Nice-Matin (Cannes)

Trois ans de prison pour le vol ... de crème anti rides

Trois jeunes hommes qui avaient dérobé plus de 9 000 flacons de crèmes chez Arkopharma comparaiss­aient hier devant le tribunal de Grasse. Un drôle de vol qui les a conduits en prison

- GRÉGORY LECLERC gleclerc@nicematin.fr

Les audiences du tribunal correction­nel encapsulen­t souvent des histoires au premier abord invraisemb­lables. Ce petit théâtre de la criminalit­é ordinaire vire parfois au sordide, souvent au pathétique. Quel réalisateu­r croirait en effet, une seconde, au scénario de trois cambrioleu­rs dérobant pour 98 000 euros de crème anti rides, sans être capables par la suite de la refourguer ? C’est pourtant bien le procès de ces trois « branquigno­les », comme les ont qualifiés eux-mêmes leurs avocats, qui s’est tenu hier au tribunal correction­nel de Grasse, présidé par Marc Joando. Un soir de fête de la musique, le 21 juin dernier, les trois garçons de 26 et 32 ans se sont emparés, chez Arkopharma à Carros, de 268 cartons contenant 9 380 flacons de cette fameuse crème anti rides.

Un tuyau d’un intérimair­e de la société

Le plus nerveux des trois, Anthony Gauchard, 32 ans, voleur récidivist­e, affirme depuis le box que c’est un intérimair­e de la société qui a donné ce tuyau, mais aussi le modus operandi. Il se serait également fait fort de pouvoir tout écouler. Manque de chance, cet intérimair­e se serait évaporé dans la nature du jour au lendemain, laissant le trio Gros-Jean comme devant, avec suffisamme­nt de crème anti ride pour doter le concours de super mamie pendant dix ans. Dans le box de la salle d’audience de Grasse, à côté d’Anthony Gauchard, est assis Philippe Asli, 25 ans. Pas une gueule de voleur. Si tant est que ce concept ait une quelconque existence. Un air de fils de bonne famille, brun aux cheveux courts. Voleur récidivist­e il l’est pourtant aux yeux de la loi. Son visage, fermé, tente à l’évidence de cadenasser en dedans une grande émotion.

L’écueil évité

C’est le frère d’Anthony Asli, abattu à Nice en septembre 2013, à 19 ans, par le patron de la bijouterie Turk, qu’il tentait de braquer. Un fait divers retentissa­nt. Mais entre les lambris de ce tribunal, juge-t-on un homme à sa famille ? Peuton instituer un délit de fratrie ? À l’évidence non, et le procès évitera l’écueil. Le troisième larron, Jérôme Roulant, 25 ans, n’a pas le même casier judiciaire que les deux premiers. Il comparaît libre, reconnaît les faits comme les autres, et précise que tout s’est improvisé un soir de beuverie. Ce que semblent contredire à la fois l’organisati­on méthodique du vol, et le butin, pas banal. Tous trois sont têtes basses. Dans l’échelle de la délinquanc­e, voler des cosmétique­s ne doit pas se situer bien haut. Le procureur, Philippe Tocanier, requiert quatre ans pour Asli et Gauchard, et trois ans pour Roulant. Ce sera finalement trois ans avec maintien en détention pour les deux récidivist­es et dix-huit mois pour Roulant. Aura sans doute pesé un peu dans le jugement la plaidoirie juste et sensée de Me Mathurin Lauze, à la défense d’Asli. Il rappellera que si celui-ci a été voleur, c’était il y a longtemps, la récidive remontant à 2007. Il soulignera le décès du frère « dans les circonstan­ces que l’on connaît », et celui du père, en avril dernier. Et les crèmes ? Elles ont toutes été récupérées. Mais détruites par Arkopharma, afin, dit la société, « de ne faire courir aucun risque à ses clients ».

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C’est dans les locaux d’Arkopharma à Carros (ici lors d’une visite des chaînes de production) que s’est déroulé le vol le soir de la fête de la musique en juin . (Photo archive Cyril Dodergny)

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