Convalescents
Un mois après les inondations meurtrières, les habitants de la résidence Cap vert à Mandelieu-la-Napoule tentent de panser leurs plaies.
Un mois après la vague qui a semé la mort dans les résidences du boulevard de la Tavernière, les stigmates de la catastrophe sont encore présents. Dans les murs comme dans les coeurs. Dans la résidence Cap vert, les occupants des soixante-dix appartements du rez-de-chaussée engloutis sous un mètre d’eau ont été relogés par la mairie. Ou se sont fait prêter un toit. Comme Audrey et Ludovic et leurs deux bambins de 3 et 5 ans évacués in extremis ce soir terrible du 3 octobre.
« Ils ne dormaient pas de la nuit »
« Les quinze premiers jours, nos enfants ne dormaient pas de la nuit. Ils voient un pédo-psy. On a tout perdu. On a chiffré à 40 000 € », glisse la jeune maman. Après huit jours à évacuer la boue de leur appartement, désormais vide, l’heure est à la désinfection et à l’assainissement de toutes les pièces. « C’était des eaux usées, des excréments, des hydrocarbures… Le problème, c’est que tant que les garages ne sont pas secs, on ne peut pas débuter les travaux », regrette le papa. Car les garages sont toujours dans un état catastrophique, les ascenseurs éventrés, les cages d’escaliers souillées. Le pompage des boues, encore en cours, est loin d’être terminé. Certains boxes appartenant à des résidents secondaires renferment encore leur amas immonde. « Encore deux mois de travail sur la résidence » juge Stéphane Carli, de la société de nettoyage SIS, renfort venu de Besançon, dans sa combinaison maculée. Sur toutes les portes d’entrée, une affichette de la mairie annonce le retour à la normale s’agissant du ramassage des encombrants. Soit deux passages par semaine ! «Le
sinistre n’est pas fini : il suffit de regarder les gens et les caves », lâche Sophie, en colère, qui n’a pas encore vidé la sienne. Si la mairie annonce qu’elle fera «du cas par cas en fonction des réalités
du terrain », le traumatisme est encore là. Que tentent de panser les bénévoles du Secours catholique via une aide à la fois morale et financière. « C’est une chose de
voir tout ça à la télé. S’en est une autre d’être avec les gens. La plupart sont touchés », souffle Marie-José Padilla, psychologue bénévole. « On est parti sur un suivi à long terme ici », ajoute Jean-Pierre Bossut, coordinateur venu de Nîmes.
« Chercher des réponses »
Sillonnant toute la journée la résidence, Ginette Denis, présidente du conseil syndical du Cap vert,
orchestre, informe, remonte le moral : « Je m’occupe des autres. Cela m’aide ».
La retraitée veut rectifier sa vérité :
« Ce soir-là, on n’avait pas décidé de remonter nos voitures. Je suis descendue vérifier les pompes de relevage. C’était la vie normale… ». Elle a pu sortir avec sa voiture. De justesse. Avant la vague fatale. Incompréhensible. Aujourd’hui, le Cap vert veut comprendre. « C’est comme si on avait lâché un barrage. Cela m’a rappelé Malpasset en 1959, j’y étais », souffle un résident. « On va chercher des réponses pour comprendre le phénomène raz-de-marée. J’ai commencé des investigations », annonce Olivier, déterminé à décrypter l’impensable. Pour qu’il n’y ait plus jamais un autre 3 octobre.