Des insectes à croquer, ça vous tente ?
Des commerces azuréens commencent à vendre, pour l’apéritif, des grillons et chenilles aromatisés. Mais pas encore question de remplacer le boeuf ou le poulet par ces substituts riches en protéines
En Afrique, Asie et Amérique latine, deux milliards de personnes mangent des insectes, la plupart du temps cuisinés, parfois crus. Moins par inclination personnelle que pour assurer un indispensable apport en protéines. Dans les années à venir, cette consommation va se développer, pour répondre aux besoins alimentaires d’une population mondiale toujours plus nombreuse et pallier le prix élevé de la viande issue de troupeaux domestiques. « D’ici à 2050, résume un expert agricole, la demande en protéines va doubler. Pour la satisfaire, les insectes comestibles constituent l’une des quatre pistes, avec les micro-algues et le plancton, les OGM et la viande de synthèse. »
Un flou juridique
La consommation de petites bêtes inspirant jusqu’ici la répulsion va-t-elle se banaliser en Europe, et en France en particulier ? On n’en est pas encore là, au moins pour remplacer boeuf, mouton et volaille, mais on voit apparaître les prémices de bouleversements culinaires à venir. Officiellement, la commercialisation et la consommation d’insectes ne sont pas autorisées dans l’Union européenne. En pratique, elles sont tolérées dans la plupart des pays, dont le nôtre. En pointe, la Belgique a « légalisé » dès décembre 2013 dix espèces, parmi lesquelles le grillon domestique, le ver de farine géant, le criquet migrateur africain ou encore la chenille de la fausse teigne. En dépit du flou juridique existant dans la quasi-totalité du Vieux Continent, une filière européenne se met en place. Sur la Côte d’Azur, plusieurs commerces, dont Lafayette Gourmet à Cap 3 000, ou encore l’épicerie fine Aperitiv à Nice (lire ci-dessous), vendent des grillons et chenilles élevés aux Pays-Bas puis aromatisés en France pour agrémenter l’apéritif. Près de Toulouse, une entreprise s’est lancée dans l’élevage de deux autres espèces pour les aromatiser, mais également les transformer en poudre entrant dans la composition de gâteaux et de pâtes alimentaires (lire page ci-contre).
% seulement de Français réfractaires ?
Pour le p.-d.g. de cette société innovante, Cédric Auriol, la population française n’est plus majoritairement opposée à la consommation d’insectes. « Selon une étude que nous avons récemment conduite, affirme-t-il, 40 % des gens ont un a priori favorable, 40 % n’ont pas d’avis, et seuls 20 % sont réfractaires. Soit la même proportion que pour les huîtres, les escargots ou les cuisses de grenouilles. L’hostilité est beaucoup moins répandue que je ne l’aurais imaginé au départ. » Un restaurateur niçois, qui proposait parmi d’autres options un menu à base d’insectes, n’est pas du même avis. Lassé des insultes à répétition sur son site Internet et des annulations accompagnant un reportage sur l’établissement, il a retiré les petites bêtes de sa carte.