Le grand frisson du racer
Parmi les nombreux passionnés de mécanique automobile classique, rares sont ceux qui osent franchir le pas et sauter pour la première fois dans le baquet d’un racer des années 1960. Jean-Charles Schmitt, amateur éclairé de mécanique vintage, l’a fait.
Les adultes ne se rendent pas toujours compte de la portée de leurs paroles, prononcées avec le plus grand naturel devant de jeunes enfants très attentifs. C’est le cas du grandpère de Jean-Charles Schmitt, d’origine italienne, qui, un jour, a proféré avec assurance et un léger chauvinisme qu’on ne saurait ici lui reprocher : « Les bateaux italiens sont les plus beaux parce qu’ils volent sur l’eau. » On aurait dit un vers ciselé par un poète de la Renaissance, une vérité première et absolue que son petit-fils va engranger et préserver comme un viatique pour le restant de ses jours.
Comme un avion sans ailes
Le contexte de vacances annuelles dans le Piémont, la magie des lacs de Lombardie et l’élégance des rivages de Stresa vont achever de créer dans l’esprit du jeune garçon des envies de planer sur les eaux. Un racer Majorette miniature est alors une source de rêveries infinies. Adulte, Jean-Charles est devenu un amateur éclairé des voitures Alfa Romeo classiques. Il continue à passer des séjours en Italie avec femme et enfants, découvre le lac de Côme. « Il est encore plus impressionnant que le lac Majeur par la présence des hautes montagnes toutes proches, déclaret-il enthousiasmé. Là-bas, on peut louer facilement un bateau et la navigation sur ce plan d’eau très spectaculaire a encore augmenté mon attrait pour les racers. Je me suis donc mis à la recherche du bateau de mes rêves et pris de nombreux contacts avec des pilotes et des collectionneurs lors de rassemblements historiques. Cela m’a pris des années pour trouver celui qui me convenait finalement le mieux et que j’étrenne aujourd’hui après restauration ». Cette mise à l’eau inaugurale tant attendue se déroule le 1 juin 2019 à Pavie, sur le fleuve Tessin,
peu avant son confluent avec le Pô, à l’occasion d’une manifestation commémorative biennale de la célèbre course Pavie-Venise ie-Venise fondée en 1929 en ces lieux. ieux. Jean-Charles Schmitt tt souligne l’importance symbolique que revêt pour lui cette journée mémorable : « Nous célébrons aujourd’hui le 90 anniversaire de cette épreuve mythique, unique au monde. Mon racer Molivio a été construit spécialement pour cette course et lancé en 1969, voici cinqu cinquante ans. La même an année, en 1969, Alfa R Romeo battait un record du monde de vitesse sur un racer de 500 kg. Je tenais absolument à être prêt p pour ce grand jour. C’est aussi l’occasion pour moi de souligner à quel point j’ai été bien accueilli et soutenu par la petite communauté des passionnés de racers en Italie. Je ne pourrais pas les citer tous mais quelle gentillesse, patience et passion, de Gian Pio Ottone, l’ancien pilote qui m’a vendu le bateau, à Dody Jost du Nautilus sur le lac de Côme, en passant par Guido Romani qui chapeaute ces manifestations historiques et par
l’équipe du site internet incontournable, Three Points Hydroplanes. » C’est à l’occasion d’un autre rallye, automobile celui-ci, organisé en 2016 par un couple de Français installés dans le Piémont, Frédéric et Mélanie Lacarelle, que JeanCharles est retourné sur le lac de Côme achevant ainsi le processus d’achat du racer Molivio qui refait là ses premiers tours à Pavie. Frédéric est d’ailleurs, lui aussi, amateur de racers avec un San Marco Alfa Romeo et un Lambro Lancia V6. En France et en Italie, les liens entre bateau et auto sont entretenus avec la même ferveur.
La nostalgie dans la joie
Mais il n’y a pas que sur les plans d’eau que les bateaux se croisent et se recroisent au fil du temps. Ainsi, celui de Jean-Charles a-t-il été construit au chantier de Livio Molinari de Côme en 1968 par un certain Lucini qui apprenait le métier avant d’ouvrir son propre chantier, à Côme également. Par un faisceau d’amitiés et de compétences, c’est ce même Lucini, un