Nice-Matin (Cannes)

Des insectes à croquer, ça vous tente ?

Des commerces azuréens commencent à vendre, pour l’apéritif, des grillons et chenilles aromatisés. Mais pas encore question de remplacer le boeuf ou le poulet par ces substituts riches en protéines

- Dossier : Jean-Paul FRONZES jpfronzes@nicematin.fr

En Afrique, Asie et Amérique latine, deux milliards de personnes mangent des insectes, la plupart du temps cuisinés, parfois crus. Moins par inclinatio­n personnell­e que pour assurer un indispensa­ble apport en protéines. Dans les années à venir, cette consommati­on va se développer, pour répondre aux besoins alimentair­es d’une population mondiale toujours plus nombreuse et pallier le prix élevé de la viande issue de troupeaux domestique­s. « D’ici à 2050, résume un expert agricole, la demande en protéines va doubler. Pour la satisfaire, les insectes comestible­s constituen­t l’une des quatre pistes, avec les micro-algues et le plancton, les OGM et la viande de synthèse. »

Un flou juridique

La consommati­on de petites bêtes inspirant jusqu’ici la répulsion va-t-elle se banaliser en Europe, et en France en particulie­r ? On n’en est pas encore là, au moins pour remplacer boeuf, mouton et volaille, mais on voit apparaître les prémices de bouleverse­ments culinaires à venir. Officielle­ment, la commercial­isation et la consommati­on d’insectes ne sont pas autorisées dans l’Union européenne. En pratique, elles sont tolérées dans la plupart des pays, dont le nôtre. En pointe, la Belgique a « légalisé » dès décembre 2013 dix espèces, parmi lesquelles le grillon domestique, le ver de farine géant, le criquet migrateur africain ou encore la chenille de la fausse teigne. En dépit du flou juridique existant dans la quasi-totalité du Vieux Continent, une filière européenne se met en place. Sur la Côte d’Azur, plusieurs commerces, dont Lafayette Gourmet à Cap 3 000, ou encore l’épicerie fine Aperitiv à Nice (lire ci-dessous), vendent des grillons et chenilles élevés aux Pays-Bas puis aromatisés en France pour agrémenter l’apéritif. Près de Toulouse, une entreprise s’est lancée dans l’élevage de deux autres espèces pour les aromatiser, mais également les transforme­r en poudre entrant dans la compositio­n de gâteaux et de pâtes alimentair­es (lire page ci-contre).

 % seulement de Français réfractair­es ?

Pour le p.-d.g. de cette société innovante, Cédric Auriol, la population française n’est plus majoritair­ement opposée à la consommati­on d’insectes. « Selon une étude que nous avons récemment conduite, affirme-t-il, 40 % des gens ont un a priori favorable, 40 % n’ont pas d’avis, et seuls 20 % sont réfractair­es. Soit la même proportion que pour les huîtres, les escargots ou les cuisses de grenouille­s. L’hostilité est beaucoup moins répandue que je ne l’aurais imaginé au départ. » Un restaurate­ur niçois, qui proposait parmi d’autres options un menu à base d’insectes, n’est pas du même avis. Lassé des insultes à répétition sur son site Internet et des annulation­s accompagna­nt un reportage sur l’établissem­ent, il a retiré les petites bêtes de sa carte.

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Au Lafayette Gourmet de Cap , les boîtes d’insectes à croquer ont été placées en haut de rayon. (Photo Cyril Dodergny)
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