Moto Verte

Le vintage peut-il sauver le trial ?

-

Le marché du trial « moderne » est en perte de vitesse (une chute de 50 % en dix ans) pour de multiples raisons, sans forcément pouvoir y remédier. Dans le même temps, l’engouement pour le trial vintage est réel. Serait-ce la petite lumière qui brille au bout du tunnel permettant au trial de rebondir ? Paroles d’experts.

PASCAL COUTURIER Pilote vintage/directeur commercial Shoei

« Ça peut aider l’ensemble de la discipline en la soutenant, en conservant les pilotes ou en en remettant certains en selle. Le trial moderne peut sembler intimidant. Certains pilotes ont l’impression de ne pas pratiquer le même sport que les bons. Ils se font alors plaisir en anciennes car les zones sont faciles, sans déplacemen­ts ni gros obstacles, tout le monde peut se projeter.

Les motos sont peu puissantes, pas exclusives, à la base peu chères, dès 2 000 €-3 000 €, et elles ne perdront jamais de valeur. Beaucoup aiment les bricoler entre les courses, s’échanger des tuyaux ou des pièces, ça fait partie du charme. Du coup, les pilotes achètent du matériel, c’est positif pour les spécialist­es… Autre attrait, la conviviali­té, le fait que les meilleurs roulent avec les moins bons, entre copains, c’est cool. Le vintage renvoie une bonne image du trial car les vieilles motos, c’est sympathiqu­e, pas agressif. Pour toutes ces raisons, le vintage, ça plaît et les classiques comme Le Ventoux ou la Costa Brava refusent du monde. Il faut juste s’attacher à ce que cela reste une vraie compétitio­n, avec un règlement assez strict pour éviter l’escalade technique qui pourrait, à son tour, pénaliser le trial vintage. »

JEAN-MARC DHERBEY Concession­naire 100 % trial Dherbey Moto

« Non, je ne pense pas que le trial vintage puisse sauver le trial ! Je suis conscient de son engouement impression­nant lors du Ventoux Trial Classic, cette passion qu’ont les gens à restaurer en y mettant pas mal d’argent, mais pour moi, c’est une minorité, la niche dans la niche. On a quelques clients qui nous poussent dans cette direction et qui nous demandent des pièces de Fantic, j’ai même mon fils Mathias qui a récupéré une 250 Ossa de 1975, c’est rigolo, mais on ne peut pas prendre de plaisir avec ça, avec des freins et des suspension­s d’un autre temps. Une moderne est tellement facile à rouler ! Franchemen­t, ça ne me fait pas vibrer – et je pourrais parce que cela fait 43 ans que je suis dans le trial et c’est une époque qui me parle – mais cela nécessite beaucoup d’énergie et de temps. Alors peut-être qu’un jour, si le marché du trial régresse encore, on y viendra, pour s’accrocher aux branches, mais aujourd’hui, il n’y a pas assez de pratiquant­s pour une structure comme la nôtre qui emploie douze personnes. Le gars qui est seul dans son atelier, qui bricole des motos en étant très spécialisé, pourquoi pas, mais, à mon niveau, je ne vois pas en quoi ça peut nous ramener du monde ou dynamiser le trial. »

PATRICK PISSIS Pilote/délégué du comité classique et historique FFM

« C’est une façon de sauver le trial et de remplacer les pilotes qui s’en détournent. Sur les 1 000 trials auxquels j’ai participé, 400 l’ont été sur des motos classiques. Quoi qu’on en dise, on prend du plaisir à piloter une ancienne, mais il est différent.

Sur une trial moderne, il vient de la légèreté et de la vivacité, alors que sur une ancienne comme une Ariel pré-65 où les suspension­s sont des bouts de bois, on va apprécier le moteur phénoménal, presque incalable, offrant beaucoup de traction. Le plaisir sera d’enrouler, de travailler sur le couple, les bas régimes tout en apprécient la sonorité. On est aux racines du trial. Une moto moderne, c’est facile, tu fais 80 kilomètres sans te fatiguer et côté entretien, il n’y a rien à faire. Une ancienne demande plus d’engagement parce que 70 % des pilotes sont retraités (ils ont du temps, du pouvoir d’achat, ont souvent pratiqué la moto toute leur vie) et sur une épreuve de deux jours, ça devient fatigant. Il y a aussi l’aspect restaurati­on qui compte, ces heures d’atelier hors saison où l’on bichonne sa moto, c’est très agréable et c’est l’opportunit­é de faire des rencontres enrichissa­ntes. Le trial vintage génère des licences, dynamise les clubs, donne une image sympa du trial, c’est positif. »

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France