« À Monaco, tout change »
Frédéric Vasseur vit son premier GP en Principauté à la tête du Team Renault. Un autre monde
Polo jaune et logo Renault sur le coeur. Nous avons rencontré Frédéric Vasseur, directeur de la compétition Renault F Team depuis février, de retour du garage après la première séance d’essais libres jeudi. Il est midi et cet ingénieur français de ans vient de regagner au pas de charge le motorhome de la marque au losange. Serein, il nous a détaillé le plan de bataille de Renault. Lors de cette première journée, ses pilotes Magnussen et Palmer ont embrassé les rails du tracé.
Ces premiers tours de roues? Un peu dur. Jolyon (Palmer) a tapé à mi-séance et a compromis la première journée d’essais. Kevin (Magnussen) a de nouveaux réglages châssis et aussi un nouveau moteur. Mais le moteur, ce n’est pas l’élément déterminant ici, ça servira pour la suite. Disons que le circuit est tellement atypique qu’on a du mal à retrouver les évolutions qu’on avait engagés lors des tests de Barcelone. Il faut bien préparer les essais.
Étiez-vous satisfait de vos essais à Barcelone? Oui, c’était plutôt bon. Le moteur marchait bien, donc c’était un point important. On a fait des améliorations sur le châssis aussi. Mais il faut trier tout ça et faire les bons choix parce que Monaco n’est pas un circuit comme les autres.
Quels sont vos objectifs ici ? perd ce fil, après, il est très compliqué de retrouver la confiance pour la suite.
Vous dirigez pour la première fois une écurie de F. Quelles sont les clés de la réussite? L’approche est très similaire de ce qu’on retrouve en GP ou DTM. Il faut créer une dynamique autour du pilote qui doit être en confiance. Tirer en même temps le meilleur des ingénieurs et de la structure technique. Et bien driver tout ça. C’est encore plus vrai à Monaco, car tout est atypique. Les réglages châssis et moteur sont très différents ici et même pour le pilote, c’est assez singulier. Il n’a pas le droit à l’erreur du weekend, alors qu’il y a une attirance naturelle vers les rails qu’il faut apprivoiser au fil des tours (rires). En parlant de rails, vous, vous êtes de l’autre côté. Comment se vit le Grand Prix? C’est une course comme les autres en terme d’enjeux, dans un monde pas comme les autres. Il y a plus de pression et d’attente. Ici, plus qu’ailleurs, il y a une épée de Damoclès en permanence, qui peut tomber au moindre faux pas. Ça crée forcément une tension supplémentaire. Là où on peut s’autoriser de mettre deux roues de l’autre côté de la ligne, à Monaco, ça ne passe pas. Et c’est vrai pour les pilotes, mais aussi pour les mécaniciens. Dans les stands, c’est serré. On fait aussi de la course auto pour vivre cette pression. Toute l’année en général, les process se répètent, c’est archi-rodé… mais à Monaco, pour douze mille raisons, tout change ! Êtes-vous aussi stressé que les pilotes? Non, le pilote, il côtoie beaucoup plus les rails que moi. J’ai juste à gérer cette pression supplémentaire au sein de l’équipe. La pression de l’extérieur aussi, avec dix fois plus de journalistes et d’invités. Mais celui qui frôle les rails, c’est le pilote, ce n’est pas moi.
Êtes-vous satisfait de l’état de forme de l’écurie par rapport au plan de route que vous vous étiez fixé? On s’attendait à des débuts hyperdifficiles. Fin décembre, au moment de s’engager, on savait que rien n’allait se faire tout seul. Les premiers mois ont été bons. On a su créer une dynamique entre nos usines d’Enstone et Viry, et on progresse sur la grille. Tout est très positif. Ce que je ne voulais pas, c’est qu’on se retrouve dans une situation d’abandon sur l’année, en pensant déjà à la saison suivante. Une équipe de course, c’est quelque chose qui se construit et qui s’entretient. On doit rester sous la pression du résultat. Il faut garder la gnaque. C’est indispensable. Tout le monde ne peut pas ambitionner de gagner, nous les premiers cette année. Mais quand on est e, on veut être e, et quand on est e on doit chercher à faire e. Il ne faut pas se freiner.
Un podium cette saison, c’est illusoire? Compte tenu de notre position sur la grille, à la régulière, ce n’est pas réaliste du tout. Pour qu’on grimpe sur le podium, il faudrait des circonstances de course exceptionnelles. Un alignement des astres... et des rails, parfait (rires).
Sentez-vous le poids de l’étendard Renault ici? Oui un petit peu quand même. C’est le Grand Prix français quelque part. Je ne sais pas si les Monégasques apprécient quand on dit ça (sourire). C’est le seul GP où l’aéroport se situe en France, et puis on a ici beaucoup plus d’invités que sur des circuits plus exotiques. Monaco, ça fait rêver tout le monde. RECUEILLI PAR FABIEN PIGALLE