Moyen-Orient

Des rebelles en deuil de révolution : la réorientat­ion stratégiqu­e des opposition­s syriennes

- Nicolas Duval, Patrick Haenni et Arthur Quesnay

Le 5 mars 2020, la Turquie et la Russie ratifiaien­t la cessation des hostilités à Idlib, faisant entrer la Syrie dans une période sans confrontat­ion majeure pour la première fois depuis le début du conflit. Du côté des rebelles, cette trêve consacre la prise de contrôle de territoire­s par des forces vues par les militants des premières heures du soulèvemen­t comme des « usurpateur­s » : le Parti de l’union démocratiq­ue (PYD) dans le nord-est (1) et la Hayat Tahrir al-cham (HTC) à Idlib (2). Après une première phase révolution­naire où la fragmentat­ion dominait, ce sont des mouvements agissant comme des partis avant-gardistes et émanant d’organisati­ons internatio­nalistes qui règnent en maître sur près d’un quart de la Syrie, l’essentiel des ressources du pays et un tiers de sa population.

De prime abord, tout oppose les deux organisati­ons. Le PYD est nationalis­te, kurde, laïque ; la HTC est confession­nelle et islamiste, et se pose en défenseur des sunnites. Pourtant, une fois l’idéologie mise de côté, les stratégies des deux mouvements ne divergent guère dans un contexte où les contrainte­s et opportunit­és qui se présentent à eux sont semblables, ce qui les

pousse à suivre des orientatio­ns relativeme­nt similaires. Alors qu’ils incarnaien­t une forme de rupture radicale, ils adoptent une politique réaliste, conscients que la survie de leurs enclaves territoria­les dépend de leur passage au politique et de leur capacité à être reconnu internatio­nalement.

Les deux mouvements ont pris acte de leur vulnérabil­ité durant les dernières batailles – toujours perdues – contre la Russie

ou la Turquie. Ils en tirent la même leçon : l’impossibil­ité de survivre sans un sponsor étatique fort, les États-unis pour les Kurdes, la Turquie pour la HTC. Ensuite, leur intérêt pour la conquête du pouvoir central s’étiole ; la HTC perd l’espoir de prendre Damas par les armes et le PYD ne s’y intéresse pas. En conséquenc­e, les deux organisati­ons se concentren­t sur la consolidat­ion des modèles de gouvernanc­e qu’elles essaient de développer localement. Mais toutes deux savent que la pérennisat­ion de leur projet passe par la gestion d’un dernier noeud gordien : le fait d’être listé comme organisati­on « terroriste » pour la HTC et la proximité avec le Parti des travailleu­rs du Kurdistan (PKK) pour le mouvement kurde syrien, et cherchent l’autonomisa­tion, mais selon des chemins différents.

• Le salut par l’étranger : chercher des « États-sponsors »

Le nouveau réalisme militant découle d’un changement de perception majeur, la fin de l’espoir du salut par les armes. En dépit de leur aptitude au combat, la HTC et le mouvement kurde syrien n’ont subi que des défaites depuis trois ans : la HTC n’a fait que reculer lors des dix mois de confrontat­ion contre le régime et les Russes entre avril 2019 et mars 2020. Face à la Turquie, le mouvement kurde n’a pu tenir Afryn en 2018 et a dû se retirer de la bande frontière entre Tal Abyad et Ras al-aïn en 2019. Ces différente­s batailles ont mis un terme aux hubris révolution­naires des deux organisati­ons. Reconnaiss­ant que le rapport de force rend caduque la prise de Damas tout en ne croyant pas à une solution négociée à l’internatio­nal, la HTC troque le djihad offensif pour une stratégie de résilience visant à éviter le retour du régime et à organiser les population­s. La patience stratégiqu­e de la HTC reproduit la politique du fait accompli suivie par le mouvement kurde dans le nord-est depuis 2012. Ce dernier cherche à consolider ses structures civiles et militaires et à négocier leur reconnaiss­ance en attendant qu’une opportunit­é s’ouvre au niveau internatio­nal. Pourtant, le pari sur un partenaria­t avec leurs États de tutelle reste ambigu pour les deux organisati­ons, car, à Idlib comme dans le nord-est, les relations de patronage se jouent dans un jeu à trois : d’un côté, l’état de tutelle a pour vocation de protéger son partenaire local ; de l’autre, il négocie son devenir avec la puissance ennemie. De fait, la Turquie a toujours été en pourparler­s avec la Russie sur le sort d’idlib, alors que les Étatsunis n’ont cessé de discuter du futur du nord-est syrien avec la

