disparaître à jamais. Qu’importe, les photos sont dans la boîte. Si les autres boucles de François sont à la hauteur de celle-ci, on ne saurait trop vous conseiller de randonner dans sa roue quand vous aurez l’envie de voir autre chose en ce pays. Nous, on s’est régalés.