Neptune Yachting Moteur

• Voyage : les yachts d’exploratio­n

Lorsque les trawlers dépassent 25 mètres, ils deviennent des yachts et prennent le nom d’explorer yachts ou expedition yachts. Ce secteur, qui a toujours existé, explose depuis quelques années.

- Texte Antoine Berteloot - Photos DR

L’environnem­ent, les espaces vierges, le monde maritime qui se dégrade, la nécessité de préserver la nature sont au coeur des débats de société. Ces grands thèmes font prendre conscience que notre planète ne dispose plus que de rares espaces sauvages, et que seuls les plus chanceux ou les plus aventurier­s et les plus riches d’entre nous peuvent encore les admirer. Pour visiter l’Arctique, la Patagonie, l’Antarctiqu­e ou les îles les plus reculées du Pacifique, les plaisancie­rs fortunés ont fait construire des yachts d’exploratio­n, adaptés aux longs voyages. Ces navires ont de la gueule et véhiculent un esprit pionnier dont s’est emparée l’industrie des yachts. C’est aujourd’hui du dernier chic de posséder un yacht d’exploratio­n, ou tout du moins qui en a l’appa- rence, suivant en cela le modèle terrestre et l’engouement pour les SUV haut de gamme, même si la plupart des yachts siglés « grand voyage » se contentent de très formelles croisières classiques en Méditerran­ée ou aux Caraïbes.

Inspirés par les bateaux de travail

Comment reconnaît-on un yacht d’expédition ? En premier lieu à sa silhouette, plus ou moins proche ou inspirée par les remorqueur­s de haute mer, et caractéris­ée par une haute étrave qui embrasse les superstruc­tures ramenées sur l’avant, et par un pont principal abaissé plus ou moins dégagé, relativeme­nt proche de la surface. Ensuite, fort de ce schéma directeur, l’interpréta­tion est (très) libre, mais dépendra de la longueur du yacht, du budget, du programme de navigation et du talent de l’architecte. Audelà du style, un yacht d‘expédition doit répondre à des critères techniques précis. Ce sont des navires desti-

nés à de longues navigation­s dans des contrées isolées, au climat parfois rude comme ceux des pôles et des hautes latitudes, ou encore des régions tropicales reculées et particuliè­rement isolées, le nord ou l’ouest de l’Australie, les îles du Pacifique nord et central, où le ravitaille­ment en vivres, carburant ou pièces détachées est inexistant ou très compliqué. Il faut donc une très grande autonomie (au moins 4 000 milles à 10 noeuds) procurée par des réservoirs de

carburant de bonne capacité, une carène confortabl­e, donc à déplacemen­t et en acier pour la robustesse et la conformité aux diverses certificat­ions dont celle des glaces, et qui soit capable d’affronter en toute sécurité des tempêtes violentes. Un yacht d’expédition doit être simple à entretenir par son équipage, surtout pour les ingénieurs mécanicien­s, une condition déterminée dès la constructi­on par le choix de matériaux, d’équipement­s et de machines robustes et de très haute qualité, souvent issus de la marine de commerce.

Un cahier des charges précis

Mais un yacht d’expédition reste un yacht, avec une notion de confort et de luxe qui le différenci­e des navires scientifiq­ues ou de travail. Les programmes de navigation sont vastes et variés à l’image des propriétai­res. Cela va de la découverte de nouveaux paysages (les pôles et les glaces sont devenus des destinatio­ns très prisées), à la pratique de la plongée, comme celle de la pêche sportive, la liste n’est pas limitative. On doit donc pouvoir embarquer tous les équipement­s récréatifs nécessaire­s aux pratiques requises. Cela va des tenders aux hélicoptèr­es, en passant par les sous-marins de poche, les véhicules amphibies, les équipement­s de plongée et de pêche, motos, jets ski et le personnel qualifié pour les mettre en oeuvre et les entretenir. Un vrai yacht d’expédition est donc déjà une aventure à lui tout seul. Comme pour les trawlers de plaisance, il y a les explorer customs et les modèles de série. Parmi ces derniers, plusieurs grands chantiers généralist­es ont développé une gamme, comme Sanlorenzo qui propose deux mo- dèles, les 460 Exp et 500 Exp. Le chantier turc Numarine présente trois modèles, les 26 XP, 32 XP et 45 XP, alors que Benetti projette une gamme spéciale appelée Oasis Class de 110’ et 135’, tout comme l’Italien Rossetti Superyacht­s. D’autres chantiers ne font que des explorers. C’est le cas de l’Allemand Drettman, de l’Américain Bering, de l’Italien Cantiere Delle Marche sans oublier le cas très à part de Damen et des yachts support comme Game Changer. Face à cette production, on trouve les

yachts d’expédition custom, que l’on peut considérer comme la crème des super yachts de voyage. Les plus fameux se nomment Grand Bleu, 112 m, construit en 2010 en Allemagne, Andromeda (ex- Ulysses) 107 m, mis à l’eau en 2015 en Norvège, sans oublier le franco-monégasque Yersin, 77 m, qui a été conçu au chantier Piriou en 2015.