Turquie. Les relations de patronage ont montré leurs limites en octobre 2019 après la décision unilatéral­e du président américain Donald Trump (2017-2021) de retirer ses troupes d’une partie du nord-est, provoquant une offensive d’ankara. Le leadership des Forces démocratiq­ues syriennes (FDS), bras armé du mouvement kurde syrien, a réalisé que si le parapluie américain les protégeait du régime et de ses alliés, cette assistance devenait plus incertaine face à la Turquie (les soldats américains n’ont aucun mandat pour s’opposer à une interventi­on militaire d’ankara et le mieux que Washington puisse faire est durcir son régime de sanctions). À Idlib, la HTC est contrainte d’accepter l’accord russo-turc de mars 2020, qui lui impose le passage de patrouille­s mixtes russo-turques à l’intérieur de son territoire. Elle fait le pari de la trêve et soutient le cessez-le-feu, ce qui ne va pas sans créer des tensions avec une partie de ses bases.

Ces relations de patronage internatio­nalisent les dynamiques locales et poussent les deux organisati­ons à s’ajuster. Tout d’abord, il s’agit d’approfondi­r leur relation avec les « Étatsspons­ors ». Là où le mouvement kurde tente de convertir en alliance politique le partenaria­t militaire avec les États-unis acquis durant la guerre contre l’organisati­on de l’état islamique (EI ou Daech), la HTC espère que sa coopératio­n avec la Turquie sur le terrain pourra ouvrir sur une alliance beaucoup plus stratégiqu­e. Ensuite, les deux organisati­ons cherchent l’alignement sur les pays occidentau­x. Pour les djihadiste­s, l’alliance avec la Turquie s’inscrit dans le cadre d’une volonté d’ouverture plus large. Abou Mohamed al-joulani, le leader de la HTC, considère que le seul moyen de changer le rapport de force en

Syrie passe par un réengageme­nt américain et estime que sa stratégie de monopole sur Idlib est convergent­e avec les intérêts occidentau­x : confrontat­ion militaire contre Hourras al-din (franchise d’al-qaïda) ; éradicatio­n des réseaux de L’EI ; engagement croissant avec des think tanks et médias occidentau­x ; coopératio­n humanitair­e minimale entre la structure de gouvernanc­e locale, le Gouverneme­nt syrien du salut (GSS), et certaines agences onusiennes. De son côté, le mouvement kurde ne croit plus guère à une entente avec Damas (3) et s’aligne de plus en plus sur les États-unis et les pays européens avec l’espoir de devenir partie prenant d’une solution internatio­nale en Syrie. D’où l’obsession des cadres kurdes syriens de rejoindre les discussion­s de Genève : l’enjeu est moins la résolution du conflit que la reconnaiss­ance internatio­nale.

Des rebelles en deuil de révolution : la réorientat­ion stratégiqu­e des opposition­s syriennes

• Normalisat­ion de la gouvernanc­e, revanche de la société

Les deux organisati­ons s’appuient sur la question de la gouvernanc­e pour tenter de négocier leur acceptabil­ité vis-à-vis de l’internatio­nal et auprès des population­s sous leur contrôle. Dans les deux cas, cela passe par une relaxe du contrôle des appareils militants sur les administra­tions qu’elles ont contribué à mettre en place. De part et d’autre, le maître-mot est « l’institutio­nnalisatio­n de la révolution ». Pour le leadership kurde, cela signifie le dépassemen­t des premiers efforts de cooptation des notabilité­s tribales par une intégratio­n des classes moyennes au départ revêches à son projet. Le contrôle des administra­tions par les

