LE SECOND SOUFFLE
Philippe n’a pas ménagé ses efforts ni son imagination pour transformer une occasion à bout de souffle en une efficace bécane d’enduro de gros calibre nécessitant de bons biscotos et de l’engagement.
Philippe, 54 ans, a piloté quelques fleurons de l’enduro – qu’il a conservés – parmi lesquels HVA 240 WR de 1978 et 390 WR de 1980, Portal 250 Ranger de 1977, Puch 250 Frigerio F3 de 1982… avant de tenter l’aventure BMW, porté par l’image d’Hubert Auriol, star du Dakar des années 80. Il jette son dévolu sur une R 80 G/S de 1982, dans son jus, tournante, négociée, sans la voir, 1 400 € en 2013. Bien joué ! Fort de son CAP/BEP de chaudronneriesoudeur-tuyauteur, Philippe s’est attelé lui-même à la métamorphose, hormis au niveau électrique où il craignait de s’emmêler les fils. Pour affronter les chemins, la Béhème bénéficie d’un double bras oscillant (monobras d’origine), d’un moyeu de roue arrière avec rayonnage parapluie (désaxé pour rentrer un pneu de 140 sur la jante de 18) et d’un pont à broche avec un rapport de réduction de 37/11 avec une came de frein inversée. Le cadre est modifié pour le passage du cardan, la boucle arrière a été refabriquée et soudée au châssis. Les tés de la fourche WP de 44 mm ont été usinés sur-mesure, la roue et le freinage proviennent d’une KTM. Morceau de bravoure, le réservoir Maïco de 10 litres en aluminium a été remodelé, perdant 50 centimètres cubes de contenance dans l’opération (ce qui lui autorise une autonomie de 100 kilomètres), afin de pouvoir accueillir la sacoche à outils en cuir. Le moteur (rehaussé dans le cadre pour gagner en garde au sol grâce à un nouveau sabot-carter d’huile qui accueille une crépine recentrée) bénéficie d’un échappement en inox façonné par Philippe. Le bloc est resté tel qu’il était à l’achat, sachant que son ancien propriétaire avait gonflé la cylindrée à 1 020 cm3 via un nouvel ensemble culasses-cylindres-pistons, portant la puissance à 70-75 chevaux, alimentés par des carburateurs Bing de 40 mm. Le flat-twin bénéficie d’un allumage électronique Kennedy pour une mise à feu digne de Cap Canaveral et d’un petit démarreur de R 100 GS Paris-Dakar avec batterie au lithium. Philippe doit cependant dégommer, via une vingtaine de coups de kick, le moteur à froid pour aider au démarrage. Une fois le bicylindre chaud, plus aucun problème.
Les plastiques sont signés Stilmotor, la plaque-phare Falk et la selle est empruntée à une Maïco. Malgré une cure d’amaigrissement, la moto s’avère, au goût de Philippe, encore trop lourde : 170 kg. Il aura travaillé 500 heures sur cette mécanique dont le prix de revient est estimé à 5 000-6 000 €. Ses qualités ? « Elle est très fiable, la traction et le couple à bas régime sont extraordinaires. Elle est à la fois puissante, trop même, et stable à grande vitesse et dans le roulant. » Comme il fallait s’y attendre, il trouve cependant à redire au niveau du poids, de la hauteur de selle – pour son mètre soixante-dix – et de l’amortisseur Hagon (non réglable) qu’il juge trop dur, « désagréable », et qu’il souhaiterait remplacer par un Wilbers.
Philippe a déjà parcouru 3 000 km avec sa bitza et, roulant en trail BMW depuis 1991, il n’a pas eu à s’adapter à un pilotage très spécifique qu’il considère avec humour « presque comme un métier ». À Brioude, il est allé jusqu’au cross final en subissant les conditions boueuses qui ajoutent à la difficulté de maîtriser celle qu’il appelle « un dinosaure ». Il n’entend pas en rester là et prépare une nouvelle mouture, sur base R 65 ou R 45, avec un flat-twin à course courte pour gagner en maniabilité, un kit 850 ou 860 avec pistons allégés et un cadre en chrome-molybdène. « Elle sera plus adaptée à mon gabarit, plus légère tout en conservant son look ISDT replica. »
« LA TRACTION ET LE COUPLE SONT EXTRAORDINAIRES, ELLE EST PUISSANTE, TROP MÊME, ET STABLE. »
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