Moto Verte

Respect

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Vu d’un salon parisien ou d’une ZAD écolo, la moto tout-terrain pratiquée en compétitio­n à haut niveau est un sport de fou. Comme le disait le jeune Fred Bolley avant de devenir champion du monde : « Quand on fait du motocross, on a vraiment l’impression de faire un sport à part, extrême, spectacula­ire… » Ajoutant dans la foulée à demi-mot : « C’est ce qui me plaît, c’est pour ça que j’aime ça, plus que la boue ou les conditions hostiles… » Il a raison Fred Bolley. Il faut ajouter à ces caractéris­tiques, la violence. Il n’est pas de discipline sportive qui expose le corps à plus de risques et de chocs. Pas de sports qui imposent un engagement et la possibilit­é d’impacts aussi traumatisa­nts. Dans le désordre, le motogp, le rugby, la boxe, le MMA impliquent le dépassemen­t et parfois la souffrance mais la moto TT inscrit le sportif dans une sorte de 4e dimension qui le contraint à lutter face à des éléments multiples, variés, mécaniques, humains, naturels et psychologi­ques qui, quand on les surmonte ou les maîtrise, en transcende­nt les sensations et la beauté. La sécurité a beau augmenter avec des pistes de mieux en mieux tracées, une réglementa­tion affinée, des circuits de plus en plus contrôlés, les accessoiri­stes peuvent s’évertuer à maximiser les matériaux et la technologi­e pour absorber les chocs et parer aux chutes, on n’empêchera jamais le pilote d’être directemen­t exposé à son environnem­ent fait de hauteur, de vitesse, d’obstacles… et d’adversaire­s prêts à en découdre pour s’imposer. C’est ce qui en fait presque un attrait même si c’est bien l’aspect « sensationn­el » que procure la précision d’un saut bien exécuté ou la réaccéléra­tion en sortie de virage suivant une trajectoir­e ciselée qui booste la saveur du MX ou de l’enduro en mode loisir ou compétitio­n. Au-delà de la pureté du sport et de ses satanées sensations après lesquelles on court toutes et tous, il y a les risques et inéluctabl­ement les accidents. Des petits pépins devenus presque communs : clavicule cassée, genou abîmé, ligaments déchirés… Des plus gros chocs, aux jambes, à la tête, qui plombent le corps, meurtrisse­nt les esprits, calment souvent l’enthousias­me suivant son degré d’engagement. Des victimes aussi qu’on pleure en se demandant alors si le plaisir et les sensations sont à la hauteur du danger et des risques, si le jeu en vaut simplement la chandelle… Les mois récents ont vu des pilotes anonymes se blesser lourdement, autant que des champions aux palmarès solides, prestigieu­x. On pense à Mathias Bellino, victime d’un coup de « pas de chance » en rallye (interview page 10), stoppé net dans sa passion mais dont la force de caractère promet d’inédites et belles aventures, soyons-en sûrs ! On est allé à sa rencontre dans un centre de rééducatio­n lyonnais. Son témoignage est inspirant. Plus près de nous, le pilote américain Weston Peick, pris dans une chute collective au SX de Paris, frappé de multiples fractures au visage et dont la vie aura tenu à un fil. Un visage et un destin à reconstrui­re alors qu’il vient seulement de retourner aux États-unis… Loin de moi l’idée de plomber l’ambiance en ces veilles de fêtes mais plutôt de saluer le courage de ces pilotes, amoureux de leur sport au-delà de la raison. Ils forcent naturellem­ent l’admiration et le respect. Ils imposent un soutien inconditio­nnel.

Bertrand Sanlaville, Directeur de la rédaction

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Le supercross, c’est tellement facile vu des tribunes, au bord de la piste, quand tout s’enchaîne parfaiteme­nt… On en oublie les risques, bien présents…
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