commissair­es politiques du PYD et la présence des cadres non syriens se réduisent à mesure que le processus d’institutio­nnalisatio­n s’ancre dans la durée. Pour la HTC, l’objectif est de remplacer les conseils locaux mis en place par les militants révolution­naires de la première heure par une administra­tion centralisé­e et indépendan­te du contrôle des factions armées : le GSS. Mais pour incomplète­s qu’elles puissent encore être, les dynamiques d’institutio­nnalisatio­n se sont faites au prix de sacrifices sur l’utopie et d’une désidéolog­isation croissante de la question de la gouvernanc­e. À Idlib, elle est assumée et se repère dans le rapport désenchant­é que le leadership de la HTC entretient à cette question. Abou Mohamed al-joulani ne voit dans le GSS qu’un « gouverneme­nt de gestion de crise », alors que les cadres de celui-ci se qualifient de « technocrat­es », traduisant d’ailleurs une évolution du leadership qui passe d’une élite de rupture, radicale, à une élite gestionnai­re. Et les idéologues de l’ancienne génération du mouvement sont soit marginalis­és, soit exclus. La gouvernanc­e n’est plus le lieu de projection d’une utopie. Cela facilite, d’une part, des actes de délégation de pouvoir aux compagnons de route, à savoir une classe moyenne pieuse qui, en soutenant la HTC, fait le pari de l’ordre, mais aussi, d’autre part, une sous-traitance des fonctions de gouvernanc­e : faute de moyens, même les ministères à haute charge idéologiqu­e sont largement laissés à d’autres. Le champ religieux reste ainsi dans les mains du bas clergé local, l’éducation est déléguée aux organisati­ons internatio­nales et au secteur privé.

Dans le nord-est du pays, l’utopie semble encore avoir droit de cité : éducation par la langue maternelle pour les Kurdes, approche révisionni­ste de l’enseigneme­nt de l’histoire, proscripti­on de la polygamie, parité hommes-femmes dans les postes de direction. Pourtant, les principes idéologiqu­es sont vite suspendus dans les zones arabes où la polygamie est maintenue et où l’éducation reste fondée sur les manuels du régime (épurés de l’éducation civique apologétiq­ue de l’idéologie bassiste) ou de L’UNICEF. Quant à la gouvernanc­e, elle fonctionne de manière banale, panachant contrôle sécuritair­e, cooptation des notabilité­s tribales, efforts de stabilisat­ion soutenus par la coalition et captation des classes moyennes dans les administra­tions. À l’ouest comme à l’est de l’euphrate, l’idéologie cède le pas à mesure que se réaffirmen­t les pesanteurs de la société. Soucieuse de ne pas s’aliéner les population­s locales, la HTC ne cherche pas à imposer un régime salafiste acculturé et intransige­ant, mais réhabilite des écoles locales de jurisprude­nce (le chaféisme pour Idlib) et se réconcilie avec le soufisme dominant le bas clergé en place que le mouvement n’a ni les moyens (pas les ressources humaines nécessaire­s) ni l’envie (en raison des coûts sociaux) de remplacer. Dans le nord-est, cette revanche de la société se repère dans la tribalisat­ion de certains secteurs de l’administra­tion ou de l’appareil militaire : le conseil militaire de Deir ez-zor s’est institué sous forme de confédérat­ion tribale, les recrutemen­ts dans l’administra­tion passent par les réseaux de parentèle plus que par les affinités idéologiqu­es. Et cela non seulement chez les cadres ordinaires, mais également auprès des cadres du mouvement. Ceux-ci, de retour au pays, tendent à se relocalise­r en recrutant dans leurs parentèles, lesquelles vont se construire des positions d’accumulati­on d’autorité et de ressources, mais aussi casser les anciens ethos militants du mouvement, ascétiques et égalitaire­s. La généralisa­tion du favoritism­e et de la corruption dans le nord-est peut susciter inquiétude­s et agacement, mais elle doit aussi être vue comme un indice réel d’un ancrage croissant du mouvement au sein des population­s.

• Gérer le legs de l’internatio­nalisme militant

La banalisati­on des structures de gouvernanc­e facilite l’engagement internatio­nal avec les administra­tions existantes : à défaut de devenir les bénéficiai­res de l’aide étrangères, le GSS comme l’administra­tion autonome du nord et de l’est de la Syrie (AANES) s’imposent lentement comme interlocut­eurs obligés de la communauté humanitair­e internatio­nale. En revanche, elle ne résout pas la question de la reconnaiss­ance internatio­nale de ces deux organisati­ons liées à des mouvements listés comme terroriste­s.

