LA LOCOMOTIVE
Philippe Blanc-Tailleur a été un précurseur de l’enduro tricolore acatène au guidon d’une Béhème. Dernière mouture en date, « Yvonne », un prototype qu’il fait danser avec maestria et réussite.
Dès 1973, Philippe BlancTailleur taquine les chemins au guidon d’une Yamaha 360 RT2, marque des points l’année suivante et se fait un nom en championnat de France (3e scratch inter en 1977 sur une 250 KTM) tout en participant au championnat d’Europe avant de lever le pied en 1985. Il revient à ses amours en 2002 au guidon d’une BMW R 80 G/S, se prend au jeu, élabore un proto de XT 550 « Eddy Hau replica » avant de construire une réplique de la BMW usine 1979. Fort de cette première réalisation, en 2020, il récidive en imaginant une BMW 850 « Herbert Schek Inspiration » où, grâce à son expérience, il améliore la bête en l’allégeant via l’adoption d’un petit réservoir de 7,5 litres de Maïco
1974 et la suppression de l’alternateur et tout le toutim, ce qui l’oblige à utiliser le kick entraîné transversalement, juché sur le cylindre, aidé par la fonction boost au démarrage de l’allumage compact PVL. Autre souhait, pouvoir piloter une moto plus basse (carter d’huile supprimé remplacé par un sabot, repose-pieds descendus), bénéficiant, comme sur la moto d’Herbert Schek, de deux amortisseurs. Commence alors un chantier d’envergure, six mois de travail intense (600 heures) pour assembler toutes sortes d’éléments de diverses provenances, BMW offrant l’avantage de pièces pouvant être permutées d’un modèle à l’autre : cadre et moteur de R 65 de 1977 avec carbus Bing de 32 mm, cylindres de 1000, boîte 4 de série 5, fourche de 37 mm de Honda 500 XLR, amortisseurs Shock Factory, échappement maison, béquille centrale spéciale articulée sur broche de fixation moteur excentrée côté kick… « C’était un travail de fourmi, mais j’étais motivé. L’échappement et le filtre à air ne sont pas encore optimisés et j’ai dû décompresser au départ car la moto était trop dure à kicker. » Dans cette aventure – car à ce niveau, c’en est une – Philippe a bénéficié de l’aide de Denis Boullay pour la mécanique et de Bruno Martins, enduriste et ex-ingénieur moteur pour la mise au point du flat-twin ainsi que des conseils de Jean Castera (le papa de David qui fut le mécanicien d’Hubert Auriol sur le Dakar) et de Bernard Sabater, spécialiste incontournable des bavaroises. Au niveau des qualités, Philippe ne manque pas d’arguments.
« La fiabilité est légendaire, le couple moteur est fabuleux, générant beaucoup de douceur, l’équilibre général est bon, le centre de gravité bas. Cerise sur le gâteau, c’est une machine originale à la sonorité plaisante. » Bien qu’il ait retiré tout ce qui pouvait l’être, Philippe est forcé de constater que le poids
(150 kg, mais il est difficile de faire moins) est à sa décharge, tout comme la largeur des cylindres qui rend parfois les passages entre
les rochers un peu délicats. Talon d’Achille d’Yvonne, son démarrage à froid, « mais on y travaille » assure BT. « Je pense que j’ai trop de contrepression sur mon pot d’échappement central… Je ne voudrais pas sortir de ce concept génial car rien ne dépasse sur le côté. Je vais augmenter le volume et moins freiner les gaz tout en piégeant le bruit. » Si Philippe qui est un technicien de haut niveau s’accomplit dans des challenges tels que celui-ci, il n’est point besoin de se démener autant pour se faire plaisir. « Une R 80 G/S pas trop haute avec une bonne fourche est déjà extrêmement efficace ! » Avis aux amateurs !
« LA FIABILITÉ EST LÉGENDAIRE, LE COUPLE FABULEUX, L’ÉQUILIBRE EST BON, LE CENTRE DE GRAVITÉ BAS, ET QUEL SON ! »