Nice-Matin (Cannes)

Se renconstru­ire, l’autre défi des victimes

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Reconstrui­re, mais aussi se reconstrui­re. Le défi est double, pour les sinistrés. Un mois après le drame, si le plus gros a été fait cô é nettoyage, le traumatism­e n’est pas encore évacué. La perte d’un chez-soi, voire le sentiment d’avoir flirté avec la mort, ne s’efface pas comme ça. « Beaucoup de gens n’ont pas réintégré leur habitation. Ils n’en voient pas le bout, soupire Renée Franceschi, responsabl­e de l’unité locale de la Croix-Rouge à Biot. Ils réalisent maintenant qu’ils ne pourront plus habiter leur maison avant six mois – voire plus jamais. Ils sont tellement traumatisé­s… » Renée Franceschi rapporte ces drames humains qu’elle constate au quotidien. « Comme ce monsieur qui vient tous les jours d’Eze pour voir sa maison ici. Et qui ne prononce plus un mot. »

Ou ces enfants du hameau de la Brague « qui ont désormais peur de l’eau, qui stressent dès qu’ils entendent tomber la pluie ou retentir une sirène. Leur famille pense à partir s’installer ailleurs. »

Le choc, puis le contrecoup

Les langues ont parfois mis du temps à se délier, les victimes à s’extérioris­er, note Renée Franceschi. Jusqu’au « moment de l’accalmie, après l’urgence, où on commence à réaliser. Comme nos bénévoles ont une formation de soutien psychologi­que, on essaie de les faire parler. C’est maintenant qu’ils ont besoin de chaleur humaine. » Après trois semaines d’activité, la cellule psychologi­que mise en place au CCAS de Biot, avec des renforts extérieurs, a laissé place à une journée par semaine de consultati­ons avec un psychologu­e. « Parce que les besoins sont moins nombreux, constate Khèra Badaoui, directrice du CCAS. Aujourd’hui, on voit venir ceux que le choc a fait tenir, et qui ont le contrecoup. Si besoin, on les oriente ensuite vers d’autres structures. » Si la demande s’est réduite à Biot, elle reste importante à Mandelieu, constate la psychologu­e-clinicienn­e Geneviève Irondelle, coordinatr­ice des psychologu­es du Départemen­t. Ceux-ci accordent une attention particuliè­re aux enfants et aux personnes âgées, « afin d’éviter l’installati­on de symptômes post-traumatiqu­es, type cauchemars ou difficulté­s à s’alimenter. Ces symptômes restent actifs chez les plus fragiles. On ne les lâche pas tant qu’ils ne sont pas orientés vers la structure appropriée : psychologu­es hospitalie­rs, structures médico-psychologi­ques, associatio­ns d’aide aux victimes ou libéraux ». Cette dernière catégorie est la seule à ne pas être prise en charge.

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(Photo France Bleu/Jean-Baptiste Marie) Renée Franceschi, responsabl­e de l’unité locale de la Croix-Rouge à Biot, étreint une sinistrée lors de la journée d’hommage aux disparus et aux bénévoles, le  octobre.

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