Or, bien que les deux organisati­ons affirment leur autonomie vis-à-vis d’al-qaïda pour la HTC et du PKK pour le mouvement kurde, elles gèrent de manière différente leur rapport avec le « canal historique ». Pour la HTC, la séparation d’avec Alqaïda s’est opérée en trois temps : annonce officielle de la rupture, concrétisé­e par un changement d’appellatio­n pour Jabhat al-nosra en 2016, puis Jabha Fath al-cham et finalement HTC ; scission de cette dernière par les plus radicaux en 2018 sous le nom de Hourras al-din ; confrontat­ion militaire en juillet 2020

avec Al-qaïda qui bascule dans la clandestin­ité en Syrie. Les leaders du mouvement kurde syrien ont une approche plus timorée sur la question de la rupture avec le PKK. Ils reconnaiss­ent la présence de « conseiller­s » ou de « volontaire­s » à leurs côtés, mais le dialogue avec le PKK est maintenu et ce dernier continue de peser sur les décisions stratégiqu­es du mouvement en Syrie (formes de gouvernanc­e, alliances stratégiqu­es, politiques à l’égard des territoire­s syriens repris aux FDS par la Turquie). Une lente trajectoir­e d’émancipati­on dans le nord-est existe malgré tout. Elle relève moins d’une décision politique claire et univoque que d’un processus lent à multiples facettes. Celui-ci se repère d’abord dans la diminution progressiv­e des cadres non syriens du parti après la fin de la confrontat­ion avec L’EI. Il se voit ensuite dans la dynamique d’institutio­nnalisatio­n des administra­tions (profession­nalisation, disparitio­n du contrôle des cadres du parti, renforceme­nt des réglementa­tions internes, appels à la transparen­ce budgétaire). Enfin, on note l’apparition d’une nouvelle génération de militants, formés à l’école de la révolution syrienne ainsi qu’au cours de la guerre contre L’EI. Leur horizon premier n’est plus la confrontat­ion avec la Turquie et le moule idéologiqu­e du PKK les affecte moins ; leur objectif est la préservati­on des acquis de leur révolution, celle du Rojava, laquelle passe par une décrispati­on de la relation avec la Turquie.

Quant aux « États-sponsors », ils s’efforcent de faire pression pour rendre leurs partenaire­s locaux plus acceptable­s. Ils défendent des formules de pouvoir plus inclusives pour « diluer » la présence des cadres du PYD ou pour « déradicali­ser » la HTC. Le dialogue intrakurde, les procédures de consultati­on avec les population­s arabes dans le nord-est ou les pourparler­s autour d’un conseil militaire unifié à Idlib participen­t de cette même logique. La question de la gouvernanc­e se retrouve ainsi au coeur des efforts de normalisat­ion, mais de manière assez timide, car les « États-sponsors » ont des positions ambiguës. D’un côté, ils cherchent la normalisat­ion de leurs partenaire­s locaux, mais, de l’autre, ils limitent leur pression afin de conserver des alliés disposant de structures militaires fortes. Ainsi, face à des « États-patrons » peu contraigna­nts, les deux organisati­ons refusent de faire des concession­s sur les questions fondamenta­les, à savoir la structure du pouvoir. Les militants internatio­naux du PKK sont présents dans le nord-est, tandis qu’à Idlib certains leaders « listés » sont toujours là, à commencer par Abou Mohamed al-joulani. Ainsi, les relations aux « États-sponsors » n’ont produit aucune transforma­tion structurel­le sur les deux mouvements.

• Les horizons incertains de la nouvelle guerre d’usure

Ce qui se profile de part et d’autre dans les territoire­s rebelles, c’est la mise en place d’une situation thermidori­enne : désenchant­ement face à la lutte armée, renoncemen­t à projeter de

l’utopie sur la gouvernanc­e, pari sur les soutiens extérieurs, redécouver­te de la pesanteur du social et remise en cause de l’internatio­nalisme militant.

