Nice, théâtre du grand départ
Aujourd’hui, le Giro emprunte les routes montagneuses de la Tinée. Un passage dans le département dix-huit ans après le départ de la 81e édition donné de l’avenue de Verdun
Nous sommes en mai 1998. Deux mois avant un été sportif inoubliable pour notre pays. Si juillet 1998 résonne encore comme un mois de fête grâce à la bande à Aimé Jacquet, pour la planète cyclisme ce mois-ci est surtout synonyme de désenchantement et de dopage, avec les révélations de l’affaire Festina. Mais en ce samedi 16 mai, c’est encore la candeur qui se dégage du peloton. Grâce à l’appui des chambres de commerce du Piémont et de Lombardie, Nice a pu obtenir le départ de ce 81e Giro. Une délocalisation extrêmement rare à cette époque. Nice voit donc débarquer quelques stars de la petite reine. Gianni Bugno, Marco Pantani, Pavel Tonkov, Michele Bartoli, Mario Cipollini, Alex Zülle ou encore Luc Leblanc, qui espère jouer les trouble-fête à 33 ans, sont les principaux noms de ce Giro.
Le show “Cipo” La veille du départ, c’est évidemment Cipollini, autant connu pour ses qualités de sprinter que de showman, qui fait sensation. Il débarque au Palais des Expositions de Nice avec des lunettes noires, les cheveux peroxydés dans un costume bleu nuit parfait. Prêt pour grimper les marches à Cannes. Le dimanche, c’est encore le Toscan qui est le plus applaudi sur la promenade des Anglais au moment du départ. Car la capitale azuréenne aura le plaisir de garder pendant deux jours tout ce petit monde. D’abord avec un prologue de 7 kilomètres sur la promenade des Anglais, puis le lendemain avec un départ d’étape en direction de Cuneo, depuis la place Masséna, suivi d’un tracé vers l’est et Menton via la grande corniche, avant de quitter le département par le col de Tende. Deux étapes marquantes pour Fabrice Gougot, l’un des six Français qui ont pris le départ de l’épreuve : « J’étais l’un des seuls Français à être motivés pour faire le Giro. D’autant qu’il partait de Nice, où il y a ma belle-famille et des amis. Il y avait beaucoup de monde au bord des routes », se souvient l’actuel vice-président du CC Vence. Un homme le marque davantage. « Cipollini, c’était le vrai patron du peloton. S’il décidait de partir tranquillement, on pouvait être sûr que ça roulerait doucement les 100 premiers kilomètres. Je me souviens même qu’on s’était arrêté prendre la collation avec ses fan-club sur le bord de la route, où l’on mangeait des gâteaux et des spécialités locales. C’était un coureur que j’adorais, qui a fait beaucoup de bien au cyclisme ». Au niveau sportif, c’est Zülle qui met tout le monde d’accord sur le prologue, avec un parcours bouclé à plus de 53 km/h. Le Suisse, parti dans les derniers et après un énorme orage, envoie un message à tous ses adversaires. Pantani et Gotti sont relégués à plus de 30 secondes. Mais nous n’en sommes qu’au début et le “Pirate” finira par chipper le maillot rose à Zülle dans la dernière semaine. A l’arrivée à Milan, le grimpeur de la Mercatone Uno s’impose devant Tonkov et Guerini. Son unique victoire dans le Giro, deux mois avant de réaliser le doublé sur le Tour. Une légende, même si elle finira écornée, qui avait débuté sur nos routes.
ROMAIN LARONCHE