Des remorqueur­s transformé­s

Face à ces princes du voyage, il y a les seigneurs de la haute mer, anciens brise-glace ou remorqueur­s hauturiers que des navigateur­s aussi passionnés que fortunés ont transformé­s en superyacht­s. Ils ont pour nom Enigma, 71,40 m, un navire de surveillan­ce des pêches écossais de 1988 refité par l’architecte naval français Philippe Briand en 2014. Legend, 77,40 m, est un brise-glace russe lancé en 1974 qui a été entièremen­t refait en 2016 au chantier hollandais Icon Yachts, ou encore Arctic, 87,85 m, remorqueur de sauvetage polaire, fabriqué en 1969, et rénové en 1995 à Malte. Tous ces yachts et super yachts ont les attributs esthétique­s et physiques des yachts d’expédition, mais nombre de yachts plus classiques ont effectué de magnifique­s voyages à l’exemple d’Exuma, un 50 m en aluminium dessiné par Philippe Briand et construit au chantier italien Picchiotti en 2010 et qui a réalisé un tour du monde sans rencontrer aucun problème.

 ??  ?? The Tug (43 m) est un projet de l’architecte Franck Neubelt pour le chantier allemand Conrad Shipyard. Le pont arrière est proposé en trois versions, dont un hélipad.
The Tug (43 m) est un projet de l’architecte Franck Neubelt pour le chantier allemand Conrad Shipyard. Le pont arrière est proposé en trois versions, dont un hélipad.
 ??  ?? Sea Ranger est un remorqueur de haute mer de 78 m lancé en 1973 et transformé en yacht de luxe en 1994. Tous les architecte­s ont des projets de yachts d’expédiiton, comme cet explorer de 68 m signé Tony Castro.
Sea Ranger est un remorqueur de haute mer de 78 m lancé en 1973 et transformé en yacht de luxe en 1994. Tous les architecte­s ont des projets de yachts d’expédiiton, comme cet explorer de 68 m signé Tony Castro.
 ??  ?? 77 m (ex- lancé en 1974 comme remorqueur brise-glace russe. Il a été transformé en yacht de luxe en 2015. Ce 35 m fait partie d‘une gamme en projet, appelée Supply vessel, pour le chantier italien Rossetti Superyacht­s.
77 m (ex- lancé en 1974 comme remorqueur brise-glace russe. Il a été transformé en yacht de luxe en 2015. Ce 35 m fait partie d‘une gamme en projet, appelée Supply vessel, pour le chantier italien Rossetti Superyacht­s.
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 ??  ?? Legend, Giant)
Legend, Giant)
 ??  ?? SeaXplorer du chantier allemand Damen (77 m). La constructi­on a débuté en juillet dernier pour un lancement en 2020.
SeaXplorer du chantier allemand Damen (77 m). La constructi­on a débuté en juillet dernier pour un lancement en 2020.
 ??  ?? Yersin, 77 m, est un yacht d’expédition privé, armé par François Fiat. Il a été construit chez Piriou à Concarneau en 2015.
Yersin, 77 m, est un yacht d’expédition privé, armé par François Fiat. Il a été construit chez Piriou à Concarneau en 2015.
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 ??  ?? Numarine 32 XP, 32,50 m construit en Turquie, possède une coque en acier et des superstruc­tures en composite.
Numarine 32 XP, 32,50 m construit en Turquie, possède une coque en acier et des superstruc­tures en composite.
 ??  ?? Oceanic 76, 23,70 m, du chantier italien Canados, est l’exemple des explorers de plaisance.
Oceanic 76, 23,70 m, du chantier italien Canados, est l’exemple des explorers de plaisance.
 ??  ?? Planet Nine, 73,20 m, est un explorer construit en Italie et conçu pour naviguer hors des sentiers battus. Il a une certificat­ion pour aller dans les glaces.
Planet Nine, 73,20 m, est un explorer construit en Italie et conçu pour naviguer hors des sentiers battus. Il a une certificat­ion pour aller dans les glaces.

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