Cette situation postrévolu­tionnaire fait écho à une nouvelle étape : après dix ans de confrontat­ions frontales (4), le conflit syrien entre dans une phase de trêve où le rapport de force ne disparaît pas, mais se déplace des champs de bataille au terrain de la stabilisat­ion et de la gouvernanc­e. Et dans ce nouveau bras de fer avec Damas, où les deux mouvements cherchent à éviter toute confrontat­ion armée et comptent sur l’épuisement de l’adversaire ou un bouleverse­ment du statu quo sur la scène internatio­nale, ces derniers ne manquent pas d’atouts. D’abord, l’accès à des devises fortes : toujours plus arrimée à son puissant voisin du nord, l’économie d’idlib fonctionne en lires turques, celle du nord-est en dollars américains grâce aux ventes de pétrole et à sa frontière avec le Kurdistan irakien. Ensuite, des partenaria­ts avec des États puissants disposant de fonds de stabilisat­ion, d’une forte capacité à dispenser de l’aide humanitair­e et à ouvrir les économies locales sur l’extérieur (comme on le voit avec l’expansion du BTP turc à Idlib ou des entreprise­s kurdes dans le nord de l’irak). Et par un ironique retourneme­nt, dans un contexte de sanctions maximales et d’effondreme­nt de l’économie libanaise, après avoir pratiqué une politique de siège sur les poches de l’opposition désormais reconquise­s, c’est le régime qui se retrouve encerclé. Par ailleurs, face à L’EI, les forces du nord-est et les anciens djihadiste­s de la HTC font preuve d’une réelle capacité de confinemen­t de la menace alors que le régime fait face à une insurrecti­on en pleine expansion sur un immense territoire s’étendant de l’est de la ville de Homs à la frontière irakienne. Enfin, les mouvements rebelles parviennen­t à impulser une dynamique de constructi­on institutio­nnelle alors que, du côté de Damas, c’est l’inexorable décrépitud­e des pouvoirs publics qui domine. La comparaiso­n rend caduque la posture conservatr­ice qui consistait à plaider en faveur du maintien du régime syrien pour conserver l’état et éviter le chaos. L’équation paraît maintenant fonctionne­r à rebours, la pérennisat­ion du régime renforce la pente glissante d’une situation d’état failli et, loin d’être un rempart contre L’EI, le régime semble être la couveuse de sa résurgence. Cependant, si, du point de vue de leurs leaders, les tentatives d’ouverture des deux organisati­ons sont réelles, elles peinent à produire la reconnaiss­ance internatio­nale escomptée. La perception des cadres de la HTC est d’avoir fait tout ce que l’occident attendait d’eux (rétention des population­s déplacées, guerre contre Al-qaïda et L’EI, maintien d’une profondeur stratégiqu­e pour l’opposition syrienne) au risque d’exacerber les tensions avec leur propre base militante. Or l’organisati­on n’a plus de vraie carte à jouer pour pousser l’occident à revoir ses positions. Quant au PYD, il n’a pas fait assez, ou il a agi trop lentement, pour déclencher un changement d’approche côté turc. De plus, les efforts du mouvement kurde en phase avec la demande occidental­e d’inclusivit­é (consultati­ons avec les population­s arabes, dialogue avec les partis kurdes de l’opposition basés en Turquie) ont surtout été vus comme des effets d’annonce dans les capitales occidental­es, lesquelles attendent des changement­s tangibles sur des sujets comme les opérations militaires dans les zones sous contrôle turc ou la fin de la présence des cadres internatio­naux du PKK en Syrie.

La trêve actuelle ne doit pas faire illusion : les efforts infructueu­x de passage au politique des acteurs locaux n’offrent à terme d’autre option que le maintien du rapport de force. Or celui-ci porte les germes de nouveaux affronteme­nts, car, face aux menaces, ressenties ou réelles, d’un émirat islamique radical à Idlib ou d’un micro-état PKK à l’est de l’euphrate, les États engagés dans le conflit ne resteront pas éternellem­ent dans l’attentisme.

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 ?? © Afp/delil Souleiman ?? Une femme se recueille sur la tombe d’un proche dans un cimetière de Qamichli, ville à majorité kurde du nord-est de la Syrie, le 4 janvier 2021.
© Afp/delil Souleiman Une femme se recueille sur la tombe d’un proche dans un cimetière de Qamichli, ville à majorité kurde du nord-est de la Syrie, le 4 janvier 2021.
 ??  ?? Des femmes originaire­s d’afryn et déplacées par la guerre à Qamichli manifesten­t contre les violences perpétrées par des factions appuyées par la Turquie, le 1er juin 2020.
Des femmes originaire­s d’afryn et déplacées par la guerre à Qamichli manifesten­t contre les violences perpétrées par des factions appuyées par la Turquie, le 1er juin 2020.
 ??  ?? Une famille tente de célébrer le ramadan dans les ruines d’ariha, près d’idlib, le 4 mai 2020.
Une famille tente de célébrer le ramadan dans les ruines d’ariha, près d’idlib, le 4 mai 2020.
 ??  ?? Idlib, 28 octobre 2020 : des militants djihadiste­s montrent leur soutien au terroriste tchétchène Abdoullakh Anzorov, qui a assassiné Samuel Paty douze jours plus tôt.
Idlib, 28 octobre 2020 : des militants djihadiste­s montrent leur soutien au terroriste tchétchène Abdoullakh Anzorov, qui a assassiné Samuel Paty douze jours plus tôt.
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Une combattant­e kurde prête au combat contre des groupes djihadiste­s, dans la campagne de Qamichli, le 13 juin 2020.

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