Eder, zéro devenu héros
L’unique buteur de la finale est un joueur atypique. Moqué après le Mondial 2014, incapable de s’imposer à Swansea, c’est à Lille que le Portugais s’est relancé, avant de crucifier les Bleus
Un petit but en trois matches joués seulement, sur les 7 qu’a disputés le Portugal pour remporter son premier titre international. Faible bilan pour un attaquant de pointe. Mais quel but ! Une frappe limpide, pure, à 12 minutes de la fin des prolongations. « Ils nous ont mis un coup derrière la tête ,areconnu Olivier Giroud. En un but, fêté comme il se doit par les Portugais, l’avant-centre acheté cet été par le club français de Lille a sans doute retourné pour toujours l’opinion des Portugais à son égard. Car
avant d’être le héros de la finale de l’Euro 2016, l’attaquant d’origine bissau-guinéenne était loin de faire l’unanimité au pays de CR7. Début avril, il avait même dû essuyer des sifflets de la part de son public lors d’un match amical contre la Belgique. Interrogé sur son statut de « mal-aimé » avant le début du tournoi, il avait assuré ne pas vouloir « faire taire les critiques ». « Ça ne m’intéresse pas », avait-il lâché. « Ce que je veux c’est travailler pour ma sélection. » Il a travaillé, donc, et fait des choix avisés en décidant de rejoindre Lille en provenance de Swansea (Premier League), en prêt, lors du mercato d’hiver dernier. Avec comme objectif de se mettre en valeur pour convaincre son sélectionneur de l’emmener à l’Euro 2016. « Le championnat de France m’a donné l’opportunité de montrer mes qualités, dont certaines étaient même endormies », disait-il le 11 juin. « C’était une excellente expérience dans un championnat très difficile. » A Lille, Eder a en effet rayonné, avec 6 buts et 4 passes décisives en 13 sorties, le tout agrémenté de
ce qui fait un vrai N.9 : un bon travail dos au but, une carrure qui pèse sur les défenses et mobilise des joueurs adverses.
Ronaldo l’avait prédit
Le Portugais de 28 ans est « un guerrier », assure son entraîneur en club Frédéric Antonetti. Il entraînera un champion d’Europe la saison prochaine puisqu’Eder a signé pour quatre ans. Arrivé enfant au Portugal depuis sa Guinée-Bissau natale, il a été formé à l’Academica Coimbra, avant de percer à Braga (33 buts en 82
matches entre 2012 et 2015) puis de faire le grand saut en Premier League. Mais son physique atypique, avec son allure dégingandée, ainsi que sa technique parfois rudimentaire au pays des ailiers dribbleurs, en ont fait un joueur pas franchement apprécié par le public portugais. D’autant qu’en sélection, sa réussite est plutôt faible, avec 4 buts inscrits en 29 sélections. Il a dû attendre sa 18e cape pour marquer son premier but. Balayés, oubliés, les griefs passés? « Depuis que Fernando Santos m’a convoqué, j’ai tout donné et je suis très content de ce que nous avons réalisé », a réagi le buteur dimanche. « Je savais que mon
heure allait sonner quand j’ai été convoqué. J’avais une grande confiance, je savais qu’un moment comme celuici pouvait arriver. » Avant qu’il entre sur le terrain, son capitaine, blessé lors du match, Cristiano Ronaldo, lui a d’ailleurs assuré que « ce serait lui qui ferait la décision ». « J’ai senti qu’il pouvait marquer le but de la victoire », a assuré le triple Ballon d’or. Forcément, il fallait que ce soit lui.