L’entrepreneur avisé
En faisant de FB Design une entreprise ultramoderne, Fabio Buzzi, le dernier des pilotesconstructeurs hérités du vingtième siècle, s’est servi des enseignements de la course pour fournir des bateaux originaux aux grands corps de défense nationale.
Très tôt dans sa vie d’entrepreneur, Fabio Buzzi a compris l’importance cruciale de l’investissement dans les outillages de pointe, quitte à prendre des risques en apparence insensés compte tenu de la taille de son chantier. A ce titre, l’entrée des machines à commande numérique chez FB Design est révélatrice d’un état d’esprit toujours conquérant, par principe : « Pour quelqu’un qui avait toujours conçu et construit ses bateaux sur mannequin en bois, avec des clous, des vis et le fil à plomb, le saut a représenté une nouvelle aventure décisive. »
Un outil en perpétuelle évolution
Toujours sûr de son fait, Fabio poursuit : « J’ai été fasciné par le potentiel de ces technologies. J’avais vu que quelques grands groupes commençaient à s’équiper de fraiseuses géantes capables de réaliser un
modèle à l’échelle un avec une perfection de dimensions sous tous les angles. Pour ne pas subir, dans les années 2000, le triste sort de l’industrie textile dans les années 1970 quand les pays à faible coût de main-d’oeuvre ont pris le dessus, il fallait réagir à temps pour améliorer notre productivité et mettre l’accent sur la haute qualification de nos employés. C’est ainsi que j’ai fait entrer dans la maison ma nouvelle maîtresse, Teresa, une superbe fraiseuse cinq axes de 24 mètres par 6. Depuis, tous les bateaux de chez FB Design sont sortis rigoureusement identiques des deux côtés et naviguent droit, à toutes les vitesses et avec toutes les charges. » L’origine du bateau de course offshore anciennement Gran Argentina, qui a tragiquement battu le record de Monte Carlo à Venise le 17 septembre, révèle aussi les liens étroits entretenus constamment par Fabio Buzzi entre compétition et industrie.
Des champions en grand uniforme
A partir de 1997, le champion italien a arrêté les courses en haute mer pour se concentrer sur les records, la Pavie-Venise et les prometteurs marchés de défense : « La lutte contre les trafics en tous genres s’est transformée en une véritable course de vitesse, de ma
noeuvrabilité et de sécurité. Grâce à notre expérience, nous avons pu proposer à la Guardia di Finanza un nouveau bateau basé sur les succès de notre Gran Argentina en championnat du monde des deux côtés de l’Atlantique. Ainsi, pour la première fois, un équipage militaire de quatre personnes pouvait naviguer protégé et en sécurité à soixantedix noeuds. »
Le lac comme bassin de carène
L’existence de la base d’essais de Fabio Buzzi sur le lac de Côme a aussi énormément compté dans sa capacité de réaction et d’adaptation unique à tous les besoins de mise au point fiable de ses nombreuses innovations industrielles. Elle a constitué une véritable « arme secrète » pour travailler discrètement avec de grands groupes comme Fiat-FPT ou ZF tout en permettant au patron Fabio Buzzi de prendre aussi souvent qu’il le voulait, le volant de ses engins de course ou de ses prototypes les plus ambitieux. Cela s’appelle avoir su joindre l’utile à l’agréable, dans un savant dosage entre rigueur et plaisir, typique du grand champion italien disparu.